Intervention de Philippe Dunoyer

Réunion du mardi 10 septembre 2019 à 16h30
Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Dunoyer :

Monsieur le ministre, je tiens à saluer l'engagement du Gouvernement, du Premier ministre et des ministères concernés depuis la semaine dernière. C'était un fait, dorénavant acté par le lancement du Grenelle des violences conjugales.

Je voudrais apporter un témoignage ultramarin en vous faisant part de notre perception et de notre sensibilité, que ma collègue Justine Bénin a récemment exprimées au cours de la séance des questions au Gouvernement. Personne n'ignore ici les chiffres dramatiques qui sont ceux des territoires d'outre-mer. En Nouvelle-Calédonie, nous déplorons deux féminicides sur les 102 comptabilisés à ce jour, ce qui, rapporté à notre population, revient à un ratio quatre fois supérieur à la moyenne nationale.

Selon une enquête déjà ancienne portant sur une population de seize à vingtcinq ans, un quart des femmes interrogées indiquaient avoir été victimes d'une violence à leur encontre. C'est une situation que vous connaissez. À cet égard, je voudrais vous interroger sur notre capacité à dupliquer les mesures et les nouvelles annonces que vous avez rappelées – et d'autres éventuellement – en Nouvelle-Calédonie, et en outre-mer plus largement.

Les situations varient en outre-mer, selon qu'il s'agit des départements d'outre-mer ou des collectivités, lesquelles sont organisées autrement et dont les compétences sont réparties différemment. C'est la raison pour laquelle, sauf erreur de ma part, le dispositif téléphone grave danger (TGD) n'est pas étendu en Nouvelle-Calédonie à ce jour, même s'il s'agit d'une compétence régalienne. Les femmes n'ont pas la possibilité non plus, à ma connaissance, d'appeler le numéro 3919, probablement pour des raisons pratiques, pas toujours compréhensibles.

Les effectifs de police et de gendarmerie sont suffisants dans la mesure où ils ont été augmentés ces dernières années. Cela dit, police et gendarmerie sont confrontées aux mêmes difficultés de prise en charge des dépôts de plainte. Autrement dit, il existe un décalage avec la métropole.

Mme la secrétaire d'Etat a annoncé l'organisation d'un Grenelle des violences conjugales ultramarin, ce qui est une bonne chose.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que 400 commissariats et gendarmeries seraient inspectés et audités d'ici à la fin de l'année. Pouvez-vous confirmer que, parmi ces 400 structures, figureront des commissariats et gendarmeries ultramarins dans chacun des territoires ?

La généralisation du dépôts deplainte à l'hôpital est une mesure à laquelle je crois beaucoup et qui me fait penser à l'expérimentation de la cellule d'accueil d'urgence des victimes d'agressions (CAUVA) au centre hospitalier universitaire de Bordeaux qui, bien sûr, a une vocation plus large, mais qui permet déjà ce type d'initiative.

En Nouvelle-Calédonie, nous nous sommes inspirés de ce CAUVA et avons créé une modeste cellule qui permet de porter plainte. Mais la question ne se pose pas dans les mêmes termes qu'en métropole dans la mesure où cette compétence est calédonienne. Il n'existe pas d'articulation avec les agences régionales de santé puisqu'il n'en existe pas en Nouvelle-Calédonie. Les établissements de santé calédoniens et les services de l'État s'opposent. Plus largement, l'audit de grande ampleur dont le Premier ministre a rappelé la nécessité la semaine dernière et qui sollicitera à la fois les services sociaux, les services de santé ainsi que la chaîne pénale et judiciaire souffre de ce problème d'articulation en Nouvelle-Calédonie entre les deux échelles de compétences. Il n'en demeure pas moins que les violences conjugales transcendent très largement les problématiques de compétences normatives ou institutionnelles, et que c'est une cause à laquelle nous sommes toutes et tous très attachés.

Je terminerai par une remarque. En début de semaine, le haut-commissaire de Nouvelle-Calédonie a réuni le comité local d'aide aux victimes dont les parlementaires ne font pas partie. Le haut-commissaire m'a donc gentiment invité oralement. Au-delà du fait que je ne pouvais m'y rendre, pourquoi suis-je le seul à avoir été invité ? Je pointe ce constat car je considère que le comité local d'aide aux victimes a toute sa pertinence. Dans le cadre des travaux qui sont les nôtres, peut-être serait-il utile que les parlementaires soient systématiquement associés, si c'est possible, pour à la fois s'instruire, participer au débat et, éventuellement, enrichir le Grenelle des violences conjugales.

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