Intervention de Fabien Roussel

Séance en hémicycle du jeudi 19 mars 2020 à 16h00
Projet de loi de finances rectificative pour 2020 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel :

À notre tour, nous souhaiterions rendre hommage à tous les salariés qui sont aujourd'hui en première ligne sur le front.

Le confinement est une mesure juste, mais qui mériterait d'être renforcée. Nous pensons en particulier aux salariés qui sont obligés de se rendre à leur travail alors que l'activité qu'ils exercent n'est pas indispensable. Il y a en ce moment même des salariés en colère qui se réunissent pour discuter car ils sont contraints de produire, à Saint-Nazaire, des paquebots, à Valenciennes, des RER, dans le Grand-Est, des rétroviseurs alors qu'aucune de ces productions n'est indispensable à notre pays. Dans le secteur du bâtiment, la même inquiétude s'exprime : les salariés demandent à exercer leur droit de retrait et à pouvoir rester chez eux. Il faut leur en donner la possibilité. C'est aussi une mesure d'urgence pour la santé publique.

Nous soutiendrons le projet de loi de finances rectificative car les mesures qu'il comporte vont dans le bon sens. Il reste néanmoins bien insuffisant au regard des attentes du monde économique et les salariés. Il concerne essentiellement le premier, pour les seconds, le projet de loi examiné demain prévoit plusieurs mesures.

Tous les salariés devraient bénéficier du même traitement, autrement dit percevoir 100 % de leur salaire lorsqu'ils sont contraints de rester chez eux. Ce n'est malheureusement pas le cas. Entre les fonctionnaires qui sont assurés de toucher l'intégralité de leur salaire, les salariés gardant leurs enfants qui sont pris en charge par l'assurance maladie et ceux qui bénéficient du chômage partiel, les différences de traitement sont importantes. Ces inégalités sont injustes.

Permettre à tous les Français de recevoir 100 % de leur salaire et de leur traitement, c'est aussi garantir le pouvoir d'achat de centaines de milliers d'hommes et de femmes qui recommenceront certainement à consommer dès que la crise sera finie. Nous en aurons besoin pour relancer l'économie de notre pays.

La perte totale d'exploitation pour les entreprises – TPE, PME, commerces – devrait être mieux prise en compte. Ainsi, les dépenses fiscales et sociales devraient être non pas seulement reportées mais annulées.

Nous souhaitons appeler votre attention sur les associations – culturelles, de l'économie sociale et solidaire – qui, toutes, souffrent au même titre que les entreprises. M. Darmanin a annoncé que les associations pourraient recourir au chômage partiel. Mais qu'en est-il des charges sociales et de leurs dépenses ? Les associations pourront-elles bénéficier des mêmes dispositions que les entreprises ? Je pense, en particulier, aux associations d'aide à domicile dont les salariés sont en première ligne aujourd'hui. Les difficultés qu'elles connaissaient déjà risquent de s'aggraver encore.

Nous proposons également de décaler d'un ou deux mois les échéances des prêts que les entreprises ont contractés pour financer leur matériel ou leurs locaux.

Vous affirmez que les banques devront jouer pleinement leur rôle grâce à la garantie des crédits par l'État à hauteur de 300 milliards. Nous craignons que celles-ci n'assument pas ce rôle. En témoigne le fait que l'Autorité des marchés financiers a dû interdire les ventes à découvert, outil spéculatif utilisé par les traders pour profiter de la crise que nous vivons. Il faudra contraindre les banques à jouer leur rôle de prêteur aux entreprises qui en auront besoin. Nous vous proposerons des mesures en ce sens

Concernant la Banque centrale européenne, qui, une fois, encore rachète des dettes, il serait temps qu'elle injecte des liquidités l'argent directement auprès des États, des entreprises et des ménages pour que de l'argent frais vienne irriguer l'économie. La BCE pourrait au minimum prêter à taux zéro aux États.

Au travers votre projet de loi, ce sont en réalité, 6,25 milliards qui sont déboursés par l'État. Cette somme est trop faible. Espérons qu'il ne s'agit que d'un début puisque d'évidence, il faudra aller plus loin.

Monsieur le ministre, vous indiquez que 2 milliards seront débloqués pour les hôpitaux. Mais où se trouve cette somme ? Comment les hôpitaux pourront-ils en bénéficier ? Ceux-ci engagent des dépenses sans savoir jusqu'où ils pourront aller. Le Président de la République a dit « quoi qu'il en coûte », tout le monde répète cette formule, sans savoir ce que cela signifie exactement.

Enfin, la solidarité nationale est importante – ce sont les dépenses publiques engagées par l'État pour faire face à la crise, mais nous souhaiterions qu'il soit fait appel à la solidarité de toute la société – les assurances, les grandes fortunes, les ménages les plus aisés – chacun doit mettre au pot.

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