Intervention de Annick Girardin

Réunion du mardi 14 avril 2020 à 17h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Annick Girardin, ministre des outre-mer :

Dans le cadre de cette crise sans précédent qui frappe notre pays, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous préciser la situation des outre-mer et de vous décrire l'organisation que nous avons mise en place pour lutter contre la pandémie du coronavirus, à un moment important, puisque le conseil scientifique a rendu un avis consacré spécifiquement aux outre-mer la semaine dernière.

Aujourd'hui, 1 101 cas avérés de personnes contaminées par le Covid-19, 440 personnes guéries et 21 décès sont dénombrés dans les départements et régions d'outre-mer. Nous devons comparer ces chiffres à ceux de l'Hexagone sans oublier que la vague épidémique sera décalée dans le temps puisque la stratégie mise en place jusqu'à aujourd'hui tendait à retarder la circulation du virus dans nos territoires. Des mesures ont été prises très rapidement à cette fin : dès le 17 mars, nous avons interdit aux croisiéristes de faire escale dans nos eaux ; le même jour, les mesures de confinement ont été prises, comme dans l'Hexagone, dans tous les territoires ultramarins alors qu'ils ne recensaient que 61 cas de personnes contaminées. Comme le conseil scientifique le relève dans son rapport, ces décisions ont permis de ralentir la progression de l'épidémie.

La situation en outre-mer varie grandement d'un territoire à l'autre, d'un bassin à l'autre. Les décisions ont été prises par les préfets, en lien avec les élus, afin de répondre aux spécificités de chaque territoire, certains étant marqués par une forte ampleur de l'épidémie, d'autres par sa faiblesse. En revanche, nous avons restreint de manière homogène les entrées sur les territoires en réduisant drastiquement les vols. Aujourd'hui, seuls les passagers en mesure de fournir un motif impérieux de déplacement peuvent voyager. Cette mesure a été couplée à une quatorzaine imposée systématiquement à toutes les personnes arrivant en outre-mer, simplement à leur domicile dans certains territoires, en « domicile plus » au sein de structures collectives, dans d'autres. Ces mesures ont été mises en place en fonction des structures que nous avons pu mobiliser.

Parallèlement, nous avons pris des mesures renforcées de confinement, parfois plus restrictives que dans l'Hexagone. Un couvre-feu a ainsi été entièrement instauré en Martinique, en Guadeloupe, en Guyane, à Mayotte et en Polynésie-Française. Sur l'île de La Réunion, il ne concerne que la commune de la Possession.

Je salue le civisme de nos compatriotes ultramarins qui, dans leur grande majorité, ont respecté les mesures de confinement et de distanciation ainsi que le couvre-feu alors que 13 % d'entre eux vivent dans des conditions insalubres. Nos concitoyens ont consenti un effort particulier, du fait de leurs conditions de vie difficiles et alors même que la pandémie n'était pas encore largement répandue. Chacun s'est impliqué pour respecter les règles imposées par l'État et les préfets dans les différents territoires.

Nous sortons d'un week-end pascal qui donne lieu, traditionnellement, à de grands rassemblements en outre-mer, notamment aux Antilles. Les traditions n'ont pas pu être respectées cette année et je mesure l'effort collectif consenti par nos compatriotes. Chacun a compris que, pour se protéger, il fallait protéger les autres.

Cette stratégie, axée sur le ralentissement de la propagation du virus et dont le confinement fut la première mesure, a été validée par le conseil scientifique Covid-19, présidé par le professeur Jean-François Delfraissy, dont l'avis a été rendu public vendredi dernier. Il comporte dix recommandations, aujourd'hui toutes reprises par le Gouvernement. Certaines sont déjà en place. D'autres se déploieront progressivement avec les moyens nécessaires à leur mise en oeuvre. La capacité de nos systèmes de soins à faire face à l'épidémie est, depuis le début, une priorité pour l'État, dans l'Hexagone comme dans les territoires ultramarins. Nous devons notamment augmenter la capacité d'accueil dans les services de réanimation grâce à des réorganisations et des reprogrammations menées par les agences régionales de santé (ARS) depuis le début du mois de mars, ainsi qu'à l'acheminement de matériel supplémentaire et aux renforts de personnels.

Le conseil scientifique a recommandé de doubler la capacité d'accueil des hôpitaux en lits de réanimation pour les cas graves de Covid-19. Tout est mis en oeuvre pour atteindre cet objectif, partagé par le Gouvernement. J'ai entendu les inquiétudes des élus des territoires d'outre-mer qui réclament, en particulier, plus de respirateurs. Les premiers ont été livrés et d'autres arriveront dans les prochains jours, progressivement, en fonction des disponibilités nationales. Nous avons maintenu les liaisons aériennes avec tous les territoires.

Quelques chiffres, à présent. La Guadeloupe compte 182 cas déclarés, 33 hospitalisations, 10 décès et 67 guérisons. Dix-sept personnes ont été admises en réanimation et la capacité en réanimation a d'ores et déjà été portée de 33 lits initialement à 43 lits. Nous pourrons aller jusqu'à 75 lits si nécessaire.

La Martinique compte 157 cas déclarés, 47 hospitalisations, 6 décès, 50 guérisons et 16 personnes admises en réanimation. La capacité en réanimation, initialement de 44 lits, a été portée à 46 lits. Nous pourrons aller jusqu'à 94 si nécessaire.

La Guyane compte 88 cas déclarés, 9 hospitalisations, 53 guérisons, une personne en réanimation. La capacité en réanimation, initialement de 11 lits, a été portée à 34 lits. Nous pourrons aller jusqu'à 42 lits en fonction des renforts.

L'île de La Réunion compte 391 cas déclarés, 36 hospitalisations, 199 guérisons, 3 personnes en réanimation. La capacité en réanimation, initialement de 51 lits, a été portée à 80 lits et pourra aller jusqu'à 176 lits si nécessaire.

Mayotte compte 207 cas déclarés, 16 hospitalisations, 3 décès, 67 guérisons et 3 personnes en réanimation. La capacité en réanimation, initialement de 16 lits, a été portée à 58.

Saint-Pierre-et-Miquelon compte un cas avéré. Sa capacité en réanimation, initialement de deux lits, sera portée à 10.

Wallis-et-Futuna ne compte aucun cas déclaré. Sa capacité en réanimation a été portée de 2 à 4 lits et pourra aller jusqu'à 10.

La Polynésie Française compte 53 cas avérés et 3 patients en réanimation pour 40 lits.

La Nouvelle-Calédonie compte 18 cas et un patient en réanimation pour une capacité de 42 lits que l'on pourra porter à 66 en fonction des besoins.

Les services de réanimation ne sont donc pas saturés en outre-mer puisque le taux d'occupation des lits y est inférieur à 50 % et que la capacité d'augmentation de leur nombre est identifiée. L'évolution de l'épidémie nécessitera l'envoi de ressources et de moyens supplémentaires. Concernant l'approvisionnement en masques et en tests, les tensions sont nationales et internationales. Le Gouvernement assure le bon approvisionnement des territoires en fonction des demandes des ARS, relayées par les préfets, au niveau national, auprès du centre de crise sanitaire piloté par le ministère des solidarités et de la santé. La solidarité nationale joue pleinement son rôle, ce qui permet d'affronter cette crise sanitaire de grande ampleur. Nous sommes aux côtés des personnels soignants des outre-mer et de l'Hexagone et nous devons à nouveau les féliciter pour leur mobilisation exemplaire.

S'agissant des tests, le conseil scientifique a émis des recommandations. L'État souhaite rendre systématique les tests à l'entrée et à la sortie de quatorzaine pour les personnes arrivant dans les territoires d'outre-mer. Nous souhaitons également dépister les personnes symptomatiques suspectées d'être malades. Cet objectif suppose de renforcer les capacités en tests de l'ensemble de nos territoires. Nous nous y employons dans un contexte de très forte demande mondiale et nationale.

Concernant les mesures d'isolement, les personnes atteintes de Covid-19 seront désormais isolées, à domicile ou dans un centre qui leur sera proposé selon les conditions d'hébergement du territoire.

Je tiens enfin à saluer à nouveau les soignants mais aussi toutes les forces vives dont la mobilisation permet à notre pays, à nos territoires, de continuer à vivre. Je sais combien nous leur devons. Nous devons les en féliciter, et nous avons encore besoin d'eux.

Nous aurons sans doute l'occasion, au cours de notre échange, d'aborder les sujets de l'éducation ou de l'aide aux entreprises. Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions.

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