Intervention de Fabien Roussel

Séance en hémicycle du lundi 6 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel :

Ne soyons pas naïfs. Arrêtons de faire des cadeaux sans rien demander en contrepartie, de donner de l'argent public sans jamais rien réclamer en retour. Si les grandes entreprises, fortes des milliards d'euros de dividendes engrangés en quelques années, peuvent apporter 4,5 milliards d'euros en quelques jours, elles peuvent le faire tous les ans !

Au-delà de cet aspect, pérenniser le dispositif, c'est en garantir l'efficacité. Pourquoi, monsieur le ministre ? Parce que, en l'appliquant, comme vous le faites, pour une seule année, en l'occurrence 2017, il est à craindre que ces grands groupes ne procèdent à des arbitrages comptables permettant de minorer leur contribution. Les services comptables des grands groupes sont très probablement déjà au travail pour identifier les possibilités de diminuer au maximum le montant à régler à l'État. On sait, par le jeu de provisions ou d'écritures comptables, que c'est faisable. Nous n'avons pas affaire à des enfants de choeur.

En tant que responsables politiques, nous ne pouvons être naïfs. Ce seul argument doit nous convaincre, mes chers collègues, d'inscrire la proposition du Gouvernement dans le temps long, sur plusieurs années. Rappelons à nos concitoyens que l'optimisation, la fraude et l'évasion fiscales nous coûtent chaque année entre 60 et 80 milliards d'euros, soit l'équivalent de notre déficit budgétaire annuel.

Les Panama papers, les Luxleaks et maintenant les Paradise papers sont autant de scandales qui choquent nos concitoyens. Vous ne pouvez plus vous payer de mots sur ces sujets. Il est urgent, pour la France et les pays concernés, d'agir fermement, résolument, en y consacrant les moyens appropriés.

Quand les délinquants en col blanc et les fraudeurs seront-ils enfin condamnés, et avec fermeté ? Quand le verrou de Bercy va-t-il enfin sauter ? Quand pourrons-nous imaginer – pourquoi pas ? – la création d'un conseil de sécurité de la finance au sein des Nations unies ?

Si nous voulons conserver et développer notre modèle de société, c'est-à-dire répondre aux vrais besoins de nos concitoyens en matière de santé, de logement, d'emploi, et d'éducation, il est vital de mettre en place une fiscalité équitable, en vertu de laquelle chacun – entreprise comme citoyen – contribue à la juste proportion de ses capacités.

Outre la pérennisation de la contribution, nous pourrions envisager son extension aux entreprises dont le chiffre d'affaires dépasse 500 millions d'euros, ce qui nous permettrait de dégager les ressources nécessaires pour financer une partie des 5 milliards restants.

Mes chers collègues, monsieur le ministre, il reste une zone d'ombre, majeure, dans ce dossier, que nous avons commencé à aborder en commission et sur laquelle nous attendons des explications : les intérêts dus.

D'après les estimations dont nous disposons, sur les 10 milliards d'euros à régler au titre du contentieux lié à la contribution de 3 % sur les dividendes, les intérêts représentent 1 milliard d'euros : 9 milliards d'euros sont ainsi dus à titre principal et 1 milliard au titre des intérêts, soit 11 % d'intérêts. À l'heure où les taux d'intérêt sont si bas, ce taux usurier est une honte, un vol, une escroquerie, le casse du siècle pour les grands groupes qui, à ce prix-là, ont fait le meilleur placement financier de ces vingt dernières années !

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