Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Séance en hémicycle du jeudi 7 novembre 2019 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Santé ; solidarité insertion et égalité des chances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

Je reprendrai en partie les arguments de ma camarade rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Caroline Fiat, qui a su exposer avec clarté et intelligence les enjeux du budget de la mission « Santé ». Dans celui-ci, l'AME occupe une très grande place. Celle-ci finance les soins de santé administrés aux personnes étrangères en situation irrégulière en France et bénéficie à un peu plus de 300 000 personnes, ce qui est très peu.

La France qu'on aime est une France humaniste, qui accueille, protège et accompagne toutes les personnes en détresse. L'AME l'incarne, car toute personne présente sur notre sol mérite d'être traitée dignement soignée si elle est malade : cela s'appelle « l'humain, d'abord » ! Les études montrent que le recours à l'AME n'est pas un motif d'arrivée en France ; pire, ce sont les conditions d'accueil indignes qui rendent les gens malades.

Ne nous voilons pas la face : ce dispositif ne répond pas qu'à une exigence d'humanisme ; il représente également une mesure de sécurité sanitaire pour toute la population. En effet, mes chers collègues, aucun microbe ne fait de différence entre les personnes. Que vous soyez français, allemand, syrien, turc, yéménite, chilien ou malien, vous tombez malade ! Une personne qui ne serait pas soignée ici pourra transmettre sa maladie aux personnes de son entourage. Cela, tout le monde le comprend, car c'est très pragmatique. Donc, quoi qu'il arrive, de quelque façon qu'on conçoive le but de cette aide, celle-ci est absolument nécessaire ! Ce serait une faute morale de laisser une personne malade dans la difficulté et ce serait une faute politique de laisser des maladies se transmettre par pure vision comptable ou xénophobe.

J'en viens à un point plus politique que technique, qui pourrait résoudre définitivement le débat puant, qui revient chaque année, sur la diminution ou la suppression de l'AME. En effet, le statut de cette prestation est particulièrement étrange : alors que l'ensemble des dépenses de santé sont prises en charge par la sécurité sociale, l'AME est une ligne budgétaire de l'État. Et cela fait une différence fondamentale ! Le droit à la santé, c'est le droit à la vie ! Et nous avons créé la sécurité sociale pour protéger le droit à la santé, parce qu'il ne doit pas s'agir d'une ligne budgétaire comme une autre. L'AME ne peut pas être confiée à l'État, elle ne peut pas être l'objet d'un débat d'experts-comptables et de petits boutiquiers sur les économies à réaliser.

On ne cessera jamais de le rappeler : on ne peut pas imposer des économies lorsque l'on parle de la santé des gens, des êtres humains ! C'est bien là que le bât blesse : ici, nous avons encore une discussion pour savoir s'il faut donner plus ou moins d'argent pour soigner des gens. Ce débat paraît acceptable aux yeux de certaines personnes, simplement parce que les bénéficiaires sont des étrangers.

À La France insoumise, nous souhaitons que l'AME soit intégrée au budget de la sécurité sociale. Défendent également cette idée l'IGAS et l'IGF dans des rapports de 2007 et de 2010, le Conseil national du sida et des hépatites virales – CNS – , le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale – CNLE – , le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes – HCE – en 2017 et le Défenseur des droits dans un rapport de 2014 consacré au refus de soins.

À présent, voilà que le Gouvernement veut revenir sur les droits prévus par l'AME. Désormais, il faudra se trouver en situation irrégulière depuis trois mois pour en bénéficier – soit trois mois pendant lesquels les malades souffriront et connaîtront une nette aggravation de leur situation, ce qui, au final, coûtera encore plus cher.

L'annonce du Gouvernement n'a donc qu'un seul objectif : continuer à courir derrière l'extrême droite, en épousant ses thèses. Nous n'en voulons pas !

Je citerai le Mahatma Gandhi : « En opposant la haine à la haine, on ne fait que la répandre en surface et en profondeur ». Le groupe La France insoumise continuera à soutenir l'aide médicale d'État et ses moyens financiers !

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