Intervention de Nicolas Turquois

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 15h10
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Turquois :

Personne n'ignore les propriétés et les atouts de notre patrimoine forestier, dont les enjeux transcendent nos frontières. Moins connu mais tout aussi essentiel, le patrimoine forestier francilien se distingue par un usage multifonctionnel, allant du loisir à l'exploitation économique, tout en étant un espace de préservation et de promotion de la biodiversité. Il constitue un bien à protéger, mais aussi à valoriser, d'autant plus qu'à l'heure où nous parlons, certaines régions du monde sont dévastées par la déforestation, tandis que les forêts produisent près de la moitié de l'oxygène que nous respirons. Véritable écosystème dans lequel une pluralité d'acteurs et de filières interagissent au quotidien, il est encadré par le droit forestier, qui a vocation à pérenniser nos ressources sylvestres. Parmi ces acteurs, je citerai bien sûr l'Office national des forêts (ONF), pour lequel notre commission auditionnera prochainement M. Bertrand Munch, dont la nomination est proposée par le Président de la République. J'aurai plaisir à m'exprimer à cette occasion en tant que rapporteur. Parler de notre patrimoine forestier, c'est également souligner le rôle essentiel de la Fédération nationale des communes forestières, du Centre national de la propriété forestière, de l'Institut pour le développement forestier, de l'Union de la coopération forestière française ou encore de la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires.

Nous le voyons, nos espaces forestiers représentent un potentiel environnemental et économique considérable. Il importe donc que nous prenions ensemble les mesures nécessaires pour les préserver. C'est tout le sens de la proposition de loi du groupe MODEM que nous examinons aujourd'hui, qui vise à lutter contre le phénomène de fragmentation des parcelles forestières en Île-de-France. Le mitage forestier résulte de la multiplication des ventes de parcelles de taille réduite, qui trouve elle-même son origine dans la forte pression foncière que subit la région avec, in fine, un détournement de l'utilisation naturelle des sols. La forêt francilienne, caractérisée par un morcellement trois fois plus élevé qu'à l'échelle nationale, doit recevoir une attention spécifique. Elle a déjà fait l'objet de plusieurs mesures spécifiques ; je pense notamment à la stratégie régionale adoptée fin 2017 pour valoriser le potentiel de la filière de la forêt et du bois en Île-de-France avec, notamment, le lancement, il y a deux ans, du plan vert d'Île-de-France, qui ambitionne de créer 500 hectares de nouveaux espaces verts et boisés d'ici à 2021.

La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui représente donc une avancée majeure pour la région la plus peuplée de France, qui peut compter sur 261 000 hectares de forêts et un taux de boisement de 21 % de sa superficie. C'est pourquoi la solution consistant à pérenniser, dès le 1er mars 2020, l'expérimentation permettant à la SAFER d'Île-de-France de préempter les parcelles de moins de trois hectares est un choix que le groupe MODEM et apparentés soutient sans aucune réserve. Au vu des résultats concluants des deux premières années d'expérimentation, il apparaît essentiel que la SAFER puisse, dans les conditions limitatives existantes, acquérir des parcelles boisées de taille réduite par préférence à tout autre acquéreur possible. Le principal apport de ce mécanisme a trait à sa dimension préventive car, une fois la parcelle vendue, illégalement défrichée et artificialisée, il est extrêmement difficile pour les communes d'intervenir. L'importance de la pérennisation du dispositif est d'autant plus forte que les objectifs poursuivis sont la protection, la mise en valeur de la forêt francilienne et la lutte contre la très forte artificialisation des sols dans cette région.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, il me semble que la proposition de loi fait écho au texte que nous venons d'examiner sur le foncier en zone urbaine non tendue. En effet, le foncier, qu'il soit constitué de champs, de forêts ou de zones urbanisées, devient un enjeu public que nous devons protéger de l'accaparement au profit d'une gestion au service de l'intérêt général. Je crois que ces deux textes préfigurent l'attention particulière que nous devons porter au foncier, et je me réjouis qu'on débatte de ce sujet. Monsieur le ministre, vous avez affirmé qu'il n'était pas envisagé, pour l'instant, d'étendre le dispositif, mais, au-delà du mitage forestier, d'autres enjeux se posent, qui ont été évoqués par M. Frédéric Descrozaille, comme celui du morcellement. Il faudra réfléchir à la gestion du foncier en milieu forestier.

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