Intervention de Pierre Dharréville

Séance en hémicycle du mardi 31 octobre 2017 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre Dharréville :

Déjà appliquée aux compensations que vous aviez promises, elle concernera aussi le tiers payant généralisé – devenu généralisable, ce qui change tout.

Le troisième signe distinctif de votre politique, c'est deux poids, deux mesures : certaines mesures peuvent être décalées tandis que d'autres sont pressantes à vos yeux. J'en veux pour preuve un exemple édifiant, qui symbolise si bien l'esprit de votre projet : par une nouvelle fulgurance, vous avez décidé de dégrever de 10 points la fiscalité des actions gratuites, une décote supplémentaire, en plus du seuil fixé pour le prélèvement forfaitaire unique, déjà si critiquable – lequel va coûter, je le rappelle, au moins 1,5 milliard d'euros, alors que, selon vos promesses de campagne, cette nouvelle taxe aurait dû rapporter l'équivalent du manque à gagner correspondant à la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune. C'est un trouble obsessionnel compulsif, c'est plus fort que vous : vous ne pouvez pas vous empêcher de faire des ristournes aux plus fortunés et au tout petit monde de la finance ; le PLFSS n'y aura pas échappé. Il n'y a décidément pas de suspense.

Au final, l'addition est lourde : vous sanctuarisez le très inefficace CICE tout en l'augmentant de 20 % ; vous y ajoutez le dégrèvement sur les actions gratuites que je viens d'évoquer ; vous maintenez les 45 milliards d'euros d'exonérations diverses et variées de cotisations sociales patronales ; vous renoncez à aller chercher les quelque 20 milliards de fraudes qui se rapportent à ces cotisations. Les recettes sont à portée de main, mais vous préférez compresser les dépenses de santé. De ce point de vue, quoi de neuf, docteur ? Rien !

Vous avez essayé de nous vendre l'article 35, relatif au financement des expérimentations, comme le coeur battant de votre projet, mais vous savez que l'essentiel réside dans l'article 54, qui fixe l'objectif national des dépenses d'assurance maladie pour 2018 : vous imposez là 4,2 milliards d'euros de restrictions, dont 1,2 milliard à l'hôpital, exsangue et qui multiplie les appels à l'aide. Et vous n'avez jamais rien répondu face à cette situation. Votre seul argument pour continuer a été de pointer du doigt 30 % de prescriptions non pertinentes, ce qui constitue une sérieuse mise en cause des praticiens et un nouvel appel à réduire la voilure. Les besoins de santé sont si criants et votre politique d'austérité si forte que, à la suite de ces choix, il y aura sans doute des drames.

La rupture, si l'on peut dire, se trouve à l'article 7, qui s'attaque, sans que vous n'en assumiez jamais le parti pris philosophique, aux fondements de la Sécurité sociale, avec la fin des cotisations assurant des droits solidaires. En définitive, votre texte est une nouvelle loi d'affaiblissement de la Sécurité sociale, et ce choix est injustifiable à nos yeux.

J'ai entre les mains un livre qui retrace la grande épopée d'une idée qu'Ambroise Croizat fit entrer dans la vie avec ténacité et qui demeure d'une criante modernité. Je ne vous fais pas l'injure de penser que vous ne le connaissez pas, madame la ministre, mais je vous le ferai parvenir, car je voudrais que cette part d'histoire entre aux archives du ministère pour les humains du jour d'après, un jour qui viendra très vite.

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