Intervention de Jean-Christophe Lagarde

Séance en hémicycle du mardi 28 avril 2020 à 15h00
Déclaration du gouvernement relative à la stratégie nationale du plan de déconfinement dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19 suivie d'un débat et d'un vote — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Christophe Lagarde :

Au-delà des drames et des contraintes que les Français vivent depuis maintenant plusieurs semaines, un des aspects les plus terribles de l'épidémie qui s'est abattue sur le monde, c'est que chacune et chacun d'entre nous est amené, dans chaque geste de la vie quotidienne, à faire face à sa propre mort. Nous savons certes que nous quitterons un jour cette terre, mais quand toucher ce micro devient dangereux comme l'obligation de son nettoyage après chaque orateur – ce dont je remercie le président – nous le rappelle, c'est autre chose. À chaque moment, chaque Français sera pendant encore plusieurs mois obligé de se demander comment protéger et protéger ses proches.

Il peut paraître bizarre de commencer ainsi une explication de vote mais il s'agit de ce que sont en train de vivre, non seulement notre peuple, mais tous les êtres humains. Ce n'est pas rien s'agissant des changements de nos attitudes mais c'est énorme s'agissant de la capacité d'un peuple à retrouver non pas même sa vie d'avant, mais une vie supportable et acceptable. C'était, monsieur le Premier ministre, toute la difficulté du discours que vous aviez à prononcer aujourd'hui : sortir de cet état de peur, pour ne pas dire de trouille, accepter notre condition d'être humain dans sa fragilité mais aussi, vous l'avez dit à propos du choix entre l'effondrement ou le déconfinement, accepter un risque.

C'est la mesure de ce risque qui fera ou non le succès de ce que vous venez de nous présenter et qui doit se construire dans les semaines à venir entre les chefs d'entreprise et leurs salariés, les maires et les écoles, les élèves et les parents puisqu'ils devront continuer à faire attention une fois revenus de l'école.

La difficulté principale, je l'ai évoquée à la fin de mon intervention tout à l'heure, c'est la confiance. Avons-nous confiance en vous ? Avons-nous confiance les uns dans les autres, non pas ici, mais dans les entreprises, dans les transports ? Pouvons-nous compter sur l'attitude de civisme que vous appelez de vos voeux et qui est évidemment nécessaire ? Je veux dire à ce propos que j'ai été impressionné de voir à quel point nous les Français, qui sommes un peuple parfois indiscipliné, nous avons su faire preuve de discipline, y compris, vous le savez, monsieur le ministre de l'intérieur, dans des départements comme le mien, la Seine-Saint-Denis, si souvent stigmatisés.

Maintenant, il faut redémarrer. Progressivement, intelligemment, prudemment mais redémarrer. Ce redémarrage, vous avez essayé de le dessiner ici.

Comme je l'ai déjà dit, nous ne sommes pas d'accord sur tout. Nous aurions voulu que la territorialisation soit plus accentuée et que les élus locaux aient bien davantage la main, car ce sont eux qui rendront des comptes et non pas les préfets, même si des cinglés multiplient les poursuites judiciaires à l'égard de ces derniers.

J'aurais préféré que nous commencions plus tôt à construire ensemble la confiance qui nous est nécessaire pour survivre sur les plans économique et sanitaire. Vous choisissez de le faire à partir d'aujourd'hui ; nous aurions pu le faire avant ce débat.

Monsieur le Premier ministre, la crise que vous avez à gérer est difficile. Les yeux dans les yeux, je vous dis que peu de gens ici aimeraient être à votre place et que je vous ai trouvé à la fois solide et sincère, y compris dans vos doutes et vos incertitudes.

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