Intervention de Agnès Thill

Séance en hémicycle du mardi 21 janvier 2020 à 21h30
Haine sur internet — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill :

La question n'est évidemment pas de savoir si nous sommes pour ou contre la haine sur internet – nous sommes tous d'accord sur le fait qu'il faut la condamner – , mais de savoir comment lutter contre elle. Or si nous sacrifions l'État de droit dans ce combat, c'est la haine qui aura gagné.

Les contenus mentionnés dans l'article 1er sont pénalement répréhensibles. Qu'ils soient donc condamnés par la justice dans le cadre d'une procédure équitable. Il est impératif de conforter la place du juge judiciaire, gardien des libertés fondamentales, à tous les niveaux de la lutte contre les contenus illicites et de renforcer les moyens d'action de la justice.

L'article 1er n'apporte pas la bonne réponse au problème que nous cherchons à résoudre. Les opérateurs de plateformes en ligne, qui sont des sociétés privées, n'ont pas à se substituer au juge en matière de répression des crimes et délits. La justice ne peut être rendue que par un juge, dont les décisions s'inscrivent dans une procédure précise qui prévoit une instruction respectant le principe du contradictoire et les droits de la défense. Tout ce qui sort de ce cadre n'est pas conforme à l'État de droit. La haine ne peut être combattue qu'avec les instruments de l'État de droit.

Par ailleurs, le harcèlement ne passe pas uniquement par les contenus, mais également par les signalements, qui ciblent parfois des utilisateurs en fonction de leurs opinions dans un objectif revendiqué de censure. Or nul n'a le monopole de la morale. Aucun député ni aucun membre du Gouvernement n'apprécierait de voir suspendu son compte Facebook ou Twitter à cause d'un signalement massif de groupes d'opposition structurés.

En matière de libertés publiques et de lutte contre la haine en ligne, force doit rester à la loi. La justice ne peut être rendue que par un juge. Je ne veux pas qu'avec les meilleures intentions, nous nous éloignions de l'État de droit.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.