Intervention de Annick Girardin

Réunion du lundi 30 octobre 2017 à 21h00
Commission élargie : finances - lois constitutionnelles - affaires économiques

Annick Girardin, ministre des outre-mer :

Les trois rapporteurs ont parlé du logement : c'est une priorité des politiques publiques au ministère des outre-mer et nous devons évidemment y faire face. Pour 2018, les crédits de paiement de la LBU seront globalement maintenus et j'ai souhaité renforcer considérablement les constructions neuves avec 28 millions d'euros de crédits supplémentaires. Nous visons la construction de 400 logements, mais je sais comme vous que la demande est très élevée : 60 000 logements outre-mer, le défi est immense. Les crédits de résorption de l'habitat indigne sont aussi maintenus ; j'ai obtenu la prolongation du fonds Barnier pour l'habitat informel, ce qui n'était pas si évident.

En ce qui concerne le parc privé, la baisse des autorisations d'engagement n'est pas une fatalité. Même s'il faut changer le règlement de l'ANAH, nous devons aller vers le droit commun dans ce domaine, car c'est là que les financements iront demain : l'ANAH a 1,5 milliard de financements supplémentaires qu'il nous faut aller chercher pour que l'outre-mer en bénéficie également. C'est un combat que nous devons mener ensemble.

Dans le cadre de la stratégie nationale pour le logement, nous avons mis en place un groupe de travail avec Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires, et nous pourrons rapidement vous apporter des réponses, notamment sur la question des normes de construction. Je sais que le sénateur Magras a formulé des recommandations que je compte suivre.

La question de l'efficacité des aides doit aussi être posée. Je veux retravailler sur le foncier, sur les matériaux, sur les intermédiaires – certains intermédiaires, notamment dans les ventes en état futur d'achèvement, coûtent très cher. Cela doit nous amener à nous interroger. Je souhaite que vous soyez à mes côtés dans le combat que je vais mener au sein du Gouvernement pour répondre aux besoins des outre-mer.

Le dispositif du fonds vert ne sera pas reconduit en 2018. Toutefois, les prêts accordés en 2017 continueront de bénéficier de la bonification de deux cents points de base : en clair, les opérations lancées seront financées. J'ai expliqué au sein du Gouvernement que le défi de l'adaptation est tel qu'on ne peut pas se contenter d'un fonds vert limité à la Polynésie. Bien sûr, la Polynésie a de réels besoins : nous savons que la montée des eaux va la toucher et que nous allons perdre un certain nombre d'atolls. Mais nous devons aller beaucoup plus loin. Nous devons avoir un fonds vert pour tous les territoires d'outre-mer, voire l'ensemble des territoires. Nous voyons que nous ne pouvons pas compter sur le seul budget de l'outre-mer, même si je suis ravie que son montant augmente. Le défi est tout autre. Pour le relever, nous devons réclamer ensemble qu'au-delà de l'outre-mer, cette question soit portée par le ministre de la transition écologique et solidaire, qui est d'accord pour le faire. Je souhaite que le 12 décembre, lors de la réunion sur le dérèglement climatique organisée deux ans après la COP21, nous puissions porter ce message fort.

Pour ce qui est de la Cité des outre-mer, j'ai déjà dit que je souhaitais que cette question soit débattue dans le cadre des assises. Il n'est pas question de remettre en cause ce projet, mais il doit être affiné et nous devons trouver des partenaires supplémentaires pour assurer son fonctionnement. Le ministère de la culture n'est pas au rendez-vous, ni la région Île-de-France. La mairie de Paris l'est, c'est un partenaire important. Il faut, sur ce sujet, mener une concertation plus large pour attirer d'autres partenaires sur ce projet et assurer son fonctionnement à long terme. Si nous investissons dans un projet attendu depuis longtemps, encore faut-il que les financements pour le fonctionnement soient au rendez-vous.

Certains amendements proposés par les uns ou les autres soulèvent des sujets importants. Je partage un certain nombre des propositions faites, mais je m'exprimerai en séance, après que les commissions saisies ont décidé des amendements retenus.

Sur la diminution des crédits de LADOM, comme je l'ai dit en introduction, nous avons fixé le budget 2018 à hauteur des crédits dépensés en 2017. Nous avons aussi révisé les dépenses avec les marchés de voyagistes ; j'espère que cela nous permettra une économie substantielle.

Les mesures de la loi EROM seront financées ; je m'engage à ce qu'elles le soient au fur et à mesure de leur entrée en vigueur. Vous savez que la totalité des dispositifs prévus ne seront pas immédiatement opérationnels ; leur mise en place prendra quelques mois. Je préfère le faire au fur et à mesure, et non au détriment d'autres choix.

S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, et plus spécialement des listes électorales, je souhaite que le débat puisse se mener de manière apaisée lors des réunions des signataires de l'accord de Nouméa. Ils sont arrivés à Paris, ils ont été reçus par la Président de la République et ont pu rencontrer le Premier ministre. Nos travaux commencent dans trois jours ; il est important d'attendre ces échanges avant de communiquer sur ces sujets. J'ai bon espoir qu'un consensus sera trouvé sur l'ensemble des sujets abordés.

Ce référendum de fin 2018 est extrêmement important pour la Nouvelle-Calédonie. Il nous faut y travailler de manière apaisée. Je sais que l'Assemblée nationale se penche également sur ces sujets, et surtout s'emploie à préparer la suite. Nous devons être vigilants sur l'organisation de ce référendum – nous allons le faire tous ensemble –, mais également, et de manière tout aussi apaisée, travailler sur le jour d'après et l'avenir de la Nouvelle-Calédonie.

Pour ce qui est du suivi de la loi EROM, sur les vingt-deux décrets d'application, seuls quatre sont parus, soit un taux de mise en oeuvre de 18 %. C'est faible. Sur les sept décrets qui relèvent du ministère de l'outre-mer, un seul est paru, qui concerne l'aide au fret. Mais tous ont été rédigés et font l'objet des consultations habituelles – permis de chasse en Guyane, création d'un grand conseil, etc. Quant aux autres ministères, la direction générale des outre-mer (DGOM) les a relancés les uns après les autres. J'espère que le travail sera fait rapidement ; nous maintenons la pression.

Les quatre habilitations à prendre par ordonnance sont toutes en cours d'élaboration. Les délais expirent en juillet 2018 et nous devrions être au rendez-vous, sauf pour l'ordonnance relative à la régulation foncière à Mayotte, où le délai est fixé à la fin novembre 2017. L'ordonnance a été rédigée par la DGOM, elle est en cours d'examen à Bercy. Je ferai tout pour respecter les délais, mais si malheureusement ce n'est pas le cas, il est déjà prévu de prolonger l'habilitation ; mais ce ne serait pas satisfaisant.

Le Gouvernement doit rendre dix rapports au Parlement. C'est sur ce point que le retard est le plus conséquent. Beaucoup de ces rapports imposent de solliciter des cabinets d'études afin que le travail soit le plus précis possible et ne pèse pas sur les services – vous connaissez la petitesse de la DGOM. Le rapport sur le calcul des taux de pauvreté des populations outre-mer et de la population hexagonale a été rédigé par l'INSEE et est en cours de validation. Pour celui sur la consommation d'alcool, l'appui de l'inspection générale des affaires sociales a été demandé au ministère de la santé.

La traduction budgétaire des mesures de la loi est déjà visible dans certains cas, d'autres s'étaleront au cours des années qui viennent. Nous aurons, là aussi, des débats dans le cadre des assises qui permettront d'aller vers les contrats de convergence, la renégociation des contrats État-région. Cela doit se faire dans les mois qui viennent. Je comprends votre impatience, elle est normale, mais je vous assure que tous les services sont mobilisés pour améliorer le taux de mise en oeuvre de cette loi. Je suis à l'écoute de la mission qui sera menée par Mme Sage et M. Gérard.

Le fonds de secours a été doté, en loi de finances initiale, de 10 millions. Je n'ai pas besoin de vous dire que cela ne suffira pas, vous le savez : le chiffre aujourd'hui identifié est de 80 millions d'euros. Évidemment, le pas est énorme. Le fonds sera abondé pour répondre aux besoins, et je pense que nous irons vers une taxation interministérielle, car un tel montant ne peut pas être supporté par le ministère de l'outre-mer.

Le tourisme est pour moi un sujet important ; il est primordial pour les outre-mer. Nous aidons aujourd'hui le développement économique du tourisme, mais il faut aller beaucoup plus loin. Tous les territoires n'ont pas les mêmes demandes, et c'est pourquoi je souhaite travailler dans le cadre des assises, car les orientations et les outils que nous devons mettre en place ne sont pas obligatoirement les mêmes partout : chaque territoire a ses spécificités, sa propre vision de son développement touristique. Dans le cadre de la réforme des aides aux entreprises, il faudra que le secteur du tourisme bénéficie d'une priorité et d'outils spécifiques.

Vous savez aussi combien Erasmus me tient à coeur. Le président de la Commission l'a annoncé en Guyane : il y aura un Erasmus régional financé par des fonds européens. C'est une bonne nouvelle, qui récompense un combat mené par de nombreux députés, notamment Serge Letchimy. Je veux lui dire ici que la demande a été entendue par l'Europe, et nous pouvons nous satisfaire du travail réalisé.

Pour ma part, je souhaite aussi que dans le cadre du fonds d'aide à la mobilité et aux échanges sportifs, culturels, des échanges régionaux soient aussi possibles. La coopération régionale est, vous le savez, un sujet qui me tient à coeur depuis de nombreuses années en tant que députée.

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