Intervention de Jennifer De Temmerman

Séance en hémicycle du mercredi 10 juin 2020 à 15h00
Débat sur le rapport d'information de la commission des finances sur le printemps de l'évaluation consacré à l'évaluation des politiques publiques 2020

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJennifer De Temmerman :

Je le sais pour avoir été rapporteure pour avis, pour le compte de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, du programme « Énergie, climat et après-mines ». Le travail que j'ai pu effectuer dans ce cadre s'est déroulé sans concertation réelle avec le rapporteur général de la commission des finances, et sans aucun lien avec les autres rapporteurs.

Aujourd'hui, je n'ai pas d'avis réfléchi sur les rapports qui ont pu être rédigés dans le cadre du printemps de l'évaluation : ils ont été déposés trop tard, et certains ne sont toujours pas accessibles.

Je ne pense pas qu'il soit raisonnable d'imaginer que l'on puisse travailler en moins de quelques jours sur des sujets aussi importants, comme cela a été le cas ce matin pour l'examen du troisième PLFR par la commission des finances.

Hier, nous avons assisté en séance à un débat intitulé « Comment la sincérité et le rétablissement des finances publiques depuis 2017 favorisent le soutien à l'économie dans la crise du covid-19 ? »

De nombreux collègues ont souligné à quel point cette formulation elle-même relevait de l'autocongratulation. C'est oublier le travail de ceux qui nous ont précédés, et aussi le fait que nous avons pu bénéficier d'évolutions qui ne sont pas pleinement à la main des pouvoirs publics. Un peu d'humilité me semble nécessaire en ces temps incertains.

Il a été décidé d'orienter le printemps de l'évaluation vers l'impact de l'actuelle crise sanitaire en termes de mobilisation des crédits budgétaires et de déploiement des politiques publiques. Nous nous interrogeons sur les crises successives que nous avons vécues – gilets jaunes, covid-19 – et sur leurs effets certains sur nos finances.

Que se serait-il passé si les propositions de mesures de nombreux parlementaires de tous bords avaient été entendues lors des débats financiers en 2018 et en 2019 ?

Qu'il s'agisse de la contribution sociale généralisée, la CSG, de la taxe carbone ou de l'hôpital, peut-on considérer que ce sont les crises qui ont affecté les finances publiques ou que nos politiques économiques et nos orientations budgétaires ont peut-être aggravé ces crises ? Je laisse ceci à votre réflexion sur ce qui ne peut être défait, mais je vous invite à entrer davantage dans une démarche positive pour l'avenir.

La pandémie et la crise sanitaire doivent nous conduire à repenser toutes nos politiques publiques et la transformation de nos modes de vie, de nos modèles économiques et, plus largement, de nos sociétés.

De l'éducation à la sécurité civile en passant par tous les secteurs ministériels, mais aussi à l'échelle de chaque territoire, cette adaptation implique évidemment une transformation de nos finances : il n'existe pas de politique publique sans traduction budgétaire.

De nombreux États ont déjà fait le choix de revoir leurs processus et leur politique économique. C'est pour cela que je souhaite revenir sur un sujet qui me tient à coeur, car je crois qu'il est la réponse adéquate à notre questionnement : l'agenda 2030 et ses dix-sept objectifs de développement durable, communément appelés ODD.

Adopté le 25 septembre 2015, l'agenda se fixe comme objectif de répondre aux défis communs des pays de la planète. Cet agenda était alors présenté comme un changement de paradigme, un projet transformateur et une feuille de route globale à décliner par tous les pays et l'ensemble des acteurs.

La France s'est dotée de sa propre feuille de route, en septembre 2019, dont l'élaboration a donné lieu à un travail important de la part de nombreux acteurs, de toutes les parties prenantes et de quelques parlementaires.

À nombre d'entre nous, il est apparu que cette grille de lecture – les ODD et leurs cibles – est un outil formidable dont le Parlement doit se saisir pour lire le budget et améliorer son contrôle sur les lois de finances. Finalement, cela va répondre aux enjeux sociétaux qui se posent à nous.

Le budget est l'expression politique et économique de l'action du Gouvernement. Il doit donc être considéré comme le point de départ nécessaire et incontournable pour l'intégration de l'agenda 2030.

Cette intégration apparaît même logique au regard de la nouvelle gestion publique axée sur une logique de résultat, avec des indicateurs et des cibles, tout comme les objectifs de développement durable. Cette nouvelle gestion publique prône un pilotage de l'action publique plus transparent et efficace, ce qui se traduit par la mise en place d'indicateurs de performance de plus en plus précis.

Les crédits budgétaires sont organisés en fonction d'objectifs politiques contrôlés à l'aide d'objectifs et d'indicateurs. Cette logique, axée sur les résultats, est relativement conforme à celle des objectifs de développement durable, qui sont organisés de la même manière en objectifs, cibles et indicateurs.

Ces indicateurs développés par l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques, peuvent donc intégrer de manière avantageuse le suivi national. Nous pourrions ainsi plus facilement lire et évaluer le processus budgétaire. Nous pourrions parler à tous avec le bon outil, travailler plus efficacement et rapidement dans les délais qui nous sont imposés, et, peut-être faire mieux avec moins.

Le moment que nous vivons exige de profondes mutations. Pour nos politiques publiques, l'heure est à l'intégration des objectifs de développement durable dans les cibles et indicateurs de nos projets et rapports annuels de performances.

Pour nous et pour les générations futures, posons dès maintenant les bases d'une société résiliente, agissons et retrouvons-nous l'année prochaine autour d'un meilleur printemps de l'évaluation. Élaborons un budget rénové, à l'instar de celui d'un nombre croissant d'États à travers le monde, de la Finlande au Costa Rica, en passant par le Mexique ou l'Espagne.

Nous pouvons, j'en suis persuadée, nous retrouver, au-delà de nos différences, dans ces valeurs communes.

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