Intervention de Julien Aubert

Séance en hémicycle du mardi 19 mai 2020 à 21h30
Débat sur le thème : le déconfinement quelle mise en oeuvre après une semaine

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert :

Si nous sommes capables de siéger dans cet hémicycle, les Français sont tout aussi capables de s'asseoir dans une salle de cinéma en n'occupant qu'un fauteuil sur deux.

Au-delà des activités économiques, j'aimerais profiter de ce débat pour appeler votre attention sur un secteur particulier de l'économie. Je parlerai non des commerces, des industries, des artisans ou des entreprises, mais d'un autre secteur qui a été lourdement affecté : celui de la santé. Il ne faut pas le négliger car il est très important. L'OCDE – Organisation de coopération et de développement économique – estimait qu'au début de l'année 2017, nos dépenses de santé s'élevaient à 11,3 % du PIB. Nous avions la part du PIB consacrée à la santé la plus élevée de l'Union européenne, avec l'Allemagne – en tout cas, elle était largement supérieure à la moyenne de l'Union européenne, soit 9,8 %. Je vous rappelle que la part de notre PIB consacrée au tourisme avoisine les 8 %.

Malgré le retour à des possibilités de soins, beaucoup de professionnels de santé font un constat amer : les Français se sont davantage bousculés pour prendre rendez-vous chez le coiffeur que pour consulter un médecin, les patients redoutant d'être contaminés par le coronavirus en se rendant dans un cabinet médical. Un chiffre est, à ce titre, tout à fait révélateur : un sondage réalisé le 14 mai pour la Fédération de l'hospitalisation privée révèle que 36 % des Français craignent de retourner en consultation de peur d'attraper la maladie. Une telle peur pourrait avoir des conséquences désastreuses sur des cabinets et des cliniques qui ont fonctionné au ralenti pendant les deux mois de confinement, voire n'ont pas eu d'activité du tout.

Le Gouvernement peut agir, notamment pour les cliniques, qui ont joué le jeu en étant la réserve sanitaire des hôpitaux. Elles n'ont pas forcément été mobilisées. Dans mon département, on a créé des lits et elles ont attendu en suspendant toutes leurs autres activités ; pourtant, elles n'ont pas vu d'afflux de malades. Désormais, elles ont le fusil à la main et demandent que nous les laissions reprendre progressivement leurs activités en se concentrant sur leurs champs de spécialité. Si l'activité n'est pas rétablie maintenant, les aides prévues ne suffiront pas et nous assisterons à des faillites de professionnels, y compris dans le secteur de la santé. Or les professionnels de la médecine assurent une offre de soins de qualité et de proximité dans nos territoires, malgré quelques trous dans la raquette, que constituent malheureusement les déserts médicaux.

Cette reprise de l'activité ne doit pas être entravée par les pouvoirs publics. À ce titre, la mise en oeuvre du plan blanc élargi était une précaution nécessaire – il ne s'agit pas de la lever là où les tensions sur les capacités en lits de réanimation sont encore fortes – , mais son maintien sur l'ensemble du territoire national, de manière uniforme alors que nous disposons de statistiques nous permettant de distinguer les départements rouges des départements verts, a des conséquences bien réelles sur ce tissu privé qui a souvent été le parent pauvre de la stratégie de santé. Nous sommes beaucoup passés par les hôpitaux, et nous avons sans doute sous-estimé l'utilité de cet outil sanitaire. Une semaine après le début du déconfinement, pourquoi ne pas imaginer une déclinaison territoriale de ce plan, à l'image de ce qui est fait pour les établissements scolaires, en maintenant bien entendu des précautions et une vigilance accrue quant à un éventuel rebond épidémique ?

Par ailleurs, un grand nombre de professionnels de santé autorisés à reprendre leur activité ne peuvent pas le faire dans de bonnes conditions, faute de matériel sanitaire. C'est une situation que vivent par exemple les chirurgiens-dentistes. Le cas des ostéopathes, oubliés dans un premier temps de la liste des professionnels de santé devant bénéficier d'une distribution de matériel sanitaire en vue du déconfinement, révèle au passage le manque de rigueur avec lequel ceux-ci ont été traités.

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