Intervention de Jean-Luc Mélenchon

Séance en hémicycle du samedi 9 mai 2020 à 18h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Mélenchon :

Il faut considérer ce qui manque à l'appel, ce qui fait défaut et nuira à la cohésion.

Les masques doivent être gratuits. Les pauvres gens font le compte de ce que cela va leur coûter. Comment ferez-vous demain pour savoir si un masque est encore utilisable ou pas – vous ne le savez pas. Les masques doivent être gratuits et distribués par la puissance publique. Nous avons les moyens. Des milliards seront distribués dans notre pays de-ci de-là. Nous pouvons les donner en priorité à la population.

J'en appelle à votre conscience sur la détresse alimentaire. Celle-ci ne se montrera pas ; comme la misère, elle se cache. À Cuba, on envoie les médecins d'une maison à l'autre voir si des gens sont malades. En France, on devrait pouvoir aller d'une barre d'immeuble à l'autre pour voir si des gens ont été oubliés, si parce qu'ils sont handicapés et ne peuvent circuler, ils ne font pas leurs courses. Il faut aller partout pour ne pas abandonner ceux qui aujourd'hui ont faim dans notre pays car c'est une réalité. La carte de la diffusion du microbe recoupe la carte de la pauvreté – c'est désormais un fait établi. Les départements et les rues les plus pauvres sont les plus atteints dans notre pays, à plus forte raison lorsqu'il s'agit d'une île entière. Comment faire pour s'épargner la honte que constitue l'absence d'eau courante à Mayotte ? Comment dire aux habitants de certains quartiers de se laver les mains alors qu'ils ne disposent pas de l'eau courante ? Personne n'a rien fait. De même, en Guadeloupe, cela dure depuis des mois.

Il faut une autorité forte qui tranche, qui impose de faire les choses de telle manière et pas autrement et que tous ceux qui ont à en connaître s'y soumettent immédiatement car l'unité nationale l'exige.

Nous devons aller à la rescousse des plus pauvres parmi lesquels le microbe circule plus. Il faut annuler les frais bancaires ; il faut davantage de planification ; il faut suspendre les loyers. Le ministre chargé du logement, Julien Denormandie, a annoncé la suspension des expulsions jusqu'en juillet – c'est une bonne décision, mais tant qu'à en prendre une, autant prendre la meilleure, c'est-à-dire la suspension des loyers. Pourquoi se limiter aux seules expulsions ? Qui est capable aujourd'hui de réorganiser sa vie quotidienne dans les conditions du confinement ou du déconfinement hasardeux auquel nous participerons.

Je termine par un ultime exemple, les 200 euros alloués aux étudiants. J'en suis sûr, nombreux sont ceux ici qui ont payé eux-mêmes leurs études comme je l'ai fait – je n'en tire pas une gloire particulière. Nous vivions alors grâce à de petits boulots. Vous donnez 200 euros à de jeunes adultes. Mais que fait-on aujourd'hui avec 200 euros ? Rien du tout. Ne nous réconfortons pas en pensant que nous avons fait ce qu'il fallait car nous ne l'avons pas fait.

Il s'est trouvé des gens pour admirer le système allemand, qui semblait magnifique à leurs yeux. Les Allemands sont plus pragmatiques que ceux qui les admirent. C'est la raison pour laquelle ils ont décidé de procéder à des reconfinements. Pourquoi ? Sans jouer les Cassandre ou les oiseaux de malheur, je vous annonçais un deuxième pic de l'épidémie – je tenais l'information des épidémiologistes. C'est ce que l'on observe en Allemagne. Craignez que les cohues sur les quais et la rentrée à l'école des enfants dans des conditions que je juge discutables créent autant de nouveaux clusters pour l'avenir.

Dès lors, nous devons faire preuve d'une vigilance sanitaire extrême. C'est la raison pour laquelle, quoi que je sois moins confiné que je n'en ai l'air,

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