Intervention de Laurence Maillart-Méhaignerie

Séance en hémicycle du lundi 9 décembre 2019 à 16h00
Lutte contre le gaspillage et économie circulaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurence Maillart-Méhaignerie :

La surconsommation de plastique, le gaspillage des denrées alimentaires, l'abandon de déchets en pleine nature ou encore l'obsolescence programmée sont autant de pratiques non vertueuses de notre modèle de production et de consommation. Face à ces anomalies, nos concitoyens, souvent laissés impuissants ou sans recours, nous demandent des solutions. Conscients de l'urgence d'accélérer la transition écologique, les citoyens veulent avoir les moyens d'agir à leur échelle et se disent prêts à changer de modèle dès lors que la répartition des efforts est équitable.

C'est avec beaucoup d'enthousiasme que je m'exprime au nom du groupe La République en marche aujourd'hui car ce projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire répond à ces attentes, avec des mesures concrètes poursuivant l'objectif de mieux consommer, mieux produire, mieux gérer nos déchets et mobiliser l'ensemble des acteurs.

Mesures concrètes pour renforcer l'information du consommateur, avec l'affichage des qualités et caractéristiques environnementales des produits, la mise en place d'un indice de réparabilité, la généralisation du logo Triman pour un geste de tri plus compréhensible et facilité ou bien le renforcement de la disponibilité des pièces détachées pour lutter contre l'obsolescence programmée. Mesures concrètes pour lutter contre le gaspillage, avec l'interdiction de l'élimination des invendus des produits neufs, avec la vente des médicaments à l'unité pour en finir avec l'aberration écologique que sont nos stocks de médicaments inutilisés et jetés, avec l'impression des tickets de caisse uniquement à la demande du client ou encore avec le renforcement des outils pour réduire le gaspillage des denrées alimentaires. Mesures concrètes encore pour mobiliser les industriels et transformer les modes de production, avec la création de nouvelles filières REP pour les jouets, articles de sports, mégots, bâtiments, matériel médical entre autres, et avec l'obligation de reprise sans frais par les distributeurs et la vente en ligne. Mesures concrètes enfin pour améliorer la collecte de nos déchets et lutter contre les dépôts sauvages, avec l'harmonisation de la couleur des contenants, l'obligation pour les éco-organismes d'assurer la traçabilité des déchets ou encore le renforcement des pouvoirs des élus locaux pour sanctionner les infractions d'abandon de déchets dans la nature.

Ce projet de loi est le fruit d'un travail collectif et exigeant, issu de longues concertations avec les principaux acteurs du secteur de la prévention et de la gestion des déchets. Ce travail, nous l'avons poursuivi au sein de cette assemblée, pendant des semaines, à travers plus de cent heures d'auditions et des rencontres avec des acteurs de terrain. Cette réflexion a permis aux députés du groupe La République en marche de porter de nouvelles propositions en commission pour renforcer l'ambition du texte. Nous continuerons au cours de l'examen en séance à soutenir des mesures stratégiques pour l'enrichir sur plusieurs volets.

Alors que la France produit environ 5 tonnes de déchets par habitant et par an, nous réaffirmerons tout d'abord notre priorité de réduire la production des déchets à la source. Les plastiques sont un problème aussi bien pour l'environnement que pour notre santé. Ce sont nos sachets, flacons, emballages et ustensiles du quotidien. Une solution s'impose : acter la fin de l'ère de l'ère du plastique à usage unique et accélérer la sortie du tout-plastique jetable. Notre groupe portera donc un objectif fort : la fin de la mise sur le marché de tous les emballages en plastique à usage unique d'ici 2040.

Pour soutenir cette ambition, le texte issu de la commission du développement durable a acté des avancées majeures. Nous avons interdit tous les emballages à usage unique pour les repas pris sur place dans la restauration rapide d'ici trois ans. Nous avons limité la mise à disposition de jouets en plastique jetables dans les repas proposés aux enfants. Nous avons offert aux clients la possibilité d'utiliser un contenant réutilisable dans les rayons traiteur des supermarchés et de déposer leurs emballages à la sortie des caisses. Nous avons interdit le suremballage des fruits et légumes. Nous avons imposé la mise à disposition de fontaines d'eau potable dans les établissements recevant du public, pour réduire notre consommation de bouteilles en plastique. Toutes ces mesures, et bien d'autres encore, sont une avancée notable pour la réduction de nos déchets plastiques à la source.

Ensuite nous continuons à soutenir les dispositifs qui améliorent la collecte des déchets. Cela passe par l'harmonisation de nos pratiques de tri sur tout le territoire, prévue par le projet de loi et que nous souhaitons renforcer à l'aide d'un affichage clair et lisible. Cela passe aussi par la mise en place de corbeilles de tri dans tous les espaces publics, les gares, les aéroports, les stades. Les entreprises doivent aussi être davantage mises à contribution et respecter leurs obligations de tri cinq flux.

Nous avons aussi proposé des mesures pour accélérer le tri et la valorisation des biodéchets, les déchets alimentaires. Ces biodéchets représentent un tiers des poubelles résiduelles des Français et une large partie est encore incinérée et enfouie. Ces modes de traitements conduisent à des pollutions diverses et à un gaspillage de ressources énergétiques.

En matière de collecte, la France doit également respecter les objectifs qu'elle a contribué à fixer au niveau européen, notamment celui de collecter 90 % des bouteilles en plastique d'ici dix ans. Depuis plusieurs mois, les députés du groupe La République en marche soutiennent la possibilité d'une consigne pour réemploi et recyclage, tout en portant une attention particulière aux craintes exprimées par certaines collectivités. Le Président de la République l'a rappelé : rien ne se fera sans les maires et sans les collectivités, au coeur du service public des déchets. Ce qui est certain, c'est que face aux 150 millions de bouteilles en plastique jetées chaque année dans la nature, il nous faut agir. Madame la secrétaire d'État, vous avez lancé une grande concertation et nous vous faisons confiance pour arriver à un compromis qui permette de maintenir notre ambition tout en rassurant les élus et les collectivités.

Nous voulons également améliorer le recyclage et le traitement des déchets. Il y a trente ans, alors que le pays commençait à être submergé par les déchets issus de la généralisation du tout-jetable, la France a inventé la REP, en matière d'emballage. Ce système pollueur-payeur impose aux fabricants et distributeurs de produits d'assurer la fin de vie de leurs produits. Trente ans après, nous réformons la gouvernance des REP avec la création, dans chaque éco-organisme, d'un comité des parties prenantes composé d'associations, de collectivités et des producteurs et opérateurs de déchets. C'était très attendu.

Nous renforçons dans la loi le principe pollueur-payeur avec la création de nouvelles filières à responsabilité élargie du producteur, par exemple sur les produits du tabac. Concrètement l'industrie du tabac devra financer et aménager un système gratuit de récupération, de nettoyage et de traitement des mégots. C'est une avancée environnementale majeure, quand on sait qu'un seul mégot peut polluer jusqu'à 500 litres d'eau.

Le secteur du bâtiment sera lui aussi fortement mis à contribution avec la création d'une filière REP. Avec 48 millions de tonnes de déchets par an, le secteur est le plus gros émetteur de déchets en France et il n'était pas envisageable qu'il ne participe pas à cet effort. Pour aller plus loin, nous porterons au cours des débats la proposition de création d'une nouvelle filière REP pour les aides médicales techniques afin de développer leur réemploi et de diminuer le reste à charge pour les personnes en situation de handicap.

Notre groupe soutiendra par ailleurs les mesures visant à permettre aux consommateurs d'accéder à des produits éco-responsables. Souvent les téléphones, les ordinateurs ou les réfrigérateurs ne sont pas réparables, ou alors leur réparation coûte trop cher. Pour en finir avec l'ère du tout-jetable, le projet de loi prévoit l'obligation d'informer les acheteurs du degré de réparabilité des produits. La disponibilité des pièces détachées devra être connue pour la vente en magasin et pour la vente en ligne : c'est une grande avancée qui a été défendue par notre groupe en commission. Le travail de notre rapporteure Véronique Riotton a également permis de définir un délai de disponibilité de quinze jours ouvrables, et de rendre visible l'indice de réparabilité au moment de l'achat. Ces mesures permettront d'accélérer considérablement la lutte contre l'obsolescence programmée et modifieront vertueusement nos habitudes de consommation.

Au-delà des mesures de ce projet de loi, nous devons être pleinement conscients que l'économie circulaire est un nouveau modèle de société, alliant justice sociale et protection environnementale. Mais c'est aussi une formidable opportunité économique pour nos territoires, avec un potentiel de 300 000 emplois supplémentaires non délocalisables dans le domaine du recyclage, de l'économie de partage, de la réutilisation ou du réemploi. En ce sens, le fonds de réemploi solidaire, introduit par le Sénat et enrichi par le travail de notre rapporteure Stéphanie Kerbarh, permettra de soutenir financièrement les structures qui y contribuent dans nos territoires et je m'en félicite.

Je tiens à saluer le travail de mes collègues chefs de file de leur groupe parlementaire ici présents ainsi que celui des rapporteures. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, ainsi que vos équipes pour votre disponibilité. J'espère que nous trouverons les convergences utiles pour soutenir largement ce texte à l'issue de nos débats en séance publique.

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