Intervention de Raphaël Schellenberger

Réunion du mercredi 4 mars 2020 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRaphaël Schellenberger :

Les deux techniques d'immobilisation dont nous discutons sont parfois utilisées en dernier recours, dans des situations bien spécifiques, par nos forces de l'ordre. L'encadrement de ces pratiques est rigoureux et a été précisé par l'instruction générale de la direction générale de la police nationale du 4 novembre 2015. Les principes de nécessité et de proportionnalité pour l'emploi des moyens de contention y sont consacrés. Les règles d'emploi, notamment durant le transport de la personne en état de forte agitation, sont précises. Si le transport est effectué par véhicule léger, il peut être recouru au pliage ventral – une compression momentanée de la partie supérieure du torse effectuée sur une personne en position assise. Cette technique ne peut être justifiée que par l'urgence opérationnelle, doit demeurer strictement exceptionnelle et se limiter à quelques secondes. À bord d'un véhicule de type fourgon, le transport doit être obligatoirement effectué en position couchée sur le dos. Les policiers intervenants sont tenus de faire examiner par un médecin, le plus rapidement possible, la personne interpellée lorsqu'il a été fait usage de la force pour contenir son état d'extrême agitation.

Le recours à ces techniques d'immobilisation est donc strictement encadré et ne saurait intervenir que pour maîtriser une personne en état de forte agitation, refusant son interpellation ou son transport par les forces de l'ordre. Le cadre étant strict, tout dérapage hors de ses limites doit être sanctionné.

Le respect de ces règles par tous doit nous éviter de jeter l'opprobre sur une profession, sur ces femmes et ces hommes qui s'engagent à nous protéger dans des conditions de plus en plus difficiles, faisant face à une montée des violences à leur égard. L'an passé, 36 000 faits de violences contre les forces de l'ordre ont été commis, en augmentation de 4 % par rapport à 2018 ; 6 760 policiers ont été blessés, 10 sont morts. En 2019, on a recensé 28 849 cas d'outrage et rébellion contre les forces de l'ordre, en augmentation de 122 % par rapport à 2018.

Face à la multiplication de ces actes, il y a urgence à agir pour soutenir nos policiers et gendarmes. Le Gouvernement doit accorder plus de moyens et de considération à ceux qui protègent quotidiennement les Français. Notre politique pénale doit évoluer pour que les forces de l'ordre cessent de retrouver dans les rues les délinquants qu'elles ont arrêtés la veille au même endroit. Davantage de places de prison doivent être construites pour que notre politique pénale ne soit plus dictée par nos capacités carcérales, mais permette le plein respect des lois de la République et l'affirmation de l'autorité de l'État. Voilà l'immense défi pour faire reculer la violence.

Avec ce texte, La France insoumise cherche simplement à questionner le fondement même de la République : l'exercice légal de la violence légitime. En remettant ce principe en cause, vous cherchez à remettre en cause l'État de droit. L'interdiction des techniques d'immobilisation, qui sont déjà largement encadrées, se heurte au principe de réalité. Si elle venait à être appliquée, elle exposerait encore davantage nos forces de sécurité aux violences inadmissibles qu'elles subissent. Le mémento de la gendarmerie permet exactement les mêmes pratiques que les directives de la police, comme l'a signalé notre collègue Fauvergue.

Chercheriez-vous, monsieur le rapporteur, à ouvrir une forme de guerre des polices ? Cela ne nous étonnerait pas de la part d'un élu de La France insoumise qui a tout intérêt à semer la zizanie au sein de l'État. Le groupe Les Républicains est opposé à l'adoption de cette proposition de loi inadaptée aux défis d'ordre public et de sécurité qui nous font face, et qui est principalement destinée à remettre en cause les fondements de l'État de droit.

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