Intervention de Rémy Vienot

Réunion du jeudi 12 décembre 2019 à 10h55
Mission d'information sur l'incendie d'un site industriel à rouen

Rémy Vienot, président de l'association Espoir et Fraternité tsiganes :

Je suis président de l'association « Espoir et Fraternité tsiganes ». Je milite au sein de cette association depuis plus de huit ans. Je suis aussi médiateur du programme de formation des médiateurs roms (ROMED), certifié par le Conseil de l'Europe.

Le 27 septembre, Mme Lise Foisneau, M. Valentin Merlin et M. William Acker m'ont informé que l'aire d'accueil des gens du voyage était située à 300 mètres de l'usine Lubrizol à Petit-Quevilly. Via ma page Facebook, nous sommes entrés en contact avec les familles résidentes de l'aire d'accueil. Une fois le contact pris, je me suis vite rendu compte qu'il s'agissait d'un véritable scandale, d'une honte. C'est en écoutant les témoignages des familles que l'on comprend que : « Nous, Gens du voyage, sommes bien considérés comme des sous-Français ».

Personne n'est venu porter secours à ces familles. Pire encore, on les a empêchés de fuir. Les policiers de la brigade anti-criminalité sont venus sur l'aire d'accueil pendant l'incendie, équipés de masques à gaz. Ils n'ont pas voulu que les familles évacuent l'aire d'accueil avec leur caravane. Ils leur ont demandé de s'y confiner. Mais une caravane n'est pas un local de confinement. À l'intérieur, il y a des prises d'air partout et cela sentait l'essence, le gaz, la fumée et le plastique brûlé. Pendant ce temps-là, des bidons de produits chimiques montaient à cinquante mètres de hauteur et retombaient dans l'usine, offrant un spectacle de plusieurs heures, traumatisant pour les habitants de l'aire d'accueil. Durant les jours suivants, aucun représentant public ne s'est soucié de ces familles. Elles sont restées à vivre à côté de cette usine chimique.

Certaines vies valent apparemment moins que d'autres. Les conditions de vie des gens du voyage en France mériteraient, à elles seules, une commission d'enquête parlementaire à l'Assemblée nationale. Je pourrais vous parler de cette « aire d'accueil de la honte » à Pontarlier, installée à côté d'une usine d'équarrissage et où les familles sont obligées de se couvrir le visage avec des mouchoirs, à cause des fumées pestilentielles.

Je pourrais vous parler de cette aire située rue de Dunkerque à Strasbourg, dans cet endroit improbable, au milieu d'une zone industrielle située à côté d'une immense déchetterie, où brûlent des déchets toute la journée. Savez-vous le nom donné par les résidents à cette aire d'accueil ? Le « petit Auschwitz ». En effet, collée contre les hauts grillages de l'aire d'accueil, se trouve une voie ferrée sur laquelle des trains stationnent avec leurs wagons de marchandises. Ajoutez à cela les cheminées de la déchetterie et de l'incinérateur qui fument toute la journée, et vous comprenez facilement ce petit surnom.

Je pourrais aussi vous parler de cette aire de grand passage à Dole, où une cimenterie déverse du liquide mousseux jaune fluo avec un grand tuyau, à l'endroit où vivent les familles, formant ainsi un petit étang près duquel des enfants jouent avec leurs vélos. En résumé, les cas sont innombrables et traduisent l'existence de véritables dérives dans la mise en oeuvre des politiques d'accueil, si l'on peut parler réellement « d'accueil ».

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