Intervention de Jean-Hugues Ratenon

Séance en hémicycle du lundi 25 novembre 2019 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Hugues Ratenon :

Le premier rôle de l'État, à travers sa politique générale, est de tout mettre en oeuvre pour assurer le bien-être de sa population. Vous devez être consciente, madame la ministre, que vous en êtes très loin.

J'évoque ici des enfants, des personnes âgées ou handicapées, des salariés, des privés d'emploi : je parle bien d'humains, de gens qui nous regardent et attendent des solutions pour repousser la souffrance, la pauvreté, l'humiliation et l'atteinte à leur dignité. La pauvreté qui gagne du terrain, la souffrance au travail et le manque de considération constituent autant de facteurs déclenchant le mal-être et la maladie. Les Françaises et les Français ne sont pas des machines, mais des êtres de chair et de sang.

Non seulement le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 ne répond aucunement aux attentes, mais il représente en outre une marque supplémentaire du mépris du Gouvernement à l'égard du Parlement. Ainsi avons-nous appris, alors que les débats étaient en cours au Sénat, que le Gouvernement ferait des annonces budgétaires sur l'hôpital. Nos collègues sénateurs ne s'y sont pas trompés : votre Gouvernement a décidé de présenter un budget devenu foncièrement insincère, en décidant de le modifier en cours d'examen et de proposer, le 20 novembre, quelques mesures qui changent la donne.

Ce n'est plus l'État de droit. Vous n'écoutez pas la colère qui gronde. Vous ne voulez rien entendre. Alors que voilà désormais huit mois que les services d'urgence sont en grève – ce qui est historique – , c'est pendant l'examen du budget de la sécurité sociale que vous vous décidez à sortir des mesurettes de votre chapeau. Pourquoi ? Vous auriez pu les intégrer au texte déposé en première lecture. Au lieu de quoi, vous nous imposez l'examen de ces annonces par voie d'amendement, c'est-à-dire sans réelle évaluation préalable et sans nous laisser le temps de les analyser.

Votre démarche est claire : vous bafouez le débat, vous marchez sur le Parlement et, par là même, vous affaiblissez l'État de droit. Pourquoi ? Je vous rappelle, madame la ministre, que c'est au Parlement de décider de la levée de l'impôt, de statuer sur l'encadrement des cotisations et de voter le budget, après un débat éclairé. Tel n'est pas le cas aujourd'hui. C'est grave.

Maintenant que nous savons que vous auriez préféré vous adresser à un club de technocrates plutôt qu'aux représentants du peuple, je me concentrerai sur vos annonces et sur une partie de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Si votre politique était efficace, nous en verrions déjà les effets. Cela n'est malheureusement pas le cas ; au contraire, la situation empire. Depuis votre arrivée au pouvoir, vous avez imposé plus de 12 milliards d'euros d'économies sur la santé des Françaises et des Français, à tel point que même des doyens de la faculté de médecine appellent aujourd'hui à la grève : c'est du jamais-vu !

Vous avez annoncé la semaine dernière le versement de primes, mais principalement aux personnels d'Île-de-France. Pourquoi cette discrimination ? Une telle mesure est loin – très loin, même – de répondre aux revendications des professionnels, qui réclament une augmentation générale des salaires d'environ 300 euros. Vous ne proposez rien en matière de recrutement, alors qu'une des premières demandes des soignants consiste à pouvoir faire correctement leur travail, sans maltraiter les patients.

Quant à l'augmentation du budget annoncée, je rappelle que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie imposait, pour 2018 et 2019, des économies atteignant respectivement 4,2 milliards et 3,8 milliards d'euros. Pour l'exercice 2020, ce sont à nouveau 4,2 milliards d'euros d'économies qui sont programmés. Que valent vos annonces au regard de ces 12 milliards d'euros d'économies, dont 8 milliards ont déjà été ponctionnés ? Rien – ou si peu !

Vous organisez ainsi, méthodiquement, le démantèlement complet de l'hôpital public. Madame la ministre, vous avez été médecin. Répondez-moi très sincèrement : lorsque vous vous réveillez chaque matin, avez-vous une pensée pour vos anciens collègues qui sont en grève depuis des mois, qui se rendent malades à force de travailler dans de mauvaises conditions, qui sont en burn out et qui malheureusement, pour certains, se suicident ? Accordez-vous une pensée aux malades qui meurent sur des brancards en attendant une prise en charge aux urgences ?

Vous ne pensez pas à eux. Par conséquent, face à votre volonté de faire glisser notre système vers un système à l'américaine qui profitera au secteur privé, nous continuerons à proposer une grande bifurcation.

En attendant, nous ferons tout ce que la démocratie nous permet pour faire reculer votre gouvernement. Le 5 décembre, tous dans la rue, jusqu'à ce que la France se porte bien !

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