Intervention de Laurence Boone

Réunion du jeudi 9 avril 2020 à 14h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Laurence Boone, cheffe économiste de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) :

L'arrivée d'un vaccin prend beaucoup de temps. On peut espérer en trouver un dans les douze à dix-huit mois qui viennent – ce délai me semble incompressible –, mais ce n'est pas certain. Des tentatives avaient été entreprises au moment du SRAS et du MERS, mais elles avaient été abandonnées face au reflux des épidémies. Pour envisager la sortie de crise et du confinement, mieux vaut compter sur d'autres mesures sanitaires que sur l'existence d'un vaccin, qui demeure à ce stade largement hypothétique.

Sur la question de la coordination, je suis en désaccord avec Jean-Luc Tavernier et Olivier Garnier. Il y a un très gros problème de coordination non seulement avec les pays moins avancés mais aussi en Europe. Certains ont annoncé leur stratégie de déconfinement de leur côté, mais ils seront peu avancés s'ils sont seuls à le faire : les chaînes de production et la mobilité des travailleurs demeureront bloquées. C'est un mauvais signal qui est ici envoyé ; il témoigne d'une absence de coordination des pays européens sur les mesures de quarantaine et de sortie du confinement. L'enjeu de coordination est, du reste, encore plus important au niveau international et multilatéral, car cette crise épidémique touche tout le monde. À ce stade, on ne fait pas beaucoup, sur le plan sanitaire, pour les pays qui ont des systèmes de santé moins bien pourvus que les nôtres. Or si le virus se maintient en dehors de chez nous, il finira nécessairement par revenir sur notre territoire.

En matière budgétaire, de nombreux pays ont pris toute une série de mesures qui se ressemblent. Le site web de l'OCDE propose une carte représentant les mesures de confinement et de politique économique qui ont été prises dans chaque pays. C'est un outil intéressant pour comparer les situations et s'inspirer les uns des autres. L'exigence de coordination internationale sera surtout importante en sortie de crise, pour éviter de répéter les erreurs de 2008. Au lieu que chaque pays européen se mette à soutenir excessivement son industrie automobile, on pourrait espérer que ces pays incitent celle-ci à devenir plus propre, quitte à ce que le redémarrage s'en trouve retardé. La manière dont la crise a été abordée au niveau de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) rend bien compte de l'importance des tensions en matière de coordination internationale. Celle-ci sera sûrement plus rapide pour le soutien aux pays moins avancés, notamment en matière de dette financière.

Enfin, il apparaît nettement que tous les secteurs ne pourront pas être remis au travail à la même vitesse. Je pense, moi aussi, qu'il est très important de maintenir les chaînes logistiques d'approvisionnement, notamment dans le secteur de la santé. En revanche, le secteur du tourisme, en particulier l'hôtellerie et la restauration, risque de reprendre plus tardivement. Ce sera peut-être l'occasion de raffiner les mesures de politique économique qui ont été mises en place, par exemple à travers la réallocation des mesures de chômage partiel ou l'introduction de davantage de flexibilité dans les divers dispositifs.

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