Intervention de Alexis Corbière

Séance en hémicycle du jeudi 16 janvier 2020 à 9h00
Protocole additionnel à la charte européenne de l'autonomie locale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Corbière :

Permettez-moi de le rappeler à mon tour, c'est le Conseil de l'Europe qui a permis, en 1985, l'élaboration de la Charte européenne de l'autonomie locale. Ce texte constitue encore aujourd'hui le premier instrument juridique multilatéral définissant les principes fondamentaux que tout système démocratique d'administration locale doit respecter. Ratifiée depuis par les quarante-sept États membres du Conseil de l'Europe, la charte oblige notamment à garantir l'indépendance politique, administrative et financière des collectivités locales.

Nous discutons aujourd'hui d'un protocole additionnel à ce texte, qui renforcerait la participation de tout citoyen aux affaires de la collectivité dans laquelle il réside. Sur le principe, nous sommes bien sûr d'autant plus favorables à une telle disposition qu'elle constitue un axe essentiel de notre projet politique, selon lequel la souveraineté populaire doit prévaloir sur tout autre pouvoir.

La démocratie locale revient régulièrement dans nos débats, mais quelle réalité recouvre-t-elle ? Au-delà des engagements internationaux de la France, ses traductions concrètes dans le droit national sont souvent bien pâles.

En novembre 2019, la majorité avait l'occasion de revivifier la démocratie de proximité à l'occasion de la discussion d'un projet de loi. Ce fut un coup d'épée dans l'eau et tout porte à croire que rien ne changera vraiment dans l'exercice de la citoyenneté locale. De surcroît, certains choix institutionnels ou budgétaires du Gouvernement mettent à mal la souveraineté de nos concitoyens s'agissant du fonctionnement et du devenir de leur commune, de leur département ou de leur région. Ainsi, la suppression de la taxe d'habitation a jeté de nombreux maires dans l'incertitude et risque bien de contraindre encore plus les marges de manoeuvre financières des conseils municipaux. Quant au transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux intercommunalités, que nous regrettons, il prive également les communes de leurs leviers d'action. Comment parler de démocratie lorsque, en toile de fond, les dotations ne font que baisser ?

Dans le même temps, lorsque des citoyens ont exprimé le souhait de retrouver des formes de démocratie directe, leurs revendications ont été au mieux ignorées, au pire vivement écartées. Je pense bien sûr au mouvement des gilets jaunes, à son aspiration à l'instauration d'outils nouveaux pour contrôler les élus et leurs décisions, à la création d'assemblées populaires pour nourrir le débat local, et à d'autres mesures encore que nous soutenons.

Les députés du groupe La France insoumise prônent une radicalisation de la démocratie à tous les niveaux et défendent à cette fin de nombreuses propositions telles que la révocabilité des élus entre les rendez-vous électoraux ou l'organisation de référendums permettant au peuple de proposer, de s'opposer ou d'abroger certaines dispositions locales et nationales. Ce sont là des mesures concrètes ! Je fais le voeu que les élections municipales prochaines favorisent leur mise en oeuvre. Dans ma circonscription, à Bagnolet, certaines listes les ont inscrites à leur programme. Si elles étaient élues, le règlement intérieur du conseil municipal pourrait prévoir, pour la première fois, un dispositif permettant à un nombre déterminé d'électeurs de révoquer les élus, selon des mécanismes restant à définir et dans des conditions garantissant bien entendu l'exclusion des minorités de l'application d'une telle procédure. Il s'agirait d'une belle et grande avancée, qui satisferait l'aspiration de notre peuple à reprendre le contrôle des décisions qui le concernent. Il est fini le temps où le citoyen faisait à son représentant un chèque en blanc pour cinq ou six longues années pendant lesquelles il n'avait pas la parole.

Pour conclure, si le groupe La France insoumise soutient évidemment toutes les initiatives communautaires visant à renforcer la démocratie locale – il votera donc le texte – , il appelle l'Assemblée à ne pas se satisfaire d'un socle minimum partagé avec nos voisins. Nous souhaitons voir émerger demain, partout où cela sera possible, de nouvelles conquêtes démocratiques, de celles dont notre pays a si souvent été l'étendard. Nous renouerions ainsi avec notre histoire.

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