Intervention de Jacques Rosine

Réunion du lundi 1er juillet 2019 à 14h05
Commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de guadeloupe et de martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires

Jacques Rosine, responsable de la délégation de Santé publique France aux Antilles :

Santé publique France est chargée de la surveillance de l'état de santé de la population et de l'évaluation des risques à laquelle cette population est exposée, évaluation qui porte à la fois sur les agents infectieux et chimiques et sur les pathologies. C'est dans ce cadre qu'a travaillé la cellule d'intervention en région (Cire) Antilles-Guyane, créée en 1997, aujourd'hui cellule régionale de Santé publique France aux Antilles.

En vertu de sa mission de surveillance, la cellule s'est penchée sur le cas de l'exposition à la chlordécone dès 2000-2001, la contamination de certains aliments et de l'eau ayant été avérée à la fin des années quatre-vingt-dix et au début des années deux mille. Des études ont ainsi été menées en 2003-2004 pour estimer l'exposition indirecte, via l'alimentation, de la population à ce pesticide ; il s'agit de l'étude sur la santé et les comportements alimentaires (ESCAL) en Martinique et de l'étude sur les comportements alimentaires dans le sud Basse-Terre (CALBAS) en Guadeloupe. Ces travaux ont été complétés par les enquêtes dites Reso entre 2005 et 2007 qui ont mesuré le niveau de contamination d'un échantillonnage d'aliments issus de la terre et de la mer et collectés à la fois sur les marchés et sur des sites plus informels. C'est sur la base de ces différentes études et avec l'appui de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) que nous avons pu établir les premières valeurs toxicologiques de référence.

En 2009, avec la mise en place du premier plan chlordécone, l'Institut de veille sanitaire (InVS) – l'agence Santé publique France n'avait alors pas encore été créée – a été chargé du secrétariat du conseil scientifique constitué dans le cadre d'une des actions du plan. Pendant plus d'une année et demie, nous avons travaillé en lien avec ce conseil sur l'expertise en termes de surveillance sanitaire et sur les recherches complémentaires à mettre en oeuvre. C'est à partir des recommandations de ce conseil scientifique qu'un certain nombre d'actions complémentaires ont été décidées pour évaluer le risque d'exposition de la population. Ont notamment été créés le registre des cancers de Guadeloupe – le registre des cancers de Martinique existait depuis 1983 – pour disposer de données sur l'incidence et la prévalence de cette pathologie, le registre de malformations congénitales et un centre de toxicovigilance initialement installé au centre hospitalier de Basse-Terre.

Plus récemment, l'enquête Kannari, que nous avons menée avec plusieurs partenaires – l'ANSES, les agences régionales de santé (ARS) et les observatoires régionaux de santé (ORS) – a permis de déterminer pour la première fois l'imprégnation à la chlordécone de la population générale, et non plus seulement de populations spécifiques, comme dans les études de Luc Multigner et de son équipe. Les résultats, publiés récemment, ont montré que plus de 90 % de la population en Guadeloupe et en Martinique présentait une imprégnation à la chlordécone avec une moyenne des niveaux d'imprégnation de l'ordre de 0,13 microgrammes par litre, 5 % de la population présentant par ailleurs des niveaux relativement élevés. Je vais laisser la parole à ma collègue sur le sujet des travailleurs de la banane.

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