Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du vendredi 8 novembre 2019 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Relations avec les collectivités territoriales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune :

Madame la ministre, je souhaiterais, pour commencer, vous faire part d'un regret. Le rapporteur général et les deux rapporteurs spéciaux en sont témoins : j'ai réclamé à plusieurs reprises le rapport annuel sur le FPIC ; or, à cette heure, je ne l'ai toujours pas reçu. Pourtant, je crois savoir que vos services l'ont produit – il a dû rester coincé quelque part, peut-être au secrétariat général du Gouvernement.

Le FPIC fait, chaque année, l'objet de nombreux amendements, et il est utile pour les parlementaires de disposer d'un bilan objectif de ce fonds de péréquation horizontale. Il nous serait également précieux de disposer du rapport – maintes fois réclamé, en vain, à la direction générale des finances publiques, la DGFIP – sur le coût pour les collectivités territoriales des mesures d'exonération et d'abattement d'impôts directs locaux, ainsi que du rapport prévu par le projet de loi de finances pour 2019 sur les coefficients logarithmiques utilisés, d'une part, pour le calcul du potentiel financier agrégé par habitant des ensembles intercommunaux, d'autre part, pour le calcul du potentiel fiscal par habitant des communes. Ces omissions sont-elles volontaires, madame la ministre ? Je ne le pense pas. Sont-elles la conséquence d'une baisse continue des effectifs dans certains services de l'État ? La question se pose.

J'appelle en second lieu votre attention sur la péréquation. Le jaune budgétaire sur les transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales indique, page 123, que, « deux fois plus élevée que la péréquation horizontale, la péréquation verticale témoigne de l'engagement de l'État en faveur de la réduction des inégalités territoriales » et qu'elle augmentera en 2020 de 220 millions d'euros. Savez-vous, madame la ministre, qui paie ces 220 millions d'euros ? Ce sont les collectivités elles-mêmes. Il serait temps de tenir un discours de vérité si vous souhaitez retrouver la confiance des élus.

Depuis 2018, l'accroissement des enveloppes de la DSU et de la DSR est supportée à 100 % par les collectivités. Le pire, dans cette affaire, c'est que les collectivités les plus aisées, qui ne perçoivent plus de DGF, comme Blagnac, Berre-l'Étang ou Puteaux, ne contribuent pas à la péréquation. Et que dire – j'y reviendrai plus longuement à l'occasion de la présentation d'un amendement – de ces sept EPCI qui se voient appliquer un régime dérogatoire minorant leur richesse, ce qui leur permet de s'exonérer eux aussi de toute solidarité, et même d'être bénéficiaires du FPIC, alors que six d'entre eux étaient contributeurs nets en 2012 ! Il en va de la fiscalité des collectivités comme de la fiscalité des ménages : l'injustice crée la colère et la frustration, qui sont, croyez-moi, bien réelles dans certains territoires.

Il y a quelques jours l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité, l'AMF, dénonçait un « écart » entre les discours de l'exécutif sur les collectivités locales et la réalité de la politique menée. Réduisez l'écart, madame la ministre, et tenez un langage de vérité, seul à même de réconcilier l'État avec les élus locaux.

J'entendais un ministre assurer que les concours financiers de l'État augmentaient cette année de 600 millions d'euros, laissant entendre que le Gouvernement faisait un effort particulier. Or cette hausse n'est que la résultante du dynamisme du FCTVA lié au cycle électoral et de la dynamique de la TVA, dont une part est versée aux régions ; bref, rien de plus que l'application mécanique de la loi.

J'entendais également un de mes collègues prétendre que les transferts financiers de l'État aux collectivités dépassaient les 100 milliards d'euros : « C'est énorme ! », disait-il. Mais il ne savait pas ce que recouvrent ces 100 milliards : transferts financiers, concours financiers, fiscalité transférée, compensations d'exonérations… Ne croyez-vous pas, madame la ministre, qu'il serait temps de concevoir une loi de programmation des finances publiques locales et une loi de financement des collectivités locales, gages de visibilité pour les élus, gages de transparence, gages de confiance ?

Revenons à la mission RCT et à ses programmes. Les congrès départementaux des maires se sont tenus. À chaque fois, le représentant du Gouvernement, ministre ou membre du corps préfectoral, a annoncé le maintien de l'effort de l'État en faveur de l'investissement – c'est une bonne chose – , avec une DETR à un niveau historiquement élevé. Parce que ces annonces ne doivent pas se traduire, pour la troisième année consécutive, par une réduction des enveloppes destinées à certains départements ruraux, nous avons, avec le rapporteur général et les deux rapporteurs spéciaux, que je remercie, travaillé avec vos services, madame la ministre, dont je souhaite remercier l'écoute et la disponibilité. Nous avons, je crois, trouvé un bon compromis, qui nous laisse le temps nécessaire pour, je l'espère, repenser les fonds de soutien à l'investissement dès 2020 – sous réserve que nous nous mettions au travail dès janvier prochain !

J'entends, enfin, plusieurs voix évoquer une réforme de la DGF ; celle-ci représente un peu moins de 27 milliards d'euros versés aux communes et aux EPCI. C'est une réforme difficile – vous le savez aussi bien que moi, madame la ministre – , mais indispensable. Ma question est simple : y êtes-vous prête ? Si oui, quel calendrier vous semble raisonnable ?

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