Intervention de Amélie de Montchalin

Séance en hémicycle du vendredi 10 novembre 2017 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Recherche et enseignement supérieur

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAmélie de Montchalin, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, chers collègues, la stratégie Horizon 2020 adoptée par la France et ses partenaires européens réaffirme l'objectif consistant à porter la dépense intérieure de recherche et de développement à 3 % du PIB en 2020. La France, dont les dépenses de recherche et de développement s'élèvent actuellement à environ 2,2 % du PIB, ne l'a pas encore atteint. Toutefois, la recherche française profitera dès 2018 d'une amélioration significative de sa situation grâce à ce projet de budget.

Les crédits de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » augmenteront de plus de 700 millions d'euros, dont 500 millions seront affectés à la partie « Recherche » dont je suis chargée en tant que rapporteur spécial. Ils atteindront ainsi 27,6 milliards d'euros en crédits de paiement en 2018, et augmenteront encore en 2019 puis en 2020 pour atteindre 28 milliards d'euros. En trois ans, l'effort budgétaire du Gouvernement et de la majorité en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche s'élèvera donc à 1,3 milliard d'euros.

Le budget de la recherche se caractérise, comme l'ensemble du projet de loi de finances pour 2018, par sa sincérité. Il marque la fin de la sous-budgétisation de certains organismes internationaux de recherche, comme l'Agence spatiale européenne, mais aussi du financement des personnels et des chercheurs en prenant intégralement en compte le GVT pour la première fois.

Par ailleurs, il répond pleinement aux attentes des chercheurs, des syndicats et des responsables des centres de recherche, que j'ai rencontrés tout au long de cet automne. Ainsi, il augmente de 25 millions d'euros les financements récurrents nécessaires au fonctionnement des laboratoires. L'ambition de ce budget est claire : il s'agit de donner des moyens aux chercheurs et non d'en embaucher d'autres à tout prix.

Pour autant, il ne tombe pas dans le piège consistant à opposer systématiquement financements récurrents et appels à projets. La baisse des crédits de l'Agence nationale de la recherche – ANR – au cours des dernières années a provoqué un effondrement du taux de sélection des projets qui a découragé les candidatures. L'ANR ne peut assumer correctement son rôle de financement de l'excellence de la recherche si le taux de sélection des projets chute à 12 %, voire 10 %. Celui-ci doit remonter pour atteindre 20 %. C'est pourquoi notre budget pour 2018 alloue 133 millions d'euros supplémentaires à l'ANR, ce qui constitue une excellente nouvelle.

Toutefois, des défis importants restent entiers en matière d'amélioration de l'efficacité de notre politique de recherche. Tout d'abord, les financements de l'ANR prévoient un montant très faible – 10 % – pour couvrir les frais de préciput – ou overhead – nécessaires au financement complet des projets de recherche. La moyenne européenne est comprise entre 20 % et 25 %. L'amélioration de la prise en compte du financement complet des projets de recherche est nécessaire afin que tous nos chercheurs bénéficient véritablement d'une prise en charge intégrale lorsqu'ils remportent un appel à projets.

Deuxièmement, il est essentiel que notre recherche et notre innovation soient plus efficaces, ce qui suppose d'améliorer l'articulation de nos outils avec nos objectifs. Le crédit d'impôt-recherche – CIR – , évalué à 5,8 milliards d'euros pour 2018, est un outil efficace préserver de grands centres de recherche en France et pour y localiser notre recherche privée. Néanmoins, il faut améliorer l'articulation de toute la politique industrielle et d'innovation avec cette ambition de recherche.

Le CIR pourrait également être mieux utilisé comme levier destiné à favoriser l'embauche des jeunes docteurs. À cette fin, je présenterai plusieurs amendements aux articles non rattachés de notre budget. De fait, de nombreux titulaires d'un doctorat connaissent encore de réelles difficultés pour obtenir un emploi dans les entreprises à l'issue de leur formation. Je salue ici la volonté, exprimée par Mme la ministre en commission élargie, de faire inscrire le doctorat au Registre national des compétences professionnelles afin que les compétences des titulaires d'un doctorat soient mieux connues et reconnues dans les entreprises.

Enfin, il est essentiel de travailler davantage à la clarification de l'architecture budgétaire de notre politique de recherche. La coopération entre ses acteurs et la présentation budgétaire de nos crédits n'est pas toujours optimale – c'est le moins que l'on puisse dire ! Ainsi, l'autonomie des universités n'a un sens que si elles s'en emparent pour se différencier et non pour se démultiplier avec des projets similaires, sans réelle coordination.

Tel est donc tout l'enjeu auquel nous sommes désormais confrontés : comment restaurer le rôle de fer de lance des projets de recherche nationaux assumé par les grands organismes de recherche tout en soutenant la dynamique des institutions à leur échelle par une politique de sites répartis sur tout le territoire ?

De même, on peut dresser le constat que la coordination des acteurs et de la stratégie peut être améliorée à l'aune de la multiplication, au cours des dernières années, des institutions de valorisation de la recherche tels que les instituts Carnot, les sociétés d'accélération du transfert de technologie – SATT – et les instituts de recherche technologique – IRT. Un réel travail s'impose afin de revoir et simplifier la chaîne menant de la recherche fondamentale au développement commercial via la recherche appliquée et l'innovation.

J'approuve sans réserve le budget de la MIRES, et les membres du groupe La République en marche avec moi, car il est essentiel que la France conserve la vocation qui a toujours été la sienne : être un grand pays à la pointe de l'excellence scientifique et technique !

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