Intervention de Julien Dive

Séance en hémicycle du vendredi 10 novembre 2017 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Conseil et contrôle de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Dive :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mesdames et monsieur les rapporteurs, au nom de mon groupe Les Républicains et peut-être au nom de la représentation nationale, je voudrais commencer par rendre hommage à ces femmes et ces hommes qui, chaque jour, prennent des risques pour faire vivre leur entreprise – grande, petite ou très petite – et maintenir les emplois de leurs salariés. Combien d'entre eux ont vu une partie de leur vie s'effondrer lorsqu'au plus fort de la crise économique de 2008, ils ont dû franchir le seuil du tribunal de commerce, plonger dans le silence les machines de l'atelier ou encore, comme on le dit trivialement, mettre la clé sous la porte.

J'aime à penser que des échecs ou des chutes naissent les rebonds ; encore faut-il en créer les conditions ou les accompagner. Le 22 juin 2009, Le Président de la République d'alors, Nicolas Sarkozy, annonce devant le Parlement à Versailles : « Cette crise doit être pour nous l'opportunité de rattraper nos retards d'investissements, et même de prendre de l'avance. » De là, une commission transpartisane fera naître ce qu'on appelle aujourd'hui le premier programme d'investissements d'avenir. Ce PIA 1 a permis d'allouer 35 milliards d'euros à de nombreux projets de recherche et industriels, des projets territorialement structurants autour d'écosystèmes économiques et de filières à la relance ou en émergence. François Hollande a reconduit le PIA 2 en le dotant de 12 milliards, puis initia en 2016 le PIA 3 en lui fléchant le montant de 10 milliards – ce PIA 3 dont nous parlons aujourd'hui et que vous intégrez dans les 57 milliards du GPI des cinq prochaines années.

Alors qu'entre 2010 et 2016, ce sont donc 47 milliards d'euros qui ont été injectés pour préparer et accompagner les gaps technologiques et industriels de nos entreprises, vous en maintenez 10 milliards pour les cinq prochaines années. N'y aurait-il pas là un manque d'ambition de la part du Gouvernement ? Monsieur le ministre, votre collègue Benjamin Griveaux m'a indiqué en commission élargie que le Gouvernement était en train de ficeler le paquetage d'un fonds de 10 milliards pour l'innovation de rupture et l'industrie 4. 0, construit à partir de la cession de parts d'action. S'il s'agit d'un fonds ad hoc rattaché au GPI que nous étudions en ce moment, je vous demande de bien vouloir nous en préciser l'agenda opérationnel et l'articulation avec le PIA 3.

Je souscris aussi aux propos de votre collègue lorsqu'il évoque, toujours en commission, la nécessité de préparer notre industrie du futur ou industrie 4. 0. J'ai travaillé neuf ans aux côtés de PME et d'ETI dans la construction de projets d'innovation, tant en matière de produits que de processus de production. J'ai constaté la dynamique qui s'opère, j'ai assisté à la naissance de ces fameux rebonds que j'évoquais au début de mon propos. Et l'industrie 4. 0 a déjà commencé. D'ailleurs, j'en profite pour saluer l'effort des régions, ces dernières années, pour moderniser notre industrie en l'encourageant dans l'évolution de son parc, en mettant sur pied des modules d'accompagnement pour faire entrer par exemple le lean manufacturing dans nos usines. C'est aussi cela, l'industrie du futur, et donc la croissance et les emplois du futur.

Mais l'État, lui, ne peut pas avoir un double langage et trahir la pérennité de notre industrie. La valeur ajoutée de cette dernière, son avantage concurrentiel, c'est la recherche, c'est la vitalité de sa politique scientifique, ce sont les investissements engagés depuis tant d'années dans la formation, l'innovation et la robotique. C'est ce qui lui assure son avenir et le rôle de l'État est aussi de protéger ce savoir-faire. Or là, vous pratiquez le double langage : d'un côté, le Gouvernement affirme accompagner l'innovation de nos entreprises, mais de l'autre, il réduit les crédits accordés à la recherche industrielle dans la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Difficile de saisir la logique derrière ces choix, difficile de comprendre à quoi ressemble le soutien du Gouvernement à la compétitivité de nos acteurs ! Aussi, j'aimerais corriger ou du moins relativiser les propos que Mme la rapporteure vient de tenir sur l'accès des PME au PIA. Des appels à projet dédiés, comme celui qui porte le nom d'« Initiative PME », ont été créés pour cela, le CGI recommandant le label d'un pôle de compétitivité. Ces entreprises étaient en position de leaders sur leurs marchés.

Monsieur le secrétaire d'État, la mise en application de ce PIA 3 semble encore inachevée : dans les faits, une large partie des crédits de paiement ne seront ouverts qu'en 2021, il subsiste un épais voile sur la future gouvernance de ce fonds et il en est de même pour l'exécution et l'allocation des crédits du GPI qui absorbe le PIA 3. D'ailleurs le GPI de 57 milliards d'euros tient du plan d'affichage dans lequel la manoeuvre consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul puisque de ces 57 milliards, seuls 24 représentent véritablement de nouveaux crédits. En conclusion, ce plan ressemble de plus en plus à un habile jeu de passe-passe budgétaire, et quand c'est flou c'est qu'il y a un loup ! Pour ces raisons, les députés du groupe Les Républicains ne s'exprimeront pas en faveur de ce projet, tel qu'il est présenté.

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