Intervention de Norbert Ifrah

Réunion du lundi 8 juillet 2019 à 9h30
Commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de guadeloupe et de martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires

Norbert Ifrah, président de l'Institut national du cancer (INCa) :

Plusieurs études statistiques, une seule étude statistique ne suffisant pas habituellement, et plusieurs études biologiques explicatives. Par exemple, la chlordécone fonctionne un peu comme un oestrogène ; c'est ce que l'on appelle un « oestrogène like ». Il se trouve que les oestrogènes, en tout cas les anti-androgènes, constituent un traitement du cancer de la prostate. Sur le plan biologique, cela reste un peu mystérieux pour moi : comment ce qui est habituellement un traitement pourrait-il être le déclencheur ? Je fais surveiller de très près l'incidence des cancers du sein à la Martinique et à la Guadeloupe, parce que je comprends le lien avec les oestrogènes ; mais je ne comprends pas, biologiquement, le lien avec le cancer de la prostate. Tous les travaux biologiques présentés au colloque de la Martinique donnaient des résultats complètement différents d'un essai à l'autre. À ce jour, je n'ai pas trouvé d'explication biologique et personne au sein du colloque n'est parvenu à établir un modèle biologique cohérent.

En revanche, même si le nombre de cancers du sein en Martinique et en Guadeloupe est inférieur de 40 % à celui de l'Hexagone, je le fais surveiller de très près, sur la durée, en finançant des registres. Sur le plan intellectuel, il y a un doute, mais nous n'avons pas de réponse.

Qu'on ne se trompe pas : l'étude Multigner est la meilleure étude possible. Évoquer ses limites d'interprétation ne remet pas en cause la qualité de cette étude, qui est la plus grande étude cas-témoins existant à ma connaissance. À mon avis, il serait cohérent que le Centre international de recherche sur le cancer classe le chlordécone en 2A mais, étant celui qui demande, je ne serai évidemment pas au tour de table de la décision : c'est un jury extérieur qui décidera.

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