Intervention de Isabelle Florennes

Séance en hémicycle du jeudi 28 novembre 2019 à 9h00
Cout du foncier et offre de logements — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaIsabelle Florennes :

Le texte défendu par notre collègue Jean-Luc Lagleize, fruit de son rapport sur le foncier, s'inscrit dans la continuité des trois premières propositions de loi que le groupe Mouvement démocrate et apparentés présente aujourd'hui. Complémentaires, ces textes tentent en effet de répondre, chacun à sa manière, aux préoccupations que les Français ont fait entendre ces derniers mois, notamment en matière de pouvoir d'achat.

Le logement est devenu, ces dernières décennies, l'un des premiers postes de dépense des ménages – et même le premier en zone dite tendue. Dans le même temps, il constitue un élément absolument déterminant de l'accès à l'emploi, de l'évolution d'une carrière professionnelle ou du choix des modes de déplacements, et donc de l'empreinte écologique. En résumé, le logement irrigue tous les aspects de la vie quotidienne des Français, et l'envolée de ses prix a une incidence directe sur le porte-monnaie de nos concitoyens. Cette envolée, nous en connaissons au moins l'un des principaux facteurs : le jeu spéculatif sur le foncier, désormais bien installé. Tous les professionnels du secteur le font savoir : ce qui coûte cher, c'est le foncier. Le constat vaut d'autant plus pour les zones tendues, où il manque cruellement.

Notre collègue Jean-Luc Lagleize s'est donc courageusement attaqué aux racines du problème et a – avec beaucoup de sagesse, il faut le dire – dialogué avec tous les acteurs de la filière afin d'établir son rapport et d'élaborer cette proposition de loi. Mais la grande sensibilité du sujet appelait également une consultation de l'ensemble des groupes politiques de cette assemblée. Là encore, je crois que nous pouvons saluer l'attitude de notre collègue, qui a tout mis en oeuvre pour que chacun puisse s'exprimer au sujet de ce texte et proposer des amendements afin d'en étendre la portée. Le fruit de ces échanges est une boîte à outils complète mise à la disposition des élus et des citoyens.

Il s'agit d'encourager les pratiques vertueuses susceptibles – nous l'espérons – de mettre fin à l'augmentation des prix et de permettre aux maires de mieux aménager leur territoire et de mieux répondre à la demande de logement. Les mesures proposées s'articulent autour de ces deux grands objectifs.

La première, l'une des plus importantes, est révélatrice du mouvement que ce texte a pour but d'impulser ; elle consiste à interdire à l'État et aux collectivités de vendre de leur foncier aux enchères, et à réaffirmer qu'ils doivent se montrer exemplaires en la matière.

L'État et les collectivités font en effet partie des acteurs du jeu spéculatif et ont leur part de responsabilité dans la hausse des prix du foncier. Pour ne pas contribuer à cette évolution néfaste, ils doivent consentir un effort et adopter des pratiques plus vertueuses dans la gestion de leur domaine.

Une autre mesure phare, dont nous espérons que l'esprit sera préservé, est la création d'organismes fonciers libres. Sans détailler plus avant le dispositif que vous avez déjà présenté, monsieur le rapporteur, je me contenterai de rappeler que les futurs OFL, directement inspirés des OFS créés par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové – ALUR – , sont pensés comme des outils permettant aux collectivités de décorréler le prix du foncier de celui de la construction pour encourager l'accession sociale à la propriété.

Il s'agit là d'une mesure dont nous sommes convaincus qu'elle va dans le bon sens et c'est pourquoi nous souhaitons vivement que l'ordonnance destinée à définir les baux adaptés aux produits proposés par les futurs OFL soit conçue en concertation avec les parlementaires, tout en étant publiée suffisamment rapidement pour que sa mise en application effective advienne dans la foulée de la promulgation du texte.

Nouveaux outils dont nous attendons aussi beaucoup, les futurs observatoires du foncier sont instaurés par l'article 3 du texte. Ils constitueront un appui solide pour les édiles, dont ils faciliteront la mission d'aménagement en leur fournissant un tableau de bord complet des informations relatives au foncier et au logement dans leur territoire. Ils devraient se montrer parfaitement adaptés pour résoudre les difficultés que les maires rencontrent dans les zones tendues pour collecter l'information.

Toujours concernant les maires, nous avons souhaité leur donner la possibilité de recourir à une expertise privée agréée pour certaines opérations. Je m'arrête quelques instants sur ce sujet qui a suscité de nombreuses discussions. La Direction de l'immobilier de l'État – DIE – a consenti d'importants efforts que nous saluons. Elle a ainsi entamé une remise à plat de son mode de fonctionnement – je pense notamment à la méthode d'élaboration des prix et à leur justification. C'est une bonne chose : de telles mesures sont de nature à offrir aux édiles une plus grande visibilité dans la réalisation de leurs projets, et donnent un exemple significatif de la transparence vers laquelle tous les acteurs doivent tendre en matière de logement.

Il n'est toutefois pas interdit de s'interroger sur le recours hiérarchique dont nous allons examiner le principe au cours de la discussion. Cette nouvelle voie de recours ne va-t-elle pas complexifier, là où nous voulions simplifier ? Par ailleurs, comment imaginer que le recours auprès d'une autre instance interne à la DIE aboutisse à une décision désavouant celle déjà rendue par la DIE elle-même ? Ce sont là de vraies interrogations qui, je l'espère, trouveront une réponse lors de nos discussions.

La transparence, que j'évoquais à l'instant, inspire également la dernière mesure proposée par ce texte : l'obligation de dresser un compte rendu annuel de la construction de logements. Présenté en conseil municipal, ce point d'étape servira à la fois aux citoyens, à qui il offrira une vue d'ensemble des projets passés, en cours et à venir sur la commune, et aux élus, qui pourront ainsi évaluer leurs propres avancées par rapport aux objectifs qu'ils se sont fixés.

Nouveaux outils, pratiques vertueuses, transparence : autant de mots d'ordre qui ont guidé la construction de ce texte, dont nous espérons qu'il créera une émulation nouvelle au sein du secteur du foncier. Je dis « émulation » car il s'agit bien de produire un effet d'entraînement parmi les acteurs, de les responsabiliser et de poser la question des conséquences de leur attitude sur les prix du foncier et donc du logement.

Mais il s'agit aussi de donner, notamment aux élus, les moyens de s'adapter à cette évolution et d'en atténuer les effets néfastes. Cette double volonté d'encouragement et d'accompagnement doit permettre d'aboutir à un équilibre et de ne pas laisser le jeu spéculatif l'emporter dans la détermination des prix du logement. Il est impératif que nous puissions oeuvrer tous ensemble en ce sens.

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