Intervention de Jean-Paul Lecoq

Réunion du mercredi 6 novembre 2019 à 9h40
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Lecoq :

Je n'ai pas le même point de vue que vous sur ces questions. En juin 2019, M. François Cornut-Gentille a publié un rapport dans lequel il explique que l'aviation tactique française est dans une situation catastrophique. On a fait le choix de sous-traiter à des entreprises privées, qui veulent aujourd'hui garder leurs parts de marché, ce qui crée d'importants conflits. Ce diagnostic est assez éloigné des discours que j'entends ce matin sur l'excellence française. Tout n'est pas parfait, loin de là, et il y a urgence à rattraper le coup.

L'accord entre l'Allemagne et la France pourrait justement nous donner l'occasion de rattraper le coup. Et le communiste que je suis pourrait être tenté de soutenir cet accord pour la seule raison qu'il vise à remettre du service public – même syndiqué allemand.

Mais la question sous-jacente, c'est celle de l'OTAN, et je ne peux pas concevoir que l'on réfléchisse à un tel accord sans poser la question de l'OTAN. On n'a qu'à sortir de l'OTAN et assumer ! On organise une transition politique et écologique, en disant qu'on envisage un nouveau paradigme à l'échelle européenne, on suspend notre participation aux interventions en cours et on commence à réfléchir à la manière de contrôler nous-mêmes l'espace aérien, sans dépendre de l'OTAN. C'est bien beau d'avoir des avions, mais si on dépend des États-Unis pour les faire voler, l'armée française n'a plus aucune autonomie !

Notre groupe a voté contre la ratification du traité d'Aix-la-Chapelle. Vous avez dit, madame la rapporteure pour avis, que personne n'avait voté contre ce projet de loi lors de son examen en commission de la défense hier : si l'un des membres de notre groupe avait été présent, il aurait voté contre ou se serait abstenu. Le fait que ce projet se développe sur la base d'Évreux me plaît plutôt, car c'est une base qui assume bien sa vocation militaire, qui a de vraies valeurs et une vraie technicité. Et c'est une bonne chose pour la Normandie. Il n'en reste pas moins qu'il faut tenir compte de l'histoire de l'armée allemande. Pendant des décennies, on a interdit à l'Allemagne de se défendre, et si aujourd'hui les Allemands ne sont pas sur la même ligne que nous, c'est d'abord parce qu'on ne les y a pas autorisés. C'est aussi parce que le peuple allemand en a décidé ainsi.

La rapporteure pour avis se réjouit que le Parlement prenne des décisions mais, en réalité, nous n'avons rien décidé ! Un accord a été signé sans qu'on nous demande notre avis et on nous invite maintenant à le ratifier sans pouvoir l'amender. Cela pose la question du rôle des députés dans l'élaboration des politiques publiques et des accords internationaux. Il faudrait que ce soient les parlementaires qui travaillent en amont et qui donnent mandat au Président de la République et au ministre compétent de signer des accords, sur la base de leurs consignes : voilà comment devrait fonctionner une vraie démocratie. Or les choses ne se sont pas passées de cette manière. En Allemagne, c'est le Parlement qui décide, et c'est pour cette raison qu'il y a un tel déséquilibre entre la démocratie française et la démocratie allemande. Nous ne sommes pas à armes égales, pour reprendre la métaphore militaire.

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