Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du vendredi 8 mai 2020 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Article 6

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

Thomas Mesnier l'a très bien décrite, la stratégie que nous allons appliquer vise à casser les chaînes de contamination. Elle n'est pas nouvelle : nous l'avons menée avec succès pendant les stades 1 et 2 de l'épidémie. Souvenez-vous du cas de la station de ski des Contamines-Montjoie, où une famille anglaise présentait des signes de Covid-19. Immédiatement, le « contact tracking » – l'expression n'est pas très belle, on peut parler plutôt de « suivi épidémiologique » – a permis d'identifier plusieurs personnes potentiellement malades : au total, 140 personnes ont été testées, des écoles ont été fermées, les patients ont été hospitalisés, soignés et guéris, et on a éliminé toute possibilité de transmission à d'autres personnes autour. Grâce à cela, il n'y a pas eu de foyer épidémique à ce moment-là aux Contamines-Montjoie. Organisé par les agences régionales de santé, qui ont fait un boulot incroyable, le contact tracking s'est poursuivi pendant plusieurs semaines dans le Grand Est, dans l'Oise, en région parisienne et ailleurs encore sur le territoire. Cela a permis de retarder l'épidémie jusqu'à ce qu'un foyer épidémique dépasse toutes les capacités de détermination des chaînes de contamination, et il s'en est suivi ce que vous savez.

Casser la chaîne de contamination est fondamental. Vous savez comment on fait : on teste, on dépiste, on détecte chez l'entourage, on isole. Plusieurs choses nous manquent pour être pleinement efficaces. Je vais vous dire ce que nous allons faire et ce que nous n'allons pas faire.

Pour effectuer le suivi épidémiologique, nous avons d'abord besoin d'informations sur les personnes concernées. Concrètement, cela se déroule ainsi : vous êtes malade, votre médecin généraliste vous appelle pour une consultation longue et complexe, afin de vous expliquer cette maladie et les conditions d'isolement ; il vous propose des soins de support et du soutien, répond à vos questions, rédige les prescriptions, s'assure que le test sera réalisé et vous en communique les résultats ; éventuellement, il commence à faire du tracking, c'est-à-dire à vous demander avec quelles personnes vous avez été en contact rapproché au cours des jours précédents, il recueille leur nom et leurs coordonnées, non pas pour les ficher, mais pour les appeler. N'importe lequel d'entre vous pourra un jour être appelé par un médecin, lequel lui dira qu'il a été en contact avec une personne malade qui a communiqué ses coordonnées ; il lui demandera s'il présente des symptômes et évaluera avec lui les risques qu'il soit malade ; il le placera alors éventuellement en quarantaine parce qu'il risquera d'avoir contracté la maladie sans le savoir. À cet effet, il nous faut des données : le nom, le prénom, le NIR – numéro d'inscription au répertoire de la sécurité sociale – , la date de naissance, l'adresse, les coordonnées téléphoniques et l'adresse courriel s'il y en a une. Il faut également la liste des personnes qui ont été en contact avec le malade pendant les 48 heures précédant l'apparition des premiers symptômes. C'est le médecin qui s'occupe de faire tout cela, et, comme cela prend du temps, il convient de le valoriser et de l'encourager.

Il y a ensuite le tracking de deuxième niveau, qui intervient lorsque le médecin n'a pas pu tout faire lui-même, par manque de temps ou parce que le patient est hospitalisé. L'assurance maladie fait alors intervenir ses salariés – plusieurs milliers sont disponibles – pour appeler le patient et faire avec lui le tour complet de ses contacts, qui n'aurait pas été exhaustif avec le premier réseau médical. Ces salariés appellent alors chaque cas contact pour procéder aux mêmes procédures de diagnostic, de protection et d'isolement. L'assurance maladie devra effectuer ces opérations sous 24 heures : appeler chacune des personnes contact, les inviter à rester à leur domicile, leur apporter toutes les informations nécessaires et s'assurer qu'elles ont tout le nécessaire. Pour cela, il faut des coordonnées et un fichier.

Du reste, en réalité, nous ne créons pas de fichier, contrairement à ce que M. Coquerel a dit. Il a aussi affirmé n'avoir pas connaissance d'un fichier national contenant des données relatives à la santé. S'il ne le savait pas, je l'informe qu'il en existe plein, …

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