Intervention de Malcom Ferdinand

Réunion du mercredi 25 septembre 2019 à 17h25
Commission d'enquête sur l'impact économique, sanitaire et environnemental de l'utilisation du chlordécone et du paraquat comme insecticides agricoles dans les territoires de guadeloupe et de martinique, sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de leur autorisation et évaluant la nécessité et les modalités d'une indemnisation des préjudices des victimes et de ces territoires

Malcom Ferdinand, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) :

À qui profitait le chlordécone ? Les producteurs de bananes et, plus largement, les utilisateurs du chlordécone ont dit à plusieurs reprises qu'il n'y avait pas d'autres solutions avant 1968. C'est faux. Le charançon est présent dans les bananeraies depuis 1900 et des moyens agroécologiques de lutte ont été développés en Jamaïque en 1912, au Cameroun ou à Madagascar. C'est donc bien l'appât du gain et la volonté d'aller plus vite qui ont favorisé l'utilisation de cette molécule. D'ailleurs, aujourd'hui, on procède bien comme par le passé, en mettant un piège entre les rangées… L'utilisation du chlordécone n'était absolument pas une nécessité.

De la même façon, quand on indique qu'au début des années quatre-vingt, à cause des cyclones, la population de charançons s'est développée et que l'on a été obligé d'utiliser le chlordécone, c'est faux ! C'est un choix technique, qui favorisait très clairement des intérêts financiers, mais qui bafoue la santé des Antillais.

À qui profite le chlordécone ? La commission d'enquête a déjà établi une chaîne de responsabilité. Une chose est sûre, les États-Unis et la France n'habitent pas dans deux mondes ou sur deux terres différentes. Les distributeurs, producteurs et utilisateurs du chlordécone savaient très bien comment communiquer avec les États-Unis pour l'acheter ; ils pouvaient donc aussi être informés des raisons pour lesquelles ces derniers ont interdit la fabrication et la vente de ce produit. Dans les archives que j'ai retrouvées, dès septembre 1975, on constate que des réunions se sont tenues aux États-Unis entre l'usine américaine et l'un de ses clients, allemand.

Dès mars 1976, l'Agence de l'environnement, par la voix de l'un de ses responsables, exprimait l'intention d'informer tous les pays des Nations unies de la dangerosité de cette molécule.

Il aurait donc été possible d'agir autrement, mais un choix chimique a été fait, qui favorisait les intérêts de quelques personnes, au mépris à la fois de la santé publique, et de l'environnement.

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