Intervention de Mathilde Panot

Réunion du mercredi 20 novembre 2019 à 15h10
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMathilde Panot :

Monsieur le ministre, je ne parlais pas de l'agriculture d'aujourd'hui : heureusement que nous sommes en train de changer ce modèle mortifère ! Je parlais de la manière dont l'agriculture a évolué au cours des dernières décennies. J'ai l'habitude de dire de façon un peu provocatrice, mais je le pense sincèrement, que personne n'a jamais décidé, au sein du peuple français, que Monsanto avait le droit de nous empoisonner. Personne n'a décidé d'aller vers un modèle d'agriculture sans agriculteurs. Pour la forêt, c'est la même chose : nous devons choisir démocratiquement ce que nous voulons pour les forêts françaises. Un débat doit avoir lieu sur ce sujet.

Aujourd'hui, les forêts françaises sont obligées de s'adapter aux besoins des gros industriels, alors que le changement climatique devrait nous amener à privilégier l'intérêt écologique par rapport à l'intérêt économique. Cette méthode, du reste, est tout aussi rentable : à de nombreux endroits, la futaie irrégulière est plus rentable économiquement que les coupes rases à répétition.

Je tiens à préciser que je n'ai pas le syndrome d'« Idéfix », car c'est souvent de cette manière qu'on caricature les écologistes, y compris ceux qui travaillent avec nous. Nous n'avons rien contre le fait de couper du bois, si c'est pour que des arbres poussent mieux. Nous n'avons rien non plus contre la valorisation économique de la forêt. Ce qui nous pose un problème, c'est la surexploitation et les coupes rases. Lorsqu'on fait une ou deux coupes rases, le sol est encore nourri, à ceci près que les aiguilles des pins de Douglas mettent cinq à dix ans pour se décomposer dans le sol. Concrètement, le sol finit par ne plus être nourri, il faut utiliser des pesticides, les sols s'érodent et on perd en biodiversité. C'est une catastrophe.

Nous devons laisser vieillir les forêts françaises et avoir une vision sur le long terme. Or les industriels sont en train de nous enfermer dans une vision à court terme.

Si nous voulons vraiment être à la hauteur, pourquoi sommes-nous en train de filialiser l'ONF ? Tous les syndicalistes sont vent debout contre cette décision et on en est au trente-quatrième suicide à l'ONF depuis 2005 ! Des fonctions entières de la forêt ont été abandonnées : je pense en particulier à la fonction sociale des agents de l'ONF. Autrefois, ils accueillaient, lors de classes vertes, les enfants des centres sociaux et ils leur faisaient découvrir la forêt. On nous prive peu à peu de cette culture de la forêt : c'est très grave et l'action du Gouvernement ne fera qu'aggraver les choses.

Par ailleurs, j'étais ce week-end dans le Morvan, et je peux vous dire que les 550 personnes qui s'opposent aux coupes rases n'ont pas plus que moi le syndrome d'Idéfix : ils ne supportent simplement plus de voir leurs forêts coupées à ras, puis replantées pour être de nouveau coupées à ras. Ce n'est pas un modèle durable. Le parc naturel régional du Morvan a essayé de réglementer ces coupes rases et on le menace à présent de lui retirer ses subventions. Ce n'est pas acceptable ! Il faut réglementer les choses. Certains Länder allemands l'ont fait, la Suisse aussi : nous pouvons faire la même chose, afin de protéger les forêts françaises.

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