Intervention de Jean-Michel Blanquer

Réunion du mercredi 25 octobre 2017 à 16h20
Commission élargie : finances - affaires culturelles

Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale :

Monsieur Attal, vous évoquez une montée en puissance imprévue du service civique. Nous avons déjà fait un choix déterminé et ambitieux en portant l'effectif à 150 000, d'autant que nous nous sommes par ailleurs engagés à une véritable sincérité budgétaire. Nous devrons tenir précisément l'objectif que nous nous sommes fixés : a priori, ce ne sera ni plus ni moins. Cette performance sera d'autant plus réussie si nous atteignons les objectifs qualitatifs que vous avez mentionnés.

La mixité sociale est une réalité aujourd'hui : 25 % des jeunes qui s'engagent ne sont pas diplômés ou le sont peu, et un processus de qualification permet d'élever le niveau de qualification à la sortie du dispositif. Nous cherchons aussi à diversifier la nature des employeurs : l'éducation nationale et l'éducation populaire, qui ont plusieurs visages, seront fortement mises à contribution.

Le service national fera l'objet dans les prochains mois d'un travail de concertation, auquel seront associés plusieurs ministères dont ceux de la défense et de l'éducation nationale. Nous tiendrons l'engagement présidentiel en restant totalement cohérents avec les éléments évoqués aujourd'hui. La dimension d'engagement du service national n'est pas contradictoire mais complémentaire de celle du service civique. Il nous reviendra à tous de bien définir le service national.

Madame El Haïry, la situation que vous avez décrite – deux lignes budgétaires, deux ministres et un seul rapport – comporte aussi un certain nombre d'avantages. Elle nous incite en particulier à une action interministérielle forte, et à faire travailler ensemble des secteurs qui, parfois, ne collaboraient pas comme ils auraient dû le faire. Mme Laura Flessel, ministre des sports, et moi-même entretenons des liens étroits afin de faire avancer les dossiers du sport et de l'école, du sport et de l'éducation populaire. Cette division ministérielle ne pose pas de problème, bien au contraire : elle crée une synergie qui existe aussi avec d'autres départements ministériels comme le ministère de la culture. Je considère que le sport et la culture entretiennent un rapport très étroit avec l'éducation nationale. Leur union peut faire progresser les dossiers.

C'est le cas des activités périscolaires. Grâce à ce budget, nous pouvons nous intéresser à leur qualité qui passe par l'implication cohérente du monde associatif. La qualité des propositions faites aux enfants et aux jeunes peut évidemment être améliorée. Quelle que soit la réponse que nous apportons, par exemple, aux problèmes posés par les vacances de la Toussaint – les parents travaillent durant cette période –, nous devrons donner des réponses beaucoup plus fermes qu'aujourd'hui aux familles pour occuper les enfants de façon qualitative si les deux semaines de congé sont maintenues. Vous le constatez, l'interministériel permet de traiter des problèmes très concrets.

Une grande enquête statistique doit être menée sur le service civique afin que nous ciblions mieux ce dispositif. Un conseil scientifique permettra aussi, avec l'Agence du service civique, de « corriger le tir ». Nous devrions avancer. Il me semble par ailleurs important, sur ce sujet comme sur d'autres, de souligner les éléments de continuité d'une politique engagée il y a plusieurs années, et menée quels que soient les gouvernements et les majorités. Les inflexions existent, vous l'avez entendu, elles sont claires, mais elles s'inscrivent aussi dans la durée et approfondissent des objectifs énoncés dès la création du dispositif, comme la mixité sociale, la diversité des employeurs, ou l'enjeu de formation.

Madame Louwagie, vous souhaitez que les personnes qui bénéficient d'un contrat aidé dont le renouvellement était prévu puissent en signer un nouveau. Ce sujet excède ma compétence mais, à mon sens, il mérite d'être approfondi : j'en parlerai à mes collègues du Gouvernement pour voir s'il peut être donné suite à votre demande.

J'en profite pour signaler que des contrats aidés restent disponibles et peuvent encore être signés. L'éducation nationale a maintenu les 50 000 contrats aidés de l'année dernière, auxquels s'ajoutent les 8 000 personnels chargés de l'accompagnement des élèves en situation de handicap (AESH). Les difficultés qui subsistent, en cette période de l'année, pour l'accueil des élèves en situation de handicap ne sont pas liées à un manque de contrats, mais à des problèmes de recrutement : nous cherchons des candidats pour occuper ces postes.

Vous évoquez à juste titre le problème du renouvellement – il est clair qu'il est préférable qu'un élève en situation de handicap soit accompagné par la même personne pendant une certaine durée –, mais la véritable solution consiste à assurer la migration d'un contrat aidé vers un contrat plus robuste. C'est bien ce que nous faisons, par exemple en emmenant 8 000 personnes d'un contrat aidé vers un contrat d'AESH à durée déterminée, un peu plus solide que le précédent. Nous espérons que cela permettra d'assurer progressivement une véritable insertion professionnelle, et une plus grande qualité du service rendu puisqu'une pérennité dans les postes sera garantie et que des formations seront dispensées.

L'objectif de continuité que vous défendez est donc aussi le mien. Pour l'atteindre, on peut, peut-être, imaginer des formules encore plus performantes que celle que vous proposez, que je ne rejette pas.

Monsieur Favennec Becot, je recevais hier le Haut Conseil de la vie associative qui mène une réflexion de haute volée sur la notion même d'association dans notre pays. Nous devons faire preuve d'une grande fidélité aux idées qui ont inspiré le vote de la loi du 1er juillet 1901, en les adaptant au XXIe siècle. Ce texte fondateur de la liberté d'association s'appuie en particulier sur l'idée bien ancrée qu'il est possible de contribuer au service public par des voies diverses, et qu'il existe des bénévoles du service public. Nous devons aller toujours plus loin dans cette voie car le bénévolat fait encore plus sens aujourd'hui. Il nous faut seulement mieux définir ce sens – c'est l'objet du dialogue entrepris avec le monde associatif. C'est ainsi que nous pourrons tenir un discours sur le bénévolat au XXIe siècle, sur l'engagement, le sens civique, le dialogue intergénérationnel, la gratuité…

Il nous faut regrouper ces enjeux pour qu'ils fassent sens aux yeux de la société française, et nous devons soutenir ce mouvement par des actes concrets. Le volontarisme de ce budget en est un, de même que le développement du service civique. Madame Buffet, je précise que ce projet de loi de finances n'emporte aucune diminution des subventions aux associations – elles augmentent même légèrement –, mais sans doute parliez-vous de la réserve parlementaire.

Au-delà de l'effort budgétaire et des mesures en faveur du service civique, notre conception de la vie associative de demain s'appuie à la fois sur un modèle économique et sur un modèle de bénévolat. Ces deux aspects ne s'opposent pas et se confortent même – le délégué interministériel à l'économie sociale et solidaire mène actuellement des réflexions à ce sujet. Afin de sortir d'un modèle fondé sur des contrats précaires, nous traversons une période de transition qui comporte sa part de difficultés. Cette période doit toutefois nous permettre de construire un véritable modèle économique fondé sur des contrats plus solides, qui permettra aussi l'épanouissement du bénévolat.

Monsieur Favennec Becot, le champ couvert par votre proposition de loi excède celui de mes compétences, mais il est intéressant d'avoir un premier échange à ce sujet. Nous devons valoriser l'engagement, mais sans que cette démarche n'entre en contradiction avec la notion de bénévolat. À partir d'un certain seuil d'avantages matériels, le bénévolat n'est plus du bénévolat. Cela dit, la réflexion doit rester ouverte sur ces questions.

Vos préoccupations rejoignent celles de M. Régis Juanico qui souhaite valoriser l'engagement des jeunes. Nous avons tout intérêt à ce que, dans un parcours de vie, l'engagement soit reconnu et qu'il permette de se former. Faut-il que cet engagement ait des conséquences sur la retraite ? Je ne suis pas certain que nous devions aller jusque-là, mais j'entends votre proposition.

Monsieur Juanico, j'ai entendu vos réserves sur la proposition du rapporteur général. Le débat s'amorce, et tous les députés, dans un même état d'esprit, considèrent qu'il faut, dans cette phase nouvelle, que les associations puissent être aidées au plus près du territoire. Je ne resterai pas inactif sur ce sujet.

J'adhère totalement à tout ce que vous avez dit sur le parcours citoyen. L'évolution du diplôme national du brevet, telle que nous l'envisageons, tient compte de cette notion, et, sans que je ne me prononce pour elle, je crois que ma collègue chargée de l'enseignement supérieur a des idées similaires à ce sujet. Il faut valoriser l'engagement citoyen tout au long du parcours scolaire. L'école transmet des savoirs et des valeurs dont l'engagement fait partie. Il doit être reconnu : il s'agit d'un point central pour que nous puissions développer un modèle positif pour notre jeunesse.

Madame Buffet, je comprends votre souhait de donner aux associations une visibilité pluriannuelle de leurs financements. Les réflexions auxquelles j'ai fait référence pourraient aller dans ce sens. Elles devraient permettre une plus grande clarté, car, aujourd'hui, les associations doivent s'adresser à de multiples guichets, ce qui est à la fois complexe, opaque et chronophage. L'engagement pluriannuel n'est jamais simple à mettre oeuvre en raison des règles d'annualité budgétaire, mais nous y sommes parvenus, au sein de l'éducation nationale, avec les grands acteurs associatifs. Nous pouvons souhaiter qu'un objectif de même nature soit atteint pour l'ensemble des petites associations.

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