Intervention de Alexandra Louis

Séance en hémicycle du mercredi 29 janvier 2020 à 15h00
Protection des victimes de violences conjugales — Après l'article 11

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandra Louis :

Sans revenir sur les questions de légalité et de constitutionnalité déjà évoquées, je rappelle qu'elles constituent le ciment d'un État de droit et que nous en sommes les garants.

Je m'en tiens à un examen d'opportunité de ces amendements. Je comprends les intentions assez louables de leurs auteurs, mais je crains qu'en pratique, ce qu'ils proposent n'améliore pas la situation des enfants.

En adoptant la loi du 3 août 2018, nous avons institué une circonstance aggravante lorsque l'enfant assiste aux violences au sein du couple. Cela nous avait été demandé par des associations qui ne plaidaient absolument pas pour la création d'un délit autonome, et pour cause. Il faut en effet comprendre ce que cela impliquerait en pratique : le parcours des enfants témoins serait judiciarisé sans qu'ils soient mieux protégés. Ils seraient convoqués pour des auditions et des audiences par des policiers et des magistrats ; ils devraient rencontrer des avocats… Ce sera des angoisses, des cauchemars et des difficultés diverses qui ne permettront pas d'aider les enfants.

Le statut de victime dans le cadre d'un délit autonome impliquerait l'enfant de manière bien plus forte dans un conflit de loyauté et dans la relation de violence entre les parents. C'est la raison pour laquelle les associations avaient bien insisté sur la nécessité de mettre plutôt en place une circonstance aggravante.

De plus, dans les faits, la création d'une infraction autonome risquerait d'affaiblir la répression contre les auteurs de violences conjugales. Si, par miracle, l'institution d'un délit autonome était considérée comme constitutionnelle, cela reviendrait, en application des principes de droit pénal, à supprimer la circonstance aggravante. La règle non bis in idem interdit en effet de condamner deux fois la même personne pour le même fait. La peine prononcée pour les faits commis contre le conjoint se confondrait alors avec celle prononcée pour les faits commis à l'égard du mineur témoin. Du fait du concours d'infractions, il y aurait confusion des peines, c'est-à-dire une sanction moindre.

Je rappelle que le mineur assisté d'un administrateur ad hoc et d'un avocat peut déjà demander des dommages et intérêts au tribunal.

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