Intervention de Danièle Obono

Réunion du vendredi 20 mars 2020 à 15h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Je n'aime pas la métaphore de la guerre : la situation actuelle ne s'y prête pas car nous avons davantage besoin d'apporter du soin que de faire la guerre. Mais si on l'utilise, encore faut-il prendre en compte les réalités historiques : au sortir du second conflit mondial qui a secoué notre pays, il a fallu reconstruire tout un pays et une force de travail, malgré des générations dévastées. Tous et toutes montraient la volonté d'une unité, comme l'atteste le gouvernement constitué par le Conseil national de la Résistance. Or qu'avons-nous vu ? Des grèves, des mobilisations sociales, un rapport de force. Tant il est vrai que l'unité et la cohésion pour faire front, ensemble, à une situation particulière, en l'occurrence au confinement et au soutien aux services hospitaliers n'annihilent pas les rapports de force sociaux. Nous en avons débattu tout à l'heure, en évoquant ceux qui doivent se rendre sur leur lieu de travail, parce qu'ils ne peuvent pas télétravailler. Il y a bien là une question de classe.

Il est donc faux de penser que défendre l'intérêt général, commun à tous, annihile les rapports de force sociaux. Les dispositions que vous introduisez, avec ces habilitations et votre remise en cause du droit du travail, traduisent une vision sociale et l'idée que le dialogue social vient du rapport de force. La négociation a lieu car les salariés peuvent se mobiliser. Aujourd'hui, une telle mobilisation est possible sur les lieux ouverts car les salariés commencent à se mettre en grève, en refusant de travailler dans de telles conditions. Autrement, aucun rapport de force ne conduirait à une négociation.

C'est ainsi, camarade Courson, vous le savez très bien, que les choses se sont passées dans l'histoire du XIXe et du XXe siècles, et qu'elles se déroulent au XXIe siècle. Cela ne signifie pas que nous n'avons pas la volonté de faire société, ou de défendre certains droits, mais c'est la réalité des rapports de force. Prétendre que cela n'existe pas et faire passer ces ordonnances est une erreur, car vous remettez en cause la volonté commune d'avancer ensemble. Dans tous les cas, cela ne se passera pas de cette manière au sortir de l'épidémie.

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