Intervention de Julien Denormandie

Séance en hémicycle du jeudi 13 février 2020 à 9h00
Financement des infrastructures de téléphonie mobile — Discussion générale

Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement :

Par ailleurs, nombreux sont ceux qui ont mis en doute la conscience de l'État sur cette question. Il me semble pourtant qu'elle n'est plus à démontrer. Nous avons fait bouger les lignes il y a deux ans et demi, et partageons un objectif défendu sur tous les bancs de l'Assemblée, y compris par le président Vigier, Éric Bothorel et Laure de La Raudière, mais aussi par vos collègues des groupes Les Républicains et Socialistes et apparentés. La conscience de l'État existe bel et bien, comme celle de tous les parlementaires.

Il est important de tenir un discours profond de vérité. J'entends les critiques récurrentes qui reprochent de ne pas aller assez vite.

Je rappelle tout de même que, lorsque j'ai été nommé ministre, il y a deux ans et demi, il y avait officiellement 600 zones blanches en France. Voilà quel était le référentiel dont nous partions ; il n'était pas nouveau puisqu'il avait été défini par les précédents gouvernements. Pourquoi 600 zones blanches ? Dans un village, à plus de 500 mètres du clocher, vous étiez obligé de monter en haut de la colline et de lever le bras droit pour avoir une barre sur quatre ; quelle histoire ! La quasi-schizophrénie du ministre que je suis m'a poussé à changer la donne et à redéfinir les zones blanches, comme l'ont très bien expliqué Laure de La Raudière et Éric Bothorel : il fallait en finir avec ce système des zones blanches complètement farfelu. Comme pour tout, quand il y a du gris, c'est qu'il y a un loup ; soit il y a des zones blanches, soit il y a des zones qui ne le sont pas, mais arrêtons avec cette notion de zones grises. Nous avons transformé les zones grises en zones blanches ; c'est pour cela que, dans le new deal, on est passé de 600 sites à couvrir à plus de 12 000 sites, grâce aux nouveaux pylônes.

Le deuxième élément est le référentiel. Certains, au premier rang desquels M. Ruffin – que je remercie d'être revenu dans l'hémicycle, ce qui me donne l'occasion de lui répondre – disent que les objectifs ne sont pas tenus et qu'il faut saigner les opérateurs. Arrêtons avec ce vocabulaire ; il faut apaiser le pays, cela fera du bien à tout le monde.

Je le dis très paisiblement, depuis que je suis chargé du dossier, en 2017, 10 millions de foyers – pas 1 million, pas 2 millions, mais 10 millions – ont été rendus raccordables au numérique. Cinquante villes, villages ou zones par semaine – je dis bien par semaine – ont vu les anciennes technologies laisser la place aux nouvelles depuis janvier 2018 : pas une ou deux, mais cinquante par semaine ! Il y a encore beaucoup à faire et je ne lâcherai rien. Il est important aussi de rappeler le référentiel, parce qu'il est trop facile de faire de grands effets d'estrade en répétant : « Ce n'est pas assez, ce n'est pas assez, ce n'est pas assez. » Voilà ce que l'on fait et voilà pourquoi on se bat avec vous, depuis maintenant deux ans et demi.

Depuis le new deal, j'ai notifié aux opérateurs plus de 1 160 sites à couvrir dans les deux ans, et chaque année, 700 à 900 nouveaux sites seront concernés. Les 1 160 sites en cours de construction, cela ne va certes pas suffisamment vite, mais il faut comparer au référentiel que j'ai récupéré : 600 zones blanches partout dans le pays !

Lorsque le new deal a été signé, je n'ai pas fait comme auparavant. Il faut voir comment cela se faisait : on se mettait d'accord avec les opérateurs et on disait, la main sur le coeur : mes bonnes dames, mes bons messieurs, on vous demande de couvrir. L'État avait lui-même organisé un système qui faisait que les opérateurs n'avaient aucun intérêt à construire. C'est pour cela qu'il fallait changer de paradigme et que nous avons fait le new deal. Deuxièmement, il n'y avait aucun moyen de contrôle. Troisièmement, on ne disait pas aux opérateurs que le pylône devait marcher, on leur demandait seulement de construire un pylône. Quatrièmement, on réclamait aux opérateurs de construire un pylône, mais c'est la collectivité qui le payait. Résultat : on a couvert 100 zones blanches sur les 600 officielles, autrement dit rien du tout.

Quand j'ai signé le new deal, j'ai demandé que tout soit fait sous les auspices de l'ARCEP, avec des sanctions très fortes. Je le dis très fermement à tous les opérateurs, qui connaissent ma position : si les objectifs sur les 485 sites de la zone concernée d'ici à juin 2020 ne sont pas atteints, je serais extrêmement vigilant pour que les sanctions soient appliquées à la hauteur de ce que prévoit le new deal. Je l'ai dit très clairement aux opérateurs : j'ai été ferme durant les négociations, et je le serai tout autant dans la réalisation. C'est pour cela qu'on a réussi le déploiement de la 4G sur le numérique. Nous serons très fermes concernant les zones blanches, et c'est une bonne chose que l'ARCEP ait déjà procédé à des mises en demeure. Si, le 30 juin 2020 les résultats ne sont pas là, elle devra appliquer des sanctions puisqu'elle est indépendante. Vous voyez la transparence dont je fais preuve concernant les chiffres que je vous donne. Je serai très ferme : il faut que les sanctions soient appliquées telles qu'elles sont prévues dans le new deal, ni plus ni moins. Je le dis très clairement à tous les opérateurs.

Comment faire pour accélérer ? La méthode connaît un énorme changement : dans le new deal, j'ai voulu que les collectivités choisissent les localisations avec les équipes projets. Je salue les équipes projets et les parlementaires qui les fréquentent parce qu'ils en ont compris l'importance, à l'instar du président Vigier. Auparavant, les opérateurs travaillaient dans leur coin ; maintenant, les quatre-vingt-douze équipes projets couvrent le territoire. J'entends la remarque selon laquelle les maires n'y sont pas suffisamment associés. La loi peut-elle régler ce problème ? Je pense qu'il faut aller plus vite : je propose que mes équipes transmettent à la représentation nationale, avant la fin du mois de février, un état des lieux de la consultation des maires concernés par les 485 sites. Si des maires n'ont pas été consultés, au moins nous le saurons et les équipes projets correspondantes les consulteront. Je demande à mes collaborateurs d'indiquer à tous les parlementaires concernés par les équipes projets, avant la fin du mois, si, oui ou non, les maires ont été consultés par les opérateurs. Si ce n'est pas le cas, cela devra être fait, notamment dans le cadre de la réunion que je me suis engagé à tenir avant la fin du mois de février.

J'ai une divergence d'appréciation concernant le financement, qui explique mon avis défavorable sur la proposition de loi. Je n'ai toutefois pas besoin de démontrer que j'avance totalement dans le même sens. Je vous remercie de m'aider à vous aider à vous-même aider les Français en améliorant la situation.

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