Intervention de Sébastien Jumel

Réunion du mercredi 29 janvier 2020 à 15h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi instituant un système universel de retraite et le projet de loi organique relatif au système universel de retraite

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Jumel :

Citer Thiéfaine dans cette enceinte, cela a de la gueule !

Nous avons, au sein du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, le sentiment que la concertation n'aura été qu'une farce et que, au bout du compte, la version finale de cette réforme ressemble, à la virgule près, au rapport Delevoye originel. Le Conseil d'État est venu en rajouter dans son avis, considérant le projet lacunaire, mal préparé, ce qui traduit la désorganisation du Gouvernement. Il souligne l'absence de prospectives financières ou, lorsqu'elles existent leur manque de crédibilité ; il critique également, sur la forme, le recours aux ordonnances qui, n'en déplaise à des rapporteurs adeptes de la méthode Coué, témoigne d'une confiscation des prérogatives de la majorité parlementaire ; il met enfin en exergue cette obsession pour le Gouvernement de l'allongement de la durée de cotisation, qui n'aboutira, selon le Conseil, qu'à fragiliser l'équilibre des comptes de l'assurance chômage.

Pour Bruno Le Maire, le ministre de l'économie, cet avis du Conseil d'État fragilise la réforme en renforçant les arguments des opposants au projet de loi et en l'exposant à un risque d'inconstitutionnalité. Selon lui, peut-être serait-il même nécessaire de nommer un médiateur pour rediscuter du projet : faut-il y voir un premier pas vers le retrait ?

Quoi qu'il en soit, j'aimerais vous entendre sur la qualité de la concertation, sur les délais dont vous avez disposé pour analyser cette étude d'impact pipeautée, orientée et les simulateurs qui vont avec, conçus comme des outils à charge contre le système par répartition.

Ensuite, la réforme organise l'harmonisation par le bas de la reconnaissance de la pénibilité, en faisant disparaître les catégories actives de la fonction publique, en limitant les départs anticipés et en restant muette sur les seuils. C'est une manière d'affaiblir le système, alors qu'on a fait disparaître les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, et il n'aura pas échappé à l'opinion publique qu'en fonction du métier qu'on exerce les points de vie ne seront pas tout à fait les mêmes pour tous. Comment appréhendez-vous cette question de la pénibilité et dans quel état d'esprit participerez-vous demain à la conférence de financement, sachant que, si le MEDEF a rappelé qu'il était prêt à discuter de tout, il n'est en réalité prêt à discuter que de l'effort des salariés – et donc de la durée de cotisation – pour contribuer au financement de la réforme ?

Enfin, puisqu'il semble acquis pour la majorité que l'on va travailler plus longtemps, jusqu'à un âge plus avancé – les seniors étant voués, en quelque sorte, à devenir la sève de l'économie réelle –, avez-vous des commentaires à faire sur les conséquences que cela induirait pour l'assurance chômage, sachant que l'employabilité des seniors, dans la fonction publique comme dans le secteur privé, ne va pas toujours de soi ? Quel en serait par ailleurs l'impact sur l'équilibre financier de l'assurance maladie ?

J'en termine en vous remerciant d'être aujourd'hui autour de la table, vous qui, depuis vingt ans, êtes méprisés pour certains, humiliés pour d'autres, piégés pour bon nombre d'entre vous. (Protestations chez les commissaires du groupe de La République en Marche.) Pourtant vous êtes là, forces de proposition et d'analyse, prêts au dialogue, qui fait la richesse de notre démocratie sociale et de notre démocratie parlementaire. Quel est l'état d'esprit de vos bases, de vos organisations, face à la colère qui semble s'enkyster dans l'opinion publique ?

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