Intervention de Dominique David

Séance en hémicycle du mardi 12 novembre 2019 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2020 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique David, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Il était vingt-deux heures trente, il y a un peu plus d'une semaine, lorsque l'école du cirque de Chanteloup-les-Vignes a brûlé. Comme beaucoup, j'ai ressenti de la colère devant la violence et la bêtise de cet acte. Et, dans les cendres encore fumantes de ce lieu de culture et d'éducation, j'ai vu le symbole d'un échec : celui des politiques culturelles à recréer du lien dans les quartiers et les territoires ruraux. S'il ne prend pas toujours cette tournure tragique, le constat est là et nous devons le regarder en face.

Le Président de la République l'a rappelé durant la campagne de 2017 : « Aujourd'hui, notre politique culturelle, il faut le dire, c'est une politique d'assignation à résidence [… ]. Le rôle de l'État, c'est de casser ces injustices-là. »

Nous avons la responsabilité de surmonter cet échec dont nous héritons. Depuis le début de mes travaux pour ce budget, une ambition m'anime : veiller à ce que la culture soit un levier d'émancipation. Démocratiser la culture ne consiste pas seulement à répondre aux inquiétudes légitimes que soulève le pouvoir d'achat en rendant l'offre culturelle moins coûteuse et plus accessible. C'est cibler le coeur du problème et redonner à chacun le pouvoir d'agir, quels que soient son milieu et son territoire d'origine.

Ce budget me semble être le premier, depuis des années, à inclure tous les territoires, en particulier les territoires ruraux et les quartiers prioritaires. Il met l'accent sur la politique d'émancipation artistique et culturelle, et tend à accompagner les citoyens durant toutes les époques de leur vie.

Concernant l'éducation artistique et culturelle pour la jeunesse, l'objectif est ambitieux : permettre à 100 % des enfants de 3 à 18 ans, quel que soit le territoire où ils résident, d'en bénéficier d'ici à la fin du quinquennat. Les moyens sont au rendez-vous puisque l'État y consacre 198 millions d'euros en 2020.

L'État accorde également 2 millions d'euros supplémentaires au projet Démos, porté par la Philharmonie de Paris, qui vise à démocratiser la pratique musicale en s'adressant aux enfants issus de quartiers prioritaires de la politique de la ville et de zones rurales. Il était temps que nos grands opérateurs aillent à la rencontre des territoires et que la culture dépasse les limites de la capitale.

Destiné aux jeunes de 18 ans, le pass culture bénéficie cette année de 10 millions d'euros de crédits supplémentaires. La Guyane, la Seine-Saint-Denis et le Bas-Rhin figurent parmi les départements pilotes ; ils se démarquent en effet par leurs différences, qui illustrent la réalité des inégalités d'accès à la culture, mais témoignent aussi des trois priorités de cette nouvelle politique : l'outre-mer, les quartiers prioritaires et le monde rural. Le pass culture est un outil moderne qui permettra enfin aux jeunes d'accéder à l'ensemble de l'offre culturelle, partout en France, et de profiter des attraits d'une vie culturelle dont ils étaient auparavant les premiers exclus, faute de disposer des moyens suffisants ou en raison de leur éloignement. C'est en cela que nous redonnons du pouvoir d'agir.

Afin d'accompagner les citoyens durant toutes les époques de leur vie, le projet de loi de finances prévoit également un budget de 3 millions d'euros, cette année, pour les Micro-folies. Ces musées numériques, qui s'implantent un peu partout en France, représentent une véritable innovation. Alors que l'accès aux musées fut longtemps à l'origine de profondes inégalités entre les territoires, l'État a souhaité rapprocher le musée des citoyens, jusque dans les territoires les plus éloignés ou les quartiers les plus défavorisés. Plus de 80 % des Micro-folies déjà ouvertes se situent dans une commune intégrant un quartier classé politique de la ville.

Le dispositif poursuit son déploiement en mettant l'accent sur les territoires du programme action coeur de ville et les territoires ruraux. L'objectif est à nouveau à la hauteur de l'enjeu puisqu'il est prévu de passer de 200 à 1 000 implantations en seulement trois ans.

Enfin, 4 millions d'euros supplémentaires permettront de financer le second volet offrir plus du plan bibliothèques.

Le dialogue avec les collectivités est indispensable pour réussir ces initiatives et renforcer l'action du ministère dans les territoires. Il se renforce au sein du conseil des territoires pour la culture, que le ministère anime avec les associations d'élus.

Dans le même ordre d'idée, je salue par ailleurs l'action menée par le ministère pour rapprocher au plus près les citoyens de la décision, dès janvier 2020, en déconcentrant dans les directions régionales des affaires culturelles, la gestion d'une soixantaine de dispositifs qui dépendaient jusqu'alors de l'administration centrale. Cette mesure de bon sens assouplira l'action locale et orientera plus efficacement ses moyens en direction des zones les plus éloignées de la politique culturelle.

Démocratisation, déconcentration, partenariat : toutes ces mesures vont dans le bon sens. C'est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter les crédits de la mission culture pour 2020.

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