Intervention de Stéphane Peu

Séance en hémicycle du mercredi 11 décembre 2019 à 15h00
Violences au sein de la famille — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Peu :

Alors que le nombre de féminicides et le phénomène massif de violence intrafamiliale continuent de s'amplifier, l'urgence et la gravité de la situation nous engagent à agir sur-le-champ, concrètement et efficacement.

Aussi nous réjouissons-nous de l'accord intervenu en commission mixte paritaire, grâce auquel nous pouvons aujourd'hui voter – ce que nous allons faire – en faveur d'une étape importante de la lutte contre les violences au sein de la famille, en protégeant davantage les victimes et en renforçant leurs garanties matérielles et juridiques.

Parvenir à un consensus républicain sur ce problème grave est une nécessité car trop souvent, derrière les statistiques et les déclarations d'intention, les actes forts restent insuffisants.

Certes, l'arsenal législatif de lutte contre les violences conjugales a été considérablement affermi en quinze ans. Cependant, l'efficacité des dispositifs mérite d'être interrogée.

Les violences au sein de la famille n'épargnent aucun milieu social, aucun territoire, aucune génération. Ces violences sont manifestes et constituent un obstacle majeur à l'élimination des inégalités entre les sexes. Elles revêtent des formes multiples ; elles peuvent être verbales, psychologiques, physiques, sexuelles, économiques. Elles peuvent commencer au début d'une relation, après des années de vie commune ou au moment de la séparation.

Aussi sommes-nous satisfaits des dispositions inscrites dans cette proposition de loi, qui donne des outils indispensables pour protéger les victimes de violences conjugales et prévenir l'apparition de ces dernières.

Je pense en particulier au renforcement de l'ordonnance de protection et à la réduction du délai de délivrance, fixé à six jours à compter de la saisine du juge. L'ordonnance de protection pourra également être délivrée en l'absence de cohabitation, en cas de violences exercées au sein du couple ou d'un ancien couple.

De même, l'accès facilité au téléphone grave danger et les dispositifs d'aides personnalisées au logement pour les victimes de violences conjugales constituent à notre sens des avancées notables.

L'interdiction faite au juge aux affaires familiales de proposer une mesure de médiation en vue d'un exercice consensuel de l'autorité parentale lorsque des violences intrafamiliales sont alléguées nous semble également nécessaire.

En outre, nous sommes particulièrement satisfaits que soit inscrite dans la loi la possibilité de suspendre l'exercice de l'autorité parentale des auteurs de violences au sein du couple.

Comme le soulignent de nombreux professionnels du droit, ce dispositif participe à une évolution indispensable pour mieux protéger la mère et l'enfant. Il s'agit de prendre conscience qu'un mari violent ne peut pas être un bon père. Dès lors qu'un homme est violent avec sa femme, un climat de terreur s'instaure dans le quotidien de l'enfant, lequel nuit gravement à sa construction et son développement.

À cet égard, une étude de novembre 2018, menée par l'Observatoire des violences envers les femmes du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, confirme très justement que les violences dans le couple ont également des conséquences particulièrement néfastes sur le bien-être psychologique, neurologique et social de l'enfant qui y est exposé.

Enfin, je ne saurai conclure sans rappeler que cette proposition de loi, comme plus généralement la lutte contre les violences au sein de la famille, ne pourra être efficace que si des moyens budgétaires importants sont parallèlement déployés – comme l'a dit M. le rapporteur.

Or, concernant cet aspect, les annonces faites le 25 novembre dernier en conclusion du Grenelle des violences conjugales sont pour le moins décevantes. Le budget reste largement insuffisant : les 360 millions évoqués par le Premier ministre correspondent quasiment au budget de 2019.

C'est pourquoi nous rappelons que, selon le Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, 500 millions par an seraient nécessaires pour protéger les femmes qui portent plainte, et que plus d'un milliard devrait être mobilisé pour protéger toutes les femmes en danger déclarant des violences conjugales sans que celles-ci soient nécessairement constatées par les forces de l'ordre.

Avant de confirmer le vote favorable du groupe GDR, je tiens, parce qu'il est assez rare qu'un texte fasse l'objet d'un consensus dans notre hémicycle, à saluer la méthode utilisée. Sans tenter de mauvais rapprochement avec l'actualité politique, je préfère la méthode qui consiste à essayer de rassembler…

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