Intervention de Catherine Fabre

Séance en hémicycle du lundi 18 mai 2020 à 21h30
Débat sur les conséquences de la réforme de l'assurance chômage

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Fabre :

Nous portons depuis trois ans une politique de l'emploi, une politique sociale qui tient en son coeur l'émancipation par l'éducation et par le travail. Nous avons déployé toute notre énergie pour renforcer l'égalité des chances par l'éducation, par exemple en dédoublant les classes de CP pour ceux qui avaient le plus de difficulté pour apprendre mais aussi en investissant 15 milliards sur cinq ans pour que chaque jeune vulnérable car sorti du système éducatif sans diplôme et chaque demandeur d'emploi de longue durée puisse se former, se qualifier et bâtir un projet de vie grâce à son travail. En accompagnant mieux chaque travailleur et en lui donnant les ressources pour se former tout au long de sa vie, nous avons commencé à démocratiser la formation professionnelle et à en faciliter l'accès.

La réforme de l'assurance chômage est un autre maillon essentiel de cette politique de l'emploi. Elle partait d'un constat clair : au moment de la réforme, les contrats à durée déterminée – CDD – ou les contrats d'intérim représentaient 87 % des embauches, les contrats de moins d'un mois représentaient 70 % des embauches et un CDD sur trois était un contrat d'un jour, voire moins.

Pour lutter contre la précarisation du travail tout en préservant la flexibilité nécessaire à certains métiers, cette réforme tendait à combattre ce recours abusif aux contrats courts, à rendre le travail plus lucratif que l'inactivité, à renforcer et adapter l'accompagnement des demandeurs d'emploi, en particulier les plus précaires. Elle a également permis d'ouvrir de nouveaux droits, notamment pour les salariés démissionnaires ou les travailleurs indépendants.

Avant la crise du covid-19, les résultats de cette politique étaient très encourageants : une baisse significative de deux points du taux de chômage, qui était passé en trois ans de 9,6 % de la population active à 7,8 %.

Derrière ces chiffres, ce sont des centaines de milliers de personnes qui ont retrouvé un travail et, par là même, confiance et foi en l'avenir. C'est pourquoi j'observe avec beaucoup de gravité la période qui s'ouvre. Ces mesures ont été prises pour libérer les énergies, dans un contexte de croissance économique, de pénurie de main d'oeuvre, de recul du chômage. Hélas, en six semaines, toutes les perspectives économiques ont brutalement basculé.

La crise sanitaire et la mise à l'arrêt de notre économie pendant plusieurs semaines, indispensable pour limiter la propagation du virus, ont eu un effet immédiat et terrible pour notre économie et les perspectives de retour à l'emploi des chômeurs. Nous devons à présent protéger les Français.

Fidèle à sa conception essentielle du travail, le Gouvernement n'a pas hésité à investir des moyens colossaux dans le maintien du tissu productif français, la sauvegarde des compétences et des emplois. Je lui suis reconnaissante d'avoir choisi d'activer tous les amortisseurs sociaux, ce qui nous permettra de repartir plus vite et plus fort.

Ainsi, 12,2 millions de salariés et un million d'entreprises ont été protégés par la prise en charge des salaires par l'État tandis que l'activité était arrêtée, soit 60 % de l'emploi du secteur privé.

Plusieurs mesures d'urgence ont été adoptées pour protéger les chômeurs. Certaines mesures de la réforme de l'assurance chômage ont été suspendues pour répondre aux besoins immédiats dus à la crise. Ainsi, les périodes d'inactivité durant la crise ne seront pas prises en compte pour déterminer le salaire journalier de référence. Elles n'auront donc pas d'effet sur le montant des allocations. Pour tous les chômeurs en fin de droit, les allocations chômage ont été prolongées. Ces droits aux allocations ont par ailleurs été ouverts aux personnes ayant démissionné avant le début du confinement pour reprendre un emploi.

S'agissant des intermittents qui arrivaient en fin de droits, le Gouvernement a reporté l'échéance au 31 août 2021. Il a également neutralisé cette période de confinement dans le calcul des droits. Ces mesures étaient nécessaires.

La période qui s'ouvre reste incertaine. En instituant un filet de sécurité pour les indépendants alors que rien n'existait auparavant, la réforme de l'assurance chômage a créé une nouvelle protection qui s'avèrera certainement précieuse. C'est dans cet esprit de protection et d'innovation que nous devons aborder la suite, afin de continuer, dans ce nouveau contexte plus difficile, à construire avec volontarisme de véritables parcours de sécurisation professionnelle.

Les travaux commencés il y a quelques mois avec les partenaires sociaux sur la prévention de la pénibilité au travail et les possibilités de reconversion professionnelle vers des secteurs stratégiques et prometteurs doivent participer à ce mouvement de reconstruction de notre économie pour l'avenir, et veiller à ne laisser personne au bord du chemin.

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