Intervention de Marielle de Sarnez

Réunion du mardi 5 novembre 2019 à 17h35
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarielle de Sarnez, présidente :

Nous avons aujourd'hui le grand plaisir de recevoir Jean-Baptiste Lemoyne qui, fidèle à cette commission, se présente devant nous avant le Conseil des affaires étrangères sur les questions commerciales du 21 novembre. L'ordre du jour en sera probablement chargé en raison du contexte de tensions commerciales actuel.

Nous souhaitons aborder plusieurs questions. La réforme de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) est aujourd'hui bloquée par les États-Unis alors que l'organe d'appel pour le règlement des différends ne pourra bientôt plus fonctionner. L'affrontement entre les États-Unis et la Chine se joue dans un climat général de guerre commerciale, dont le Président de la République, en déplacement à Shanghai, a estimé qu'il ne faisait que des perdants. Un rééquilibrage des relations commerciales entre la France et la Chine est néanmoins en cours, notamment sur les indications géographiques protégées (IGP) et l'exportation de quelques produits.

Le climat de tension commerciale touche également les relations entre les États-Unis et l'Union européenne. Après l'imposition de taxes américaines sur nos avions, nos vins et nos fromages se pose la question des mesures à prendre par l'Union européenne. Les représentants de la filière viticole étant particulièrement inquiets, nous devons leur apporter des réponses concrètes. Une menace identique pèse sur les exportations européennes de voitures, avec un impact direct assez faible pour la France, mais plus lourd pour l'Allemagne. À titre personnel, je m'étonne qu'au sujet d'Airbus, l'OMC ait déjà rendu son arbitrage, alors que dans quelques semaines ou dans quelques mois Boeing sera frappé de mesures identiques. Il eût été plus judicieux de traiter conjointement ces deux affaires.

D'autres questions portent sur les négociations commerciales en cours. Je pense à l'accord avec le Mercosur, qui a été conclu in extremis par la Commission européenne sortante dans des conditions discutables. Le Président de la République a pris des positions fermes sur ce sujet, et nous souhaiterions savoir comment le Gouvernement, d'une part, et la Commission européenne, d'autre part, envisagent de traiter cette question. Une commission d'experts indépendants, présidée par l'économiste toulousain Stefan Ambec, a été mise en place sur le modèle de celle qui avait été présidée par Katheline Schubert sur l'accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada, dit CETA. Avez-vous eu des premiers retours sur ces travaux et quel en serait selon vous le calendrier ? Les négociations en cours avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande suscitent également des interrogations.

Nous sommes, par ailleurs, soucieux du suivi des accords en vigueur. Je pense notamment au CETA, sur lequel notre commission s'est particulièrement impliquée. Nous avions souhaité un suivi permanent des filières agricoles sensibles ; le comité ad hoc a-t-il été installé ? Comment ce suivi sera-t-il effectué ? Nous voulons aussi que les accords commerciaux servent de levier pour la promotion de nos priorités en matière de développement durable et soient plus contraignants dans ce domaine, en faisant, par exemple, du respect de l'Accord de Paris une de leurs clauses dites « essentielles ». Se pose aussi la question fondamentale de la taxe carbone aux frontières.

Sur toutes ces questions, nous attendons une position ferme et déterminée de la France, une position qui inspire à la Commission européenne une nouvelle politique commerciale. Car si le commerce est une compétence exclusive de la Commission, c'est par délégation des États, lesquels ne doivent pas renoncer à ce qu'ils tiennent pour essentiel. La France doit être à l'initiative d'un cahier des charges nouveau sur la question du commerce mondial, avec pour visée, non seulement de préserver nos normes, mais aussi de créer un équilibre du monde plus proche des valeurs que nous défendons.

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