Intervention de Francis Vercamer

Séance en hémicycle du mercredi 6 novembre 2019 à 21h30
Projet de loi de finances pour 2020 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrancis Vercamer :

Le groupe UDI, Agir et Indépendants aborde l'examen de cette mission en se montrant vigilant sur plusieurs points.

Sur la santé au travail tout d'abord, il nous paraît urgent de retrouver une réelle dynamique de prévention des risques professionnels associant services de santé au travail, partenaires sociaux, médecins du travail et leurs équipes pluridisciplinaires. Chacun de ces intervenants accomplit aujourd'hui sa tâche avec rigueur.

Les plans santé au travail qui se sont succédé depuis dix-neuf ans ont permis de mobiliser les différents acteurs de la santé au travail autour d'objectifs partagés et d'affirmer la prévention des risques professionnels parmi les priorités de l'État. Dans ce domaine, les enjeux sont nombreux. Qu'il s'agisse des disparités en matière d'accidents du travail, du développement des maladies professionnelles, de l'exposition de plus en plus importante aux risques psychosociaux, les sujets à traiter sont lourds d'implications.

Ils s'aggravent d'une complexité supplémentaire liée à la démographie médicale et la baisse du nombre de médecins du travail en activité. Or, en dépit de plusieurs rapports apportant chacun leur contribution et leurs propositions, la réforme de la santé au travail, pourtant annoncée par le Gouvernement pour 2019, semble rester au point mort. Nous regrettons que le budget de la mission « Travail et emploi » ne traduise pas l'application de cette réforme, alors même qu'une ambitieuse politique de prévention reste à déployer en matière de risques professionnels.

Nous continuons ensuite de nous interroger sur la portée réelle des PEC, les parcours emploi compétences, qui ont succédé aux emplois aidés, sans toutefois parvenir à les remplacer. En raison principalement des règles qui les encadrent, les PEC restent particulièrement difficiles à utiliser pour le monde associatif pourtant demandeur de ce type de contrats.

Les contrats aidés sont des dispositifs qui permettent de donner ou redonner accès au marché du travail à certains de nos concitoyens les plus éloignés de l'emploi, en particulier dans les QVP, les quartiers prioritaires de la politique de la ville. C'est la raison pour laquelle il est prudent de ne pas en rendre la gestion plus complexe pour les employeurs associatifs, qui restent eux-mêmes relativement fragiles.

J'appelle enfin votre attention sur la difficulté à développer significativement, en dépit des réformes, une alternance sous une autre forme que l'apprentissage. Trop d'étudiants restent en recherche d'entreprises susceptibles de les accueillir dans le cadre de leur formation, sans trouver de solutions. Il est souhaitable de réfléchir à une incitation suffisamment décisive pour faciliter leur embauche.

Ce budget est examiné dans un contexte de baisse du chômage. Il convient toutefois de rester lucide sur la portée de celle-ci : elle n'est en effet pas uniforme, et le chômage structurel, de longue, voire de très longue durée, reste massif. Aujourd'hui, 48 % des demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi le sont depuis plus d'un an. En 2019, le nombre de demandeurs d'emploi au chômage de longue durée, supérieure à deux ans a augmenté de 13,6 % au premier trimestre, de 11,6 % au deuxième trimestre, et de 6,4 % au troisième trimestre. Le chômage d'une durée supérieure à trois ans a augmenté de 2,8 % au premier trimestre, de 3,1 % au deuxième trimestre, et de 3,8 % au troisième.

Cette persistance d'un chômage structurel prend tout son relief à l'approche de la réforme des retraites pour laquelle ceux qui réclament un départ plus tardif sont aussi ceux qui se séparent de plus en plus tôt de leurs collaborateurs seniors.

Même si le chômage de longue durée ne se résume pas à celui des seniors, loin s'en faut, ces derniers en constituent l'un des aspects. La question de l'emploi des seniors reste un défi à relever, auquel le budget de cette mission ne semble répondre que très partiellement. On peut le regretter, d'autant que la Cour des comptes a récemment insisté sur le triplement du nombre de demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans depuis 2008, et sur le risque de paupérisation de cette population. On retrouve la même inquiétude concernant le chômage de longue durée dans les QVP, avec ce risque de voir le fossé se creuser chaque jour un peu plus entre ceux qui bénéficient de l'amélioration de l'emploi et ceux qui restent malheureusement relégués.

Les effets sur la cohésion sociale sont délétères, et je ne peux que renouveler la mise en garde que j'adressais l'année dernière sur le risque que la situation dégénère, voire explose, dans ces quartiers.

Ce budget doit donc traduire une mobilisation de tous les acteurs de l'emploi contre le chômage de longue durée. Sur ce point, fidèle à notre conception décentralisatrice, nous estimons que le rôle joué par les territoires est essentiel grâce aux collectivités et aux élus locaux. C'est pourquoi nous saluons la généralisation des emplois francs à l'ensemble des QPV. Seule la mobilisation des communes, des intercommunalités et des élus locaux aux côtés du service public de l'emploi permettra au dispositif des emplois francs d'atteindre l'objectif fixé à 40 000 emplois.

La métropole de Lille en est l'illustration. Les initiatives territoriales, parce qu'elles répondent le plus précisément aux besoins détectés sur le terrain, doivent pouvoir être épaulées. Les élus locaux, à l'échelle des territoires, restent des ensembliers efficaces de ces politiques. C'est pourquoi nous espérons que notre amendement confortant à leur niveau de 2019 les crédits des maisons de l'emploi, qui a été adopté en commission, le sera également en séance.

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