Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du lundi 18 mai 2020 à 21h30
Débat sur les conséquences de la réforme de l'assurance chômage

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Certaines choses changent, d'autres moins. Nous pouvons bien sûr revenir inlassablement à nos débats d'il y a deux ans. L'État n'a jamais eu pour but de reprendre la main, ni de ne pas la reprendre d'ailleurs : nous avons été amenés à agir par décret, provisoirement, parce que la négociation menée par les partenaires sociaux n'a pas abouti. C'est arrivé plusieurs fois dans l'histoire de l'assurance chômage. Il ne faut voir là qu'une décision conjoncturelle et pragmatique.

Vous m'interrogez sur la méthode. L'une des difficultés majeures que nous rencontrons, c'est que nous sommes entrés dans une ère d'incertitude – une incertitude d'une ampleur qu'aucune des générations actuellement aux responsabilités n'a connue. Cette incertitude est triple : sanitaire – d'abord – , économique et sociale ; ses phénomènes se combinent, peuvent se renforcer mutuellement ; la durée, la profondeur de leurs conséquences sont inconnues. Nous sommes contraints de travailler sur différents scénarios, sans savoir ce que sera la situation sanitaire au mois de décembre prochain et moins encore la situation économique et sociale, surtout dans l'éventualité d'un rebond de l'épidémie. Nous nous fondons sur nos valeurs, sur nos convictions ; nous agissons avec agilité, souplesse, pragmatisme, et en concertation. Bien sûr, on n'a jamais pu planifier le futur : mais le degré d'incertitude est aujourd'hui extrême, au plan national, au plan européen, au plan mondial.

Concrètement, je suis très attachée à quelque chose que j'ai appris, il y a longtemps, de Jean Monnet : le diagnostic partagé. Il faut partir d'un constat. En absence de toute prévision possible, nous devons, avec les partenaires sociaux, partir des différentes hypothèses qui sont sur la table, pour nous demander quels sont les risques en matière d'emploi.

Je pense notamment au risque par secteur. Certains vont bien, leur situation n'ayant pas été affectée par la crise : la distribution alimentaire, par exemple, n'est pas en difficulté. D'autres secteurs vont même très bien : je ne donnerai pas le nom de compagnies américaines qui vendent du divertissement en ligne, mais leur chiffre d'affaires a augmenté de 20 %. En revanche, dans le tourisme, l'hôtellerie, la restauration, la crise est profonde ; et, compte tenu du risque épidémique, on ne reviendra pas à la normale tout de suite. Les précautions sanitaires à prendre pour que nos concitoyens puissent aller dans des bars ou des restaurants en toute sécurité gêneront pendant longtemps l'activité de ces entreprises. L'aéronautique, l'automobile sont en difficulté.

Il faudra donc commencer par ce diagnostic partagé. Ensuite, et je vous rejoins sur ce point, les partenaires sociaux et nous-mêmes devrons nous montrer inventifs, non seulement sur l'assurance chômage, mais plus généralement sur les politiques d'accompagnement de l'emploi, de la formation, de l'apprentissage, en tenant compte des changements que connaîtra probablement le pays.

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