Intervention de Brune Poirson

Séance en hémicycle du mardi 4 février 2020 à 15h00
Débat sur la politique maritime de la france

Brune Poirson, secrétaire d'état auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire :

Le deuxième grand défi consiste à juguler les risques et à anticiper l'évolution du trait de côte dans le contexte du changement climatique. Le rapport du GIEC sur les océans nous alerte sur les conséquences des changements en cours. Je sais que beaucoup de parlementaires sont très mobilisés sur cette question. Je me suis rendue la semaine dernière dans les Pyrénées-Orientales, à la suite du passage de la tempête Gloria, et j'ai pu constater les conséquences dramatiques de l'érosion du trait de côte. Je sais que, d'après les chercheurs de mon ministère, tous risques naturels confondus, les dégâts pourraient être multipliés par deux d'ici à 2050. C'est pourquoi nous développons des outils qui nous permettent déjà de mieux intégrer ces risques.

Les collectivités détiennent ainsi, désormais, la compétence GEMAPI – Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations – permettant d'assurer une gestion intégrée des espaces littoraux. Les collectivités se mobilisent également avec la participation active des services et opérateurs de l'État – agences de l'eau, conservatoire du littoral…

Je pense aussi à la mise en oeuvre des programmes d'actions de prévention des inondations, les fameux PAPI. Environ deux cents de ces programmes ont déjà été labellisés, pour un montant total de 2 milliards d'euros, dont 830 millions provenant de l'État.

Pour adapter l'occupation des zones les plus exposées, des plans de prévention des risques littoraux sont mis en place, qui intègrent le changement climatique. Ils permettent de prescrire des mesures pour améliorer la résilience des bâtiments exposés.

Cependant, la question des risques se double aujourd'hui de celle de l'élévation du niveau de la mer et de l'érosion du trait de côte. Cet aléa, qui touche 20 % de nos côtes, nous pousse à repenser notre aménagement littoral et à nous doter de nouveaux outils juridiques et financiers, que ce soit pour mettre en oeuvre une recomposition ou pour gérer de façon intégrée l'évolution du trait de côte. Ce sont des sujets majeurs ; nous devons avoir le courage de transformer l'aménagement du littoral. Nous y travaillons.

C'est en ce sens qu'une grande mission d'inspection interministérielle a été conduite en 2018. Sur cette base, le Gouvernement a confié au député Stéphane Buchou, élu en Vendée, une mission pour étudier, au plus près des territoires littoraux, la faisabilité de ces pistes d'actions.

Comme vous le constatez, nous nous employons, à mobiliser toute l'intelligence collective pour proposer des réponses concrètes aux acteurs. Elles ne viendront pas dans mille ans : nous ferons des propositions en 2020.

Notre troisième grand défi, déjà évoqué dans ce débat, consiste à développer les énergies marines renouvelables. Notre objectif est d'atteindre la neutralité carbone en 2050. Évidemment, nous n'allons pas nous réveiller en 2049 pour nous demander où nous en sommes. C'est ici et maintenant qu'il faut faire des choix. Nous avons donc fait celui de stopper l'exploitation des hydrocarbures en mer avec l'arrêt du renouvellement des concessions en 2040. Une disposition en ce sens a été défendue dans cet hémicycle dans une loi que vous présentait Nicolas Hulot. Il s'agit d'une décision historique.

Dès aujourd'hui, nous avançons pour faire en sorte que la France devienne un leader en matière d'éolien en mer. Nous avons ainsi décidé avec vous dans la programmation pluriannuelle de l'énergie, d'attribuer, chaque année, 1 gigawatt de puissance supplémentaire. C'est l'équivalent d'un à deux parcs éoliens développé chaque année.

J'en viens au quatrième grand défi : accompagner nos filières dans la transition écologique et énergétique pour faire face aux enjeux de la compétitivité, au défi numérique et à celui de la transition écologique.

Pour relever ces défis, il faut d'abord que notre pays et ses ports soient attractifs. La France met donc en place des politiques publiques en faveur de la flotte de commerce. Ce secteur est considéré depuis la loi pour l'économie bleue comme stratégique. Grâce à cette loi et à nos politiques publiques, l'écosystème offert par la France est attractif.

La loi du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités, dont vous avez récemment débattu, contient également des mesures économiques et sociales. Elle permet de renforcer l'attractivité du pavillon français – je pense à l'assouplissement temporaire des conditions en matière de pratique de la langue française pour les capitaines – ; d'accroître l'attractivité des métiers de navigants en facilitant l'embarquement des jeunes ; d'améliorer les conditions de travail pour que la filière reste attractive, et de faciliter les activités de services côtiers et les emplois à terre.

Par ailleurs, la France est le premier pays européen à annoncer le lancement d'un appel d'offres d'éolien flottant commercial, et à proposer un programme pluriannuel de développement de cette technologie. Plusieurs usines de la filière de l'éolien en mer ont aussi été créées en France, à Cherbourg, au Havre, et à Saint-Nazaire – j'y reviendrai sans doute au cours de la phase des questions de ce débat.

Assurer notre compétitivité, c'est aussi développer l'attractivité des métiers de la mer. C'est le défi que nous nous sommes lancé en modernisant la formation des femmes et des hommes qui seront porteurs de la croissance bleue. Nous avons ainsi reformé l'École nationale supérieure maritime, et modernisé les lycées maritimes. Cette filière doit être attractive, porteuse de sens et d'avenir.

Pour relever les défis que nous évoquions, il faut ensuite être exemplaire et réduire l'impact environnemental du secteur maritime. Plus que d'autres, les acteurs maritimes français et européens ont pris conscience des enjeux. Ils se sont engagés avant d'autres et ils ont amorcé une transition écologique et énergétique ces dernières années, au niveau tant national qu'international.

Sur le plan national, la transition du secteur se poursuit, principalement sous deux angles avec le verdissement des navires et le développement des services de fourniture d'énergie alternative dans les ports.

Le verdissement des navires en particulier s'opère grâce à des soutiens à l'innovation, à l'appui à des engagements volontaires, comme la charte SAILS – Sustainable Actions for Innovative and Low-impact Shipping – , ou en développant une fiscalité adaptée, comme dans la loi de finances pour 2020.

Par ailleurs, en 2019, la France a été le premier pays à mettre en place une filière de déconstruction des bateaux de plaisance. Ils jonchent parfois nos côtes et nos fonds marins. Il s'agit d'une filière importante pour notre économie littorale, et je tiens à féliciter tous les professionnels qui s'y sont engagés.

Nous développons également des contrôles plus nombreux des navires qui font escale dans les ports français, car, aujourd'hui, le combat se mène au niveau international. C'est pour cela que la France est notamment très engagée au sein de l'Organisation maritime internationale lors des négociations environnementales. Que ce soit en matière de décarbonation, de lutte contre la pollution de l'air ou contre la pollution par les plastiques, la France est au rendez-vous et à l'offensive.

Enfin, le cinquième et ultime défi consiste à réussir la transformation de nos grands ports maritimes.

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