Intervention de Olivier Garnier

Réunion du jeudi 9 avril 2020 à 14h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Olivier Garnier, directeur général des statistiques, des études et de l'international de la Banque de France :

Pour comprendre pourquoi les services sont davantage touchés que l'industrie, il faut regarder à un niveau plus fin : l'impact sur les services est en grande partie lié à la baisse de l'activité dans des secteurs comme celui de la restauration. Pour de tels secteurs, c'est une crise inédite. N'ayant pas de stocks ni de capital à financer, ils ont moins de relations bancaires et moins l'habitude des crédits de trésorerie. De plus, le dispositif de chômage partiel n'avait pas encore été complètement déployé par ces entreprises fin mars : on est passé d'un million à plus de six millions de personnes concernées en quelques semaines.

S'agissant des annonces faites aujourd'hui par la Banque d'Angleterre, le gouverneur a bien précisé qu'il n'était pas question de faire de la monétisation de la dette publique. Il s'agit seulement d'une facilité préexistante, qui permettait à l'État britannique de faire de la trésorerie entre deux émissions de dette publique. Dans le cas de la zone euro, du fait de l'article 123 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui interdit le financement monétaire, la Banque centrale européenne (BCE) n'est pas autorisée à acheter sur le marché primaire. Cependant, elle achète massivement de la dette publique – plus de 1 000 milliards d'euros d'ici à la fin de l'année –, mais ce n'est pas de la monétisation, au sens où il ne s'agit pas d'une augmentation permanente de la masse monétaire qui se ferait sans contrepartie.

Concernant le financement de la dette publique française, le taux à dix ans est à peine positif, et il est négatif sur une bonne partie de la courbe. Cela ne présente pas de difficultés particulières, et les mesures annoncées par la BCE assurent que les conditions de liquidité resteront très accommodantes.

Enfin, sur les questions relatives à l'Europe et à l'Eurogroupe, on a peut-être trop tendance à mettre en évidence ce qui ne fonctionne pas et ce qui divise plutôt que ce qui fonctionne. En l'espèce, des décisions ont été prises très rapidement : le programme de 750 milliards d'euros a été décidé dans la soirée du 18 mars par les gouverneurs des banques centrales. Il est normal qu'au niveau des gouvernements, dont les décisions doivent être validées par les parlements nationaux, les processus prennent plus de temps. Cependant, les dispositifs discutés actuellement au niveau de l'Eurogroupe ne sont pas les plus urgents aujourd'hui. Même si des outils comme le mécanisme européen de stabilité auront besoin d'un soutien politique fort de la part des gouvernements et parlements nationaux, et même si la banque centrale ne doit pas être le seul acteur au front, c'est elle qui traite les questions les plus urgentes.

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