Intervention de Jean-Paul Mattei

Séance en hémicycle du lundi 6 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Mattei :

Comme j'ai eu l'occasion de le dire en commission des finances : à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Après une présentation du texte jeudi dernier en Conseil des ministres et un examen en commission vendredi, au moment même où différentes missions budgétaires étaient discutées en commission élargie et en séance, nous examinons aujourd'hui ce texte nécessaire à l'équilibre budgétaire des années 2017 et 2018.

Il est nécessaire, et même capital, pour notre équilibre budgétaire et notre sortie programmée de la procédure de déficit excessif. Le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, vous le savez, monsieur le ministre, est particulièrement attaché à cet objectif, qui nous permettra de retrouver notre voix en Europe. Nous n'aurions jamais dû entrer dans ce processus de déficit excessif et nous soutenons donc sans réserve cette volonté du Président de la République et du Gouvernement d'en sortir enfin.

Ce premier projet de loi de finances rectificative pour 2017 prévoit donc la mise en place de deux contributions additionnelles exceptionnelles à l'impôt sur les sociétés pour assurer le maintien du déficit public sous les 3 % du PIB. Cette décision, cela a été dit maintes fois, fait suite à la décision de la Cour de justice de l'Union européenne du printemps dernier et, surtout à celle du Conseil constitutionnel du 6 octobre de censurer intégralement la contribution de 3 % sur les dividendes mise en place dès 2013. Qu'une taxe qui a été votée en 2012 – et à laquelle le Conseil constitutionnel n'avait rien trouvé à redire à l'époque – et qui a produit près de 10 milliards d'euros en moins de cinq ans puisse être jugée inconstitutionnelle après tant de temps laisse un peu perplexe – cela a déjà été dit maintes fois.

Il n'en demeure pas moins que c'est au gouvernement actuel d'assumer les faits et de trouver des solutions pour ne pas enrayer la machine que les textes budgétaires en cours d'examen ont façonnée. Face à ces circonstances exceptionnelles, qui prennent la forme d'un remboursement de près de 10 milliards d'euros, répartis de manière équitable sur 2017 et 2018, la réponse du Gouvernement est à la fois forte et courageuse : forte, car elle intervient moins d'un mois après la décision du Conseil constitutionnel – qui, à mon sens, n'était pas forcément prévisible – , le temps de prévoir un dispositif assurant pas moins de 5 milliards d'euros de recettes dès 2017, dans un cadre juridique solide ; courageuse, car, dans une telle situation, il n'y avait pas de solution idéale.

Pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, la proposition du Gouvernement est celle qui paraît la plus juste et la plus adaptée. Il faut assumer ensemble le fait que les entreprises qui paieront ne seront pas forcément celles qui seront remboursées – en tout cas, pas dans les mêmes proportions. Cette taxe n'est peut-être pas idéale, c'est vrai, mais elle est calibrée de telle façon qu'elle sera acceptable pour les redevables et ne mettra pas en péril les entreprises.

Vous avez, monsieur Carrez, soulevé le problème des sociétés qui auront distribué des dividendes et qui n'auront pas investi. Je ne vous ferai pas l'injure de vous expliquer la technique de l'amortissement, qui vient un peu atténuer le bénéfice. Si nous sommes techniciens, soyons-le jusqu'au bout. Cette mesure, disais-je, est acceptable et ne mettra pas en péril les entreprises, d'autant que certains amendements, qui devraient être acceptés, corrigeront les effets de seuil.

Nous souhaitons saluer une nouvelle fois le Gouvernement pour sa volonté de concertation avec les acteurs concernés, car je crois, monsieur le ministre, que vous avez beaucoup consulté. Efficacité, justice et concertation sont les piliers de l'action de notre majorité.

Notre groupe souhaite cependant appeler l'attention du Gouvernement et du Parlement sur deux points. Tout d'abord, la procédure budgétaire, telle qu'elle existe aujourd'hui, montre ses limites. Concevoir une taxe, ou même une loi, au détour d'un amendement déposé à la hâte et examiné seulement en séance, cela ne permet ni au Gouvernement de s'assurer de la solidité du dispositif proposé, ni au Parlement de jouer son rôle de contrôle et de proposition.

Par ailleurs, l'examen du texte dans un délai contraint fait que certains collègues devraient se trouver au même moment en commission des finances, en commission élargie, en séance, voire dans leur circonscription. Et que dire, enfin, de l'examen en séance jusqu'au milieu de la nuit ou le week-end, ce qui ne favorise ni la lucidité ni la sérénité des débats !

Des travaux sont en cours sur ce sujet, mais nous insistons ici sur l'importance d'être ambitieux, pragmatiques et concrets dans la rénovation du fonctionnement de notre assemblée, comme le disait tout à l'heure M. Carrez.

D'un point de vue budgétaire, ce projet de loi de finances rectificative, couplé à l'impact de la bascule du CICE en baisse de cotisations, ne prévoit une baisse significative du déficit public qu'en 2020, après une baisse de 2,9 % en 2017, 2,8 % en 2018 et 3 % en 2019, malgré une croissance qui s'accélère en 2017 et plusieurs réformes sectorielles d'ampleur. Cette trajectoire nous demande de maintenir au moins jusqu'en 2020 une maîtrise rigoureuse des finances publiques, tout en poursuivant la transformation annoncée dans le programme présidentiel autour des axes « Libérer » et « Protéger ».

Notre groupe, monsieur le ministre, sera particulièrement attentif à ces exigences. Malgré ces deux questions en suspens, qui trouveront leur réponse au cours de nos travaux, je vous confirme que le groupe du Mouvement démocrate et apparentés apportera son plein soutien à ce projet de loi de finances rectificative.

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