Intervention de Valérie Boyer

Réunion du mercredi 15 janvier 2020 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Boyer :

Je vous remercie de m'accueillir encore une fois au sein de la commission des Lois pour traiter des violences conjugales. Après le Grenelle, et après la mort de 140 femmes tuées par leur conjoint ou leur compagnon en 2019, ce lundi 13 janvier, nous avons appris le cinquième cas de l'année 2020. J'emploie pour le désigner le terme de « conjuguicide » car ces crimes ne sont pas ordinaires : ils se passent dans le cadre d'un couple ou d'un foyer.

Environ 170 000 enfants vivent dans un foyer dans lequel une femme a déclaré subir des violences physiques ou sexuelles. Derrière ces chiffres, il y a la réalité d'une souffrance insupportable et inacceptable. Ces drames ne sont malheureusement pas nouveaux. C'est pourquoi ma famille politique, Les Républicains, a toujours été au rendez-vous de la lutte contre les violences conjugales.

En 2009, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, le Premier ministre François Fillon a déclaré les violences faites aux femmes grande cause nationale. Nous sommes à l'origine de la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, qui a été adoptée à l'unanimité, à l'initiative de notre ancien collègue Guy Geoffroy.

Il y a quelques mois, le groupe Les Républicains a choisi de consacrer sa journée réservée du 10 octobre 2019 aux violences au sien de la famille avec la proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille, déposée par M. Aurélien Pradié et qui a été adoptée à l'unanimité, ainsi qu'avec la proposition de loi relative aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, dont j'étais à l'origine. Déposée dès 2015 et redéposée sous cette législature, elle visait à assurer l'automaticité du retrait de l'autorité parentale pour les cas les plus graves ainsi qu'à préciser la notion de violence, notamment économique et sexuelle. J'insiste sur la salutaire prise de conscience en train de s'opérer sur cette question, qui a notamment fait l'objet des propos introductifs du Premier ministre lors du Grenelle. À cette occasion, j'ai d'ailleurs pu lui rappeler qu'il existait déjà un texte sur le retrait de l'autorité parentale, que j'avais déposé et qu'il serait intéressant d'adopter. Je me réjouis que ces mesures aient été incluses dans la loi du 28 décembre dernier.

Trop longtemps, notre société a tu la réalité des violences intrafamiliales. Leur persistance est une meurtrissure qui ne peut plus être ignorée et qui nous enjoint d'agir. Comme nombre de collègues, j'ai conduit des centaines d'auditions et j'ai rédigé plus de dix textes sur ce sujet. Une de mes propositions de loi, discutée le 10 octobre dernier, incluait notamment le retrait automatique de l'autorité parentale en cas d'homicide. Elle avait été largement cosignée. Je tiens à remercier tous les députés qui, sans appartenir au groupe Les Républicains, l'ont soutenue : qui pourrait prétendre que les réponses à apporter pour combattre ce fléau ont une couleur politique ? Pourtant, la garde des Sceaux ayant répondu qu'une telle modification risquerait de nous exposer à une condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme, j'ai dû faire face à une levée de boucliers de la part de la majorité. Heureusement, la commission mixte paritaire a fait droit à ces enfants qui souffrent de vivre au sein d'un foyer violent, ce dont je remercie les sénateurs. Mme la rapporteure l'a dit : ces mesures sont à présent gravées dans le marbre de la loi, parce que nous avons été nombreux à insister sur le fait que nous ne pouvions attendre.

Outre cet espoir, j'avais également celui que la majorité démontre aux Français que ces causes pouvaient dépasser les postures. Je regrette que tel n'ait pas été le cas lorsque, le 10 octobre, dans le cadre de la journée réservée au groupe Les Républicains, vous avez rejeté le texte sur l'autorité parentale. Ceux qui ont été marqués pendant des années, voire toute leur vie, car ils ont assisté au meurtre de leur mère ou vu leur mère violemment battue par leur père, méritent que l'on ne perde pas de temps. Je voulais parler de ces enfants et de ce « massacre des innocents », pour reprendre le titre du livre de Françoise Laborde.

J'ai toujours travaillé dans un esprit de rassemblement avec la majorité comme avec toutes les oppositions. Je regrette donc ce vote et, surtout, la façon dont la garde des Sceaux a traité le sujet en séance publique, répétant durant des heures que cette mesure n'était pas possible, alors qu'elle a été adoptée quelques jours plus tard. Ce n'est franchement pas une façon de travailler. Pour que cette violation des droits de l'homme, de l'enfant et des femmes prenne fin, nous devons la dénoncer avec de plus en plus de force, et publiquement.

S'agissant du texte que nous examinons ce matin, nous avons déjà évoqué les deux premiers articles relatifs à l'autorité parentale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.