Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du mercredi 10 juin 2020 à 15h00
Débat sur le rapport d'information de la commission des finances sur le printemps de l'évaluation consacré à l'évaluation des politiques publiques 2020

Gérald Darmanin, ministre de l'action et des comptes publics :

Je partage le propos de M. Daniel Labaronne, notamment, selon qui nous avons attaqué cette crise avec les meilleurs comptes publics possibles, quand bien même ils étaient effectivement moins bons que ceux de nos amis allemands : la situation dont nous avions hérité différait peut-être un peu, il faut bien l'avouer – ce que n'ont pas fait tous les membres de l'opposition qui se sont exprimés. Il s'agit bien d'une réalité, puisque nous sommes passés, la Cour des comptes en fait foi, d'un déficit public de 3,4 % en 2017 à environ 2 % l'an dernier.

Nous avons, me semble-t-il, respecté le principe de sincérité budgétaire. J'entends que cela ne constitue pas en soi un incroyable succès, puisque le minimum que doit faire un Gouvernement est de vous présenter les inscriptions budgétaires avec sincérité – mais peut-être cela change-t-il des prévisions précédentes, si l'on en croit le rapport de la Cour des comptes, M. le nouveau Premier président de la Cour des comptes l'a peut-être évoqué. Vous aurez constaté que le Gouvernement a tenu sa promesse : il n'a pas présenté de décrets d'avance ; lorsque les événements se révélaient extrêmement violents pour les comptes publics, comme ce fut le cas récemment, il a même présenté des lois de finances rectificatives, dans une logique d'acceptation complète du jeu de l'autorisation et du contrôle parlementaires. Que ce Gouvernement soit le premier à ne pas présenter de décrets d'avance montre sans doute que la loi organique relative aux lois de finances – LOLF – n'était pas tout à fait respectée. Notre démarche, elle, respecte le travail d'évaluation des parlementaires, puisqu'ils examinent des crédits budgétaires sincèrement inscrits ; elle participe à une bonne application des politiques publiques et donne aux directeurs de programme les moyens de faire correctement leur travail.

M. le président de la commission des finances, comme d'autres intervenants d'ailleurs, a évoqué les sous-exécutions et les sur-exécutions, choses bien ordinaires sur une telle masse budgétaire, 340 milliards d'euros de crédits en l'espèce. Elles sont toujours la conséquence, bien sûr, d'événements imprévus survenus en cours de gestion – je ne crois pas qu'aucun des orateurs, y compris de l'opposition, ait démontré le contraire. Le report de l'entrée en vigueur de la réforme de la contemporanéisation de l'aide personnalisée au logement en offre un exemple. On peut d'ailleurs le regretter : s'il est vrai qu'elle faisait faire des économies à la nation en période économiquement favorable, elle aurait augmenté les dépenses en temps de pénurie ; il me semble donc qu'elle aurait été bienvenue pour accompagner les difficultés sociales que certaines personnes vont connaître. Néanmoins, cette réforme n'est pas annulée, elle est reportée. Son application, que le ministre du logement a évoquée, est particulièrement complexe, si bien qu'il valait mieux la reporter plutôt que de la voir mise en oeuvre d'une façon très injuste et contraire à l'intention du législateur. Je remercie notamment M. Jolivet de l'avoir souligné.

Les dépenses correspondant à la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ont été plus fortes que prévu, notamment les dépenses liées au financement de la prime d'activité. Je rappelle à la représentation nationale qu'en cette matière, on est passé de 3 milliards à quasiment 10 milliards d'euros. Le grand débat était assurément imprévu, comme les annonces du Président de la République qui l'ont suivi et auxquelles nous avons donc répondu. Et c'est en fin de compte à l'opinion publique que nous avons ainsi répondu, puisque l'État a assumé près de 10 % d'augmentation de salaire pour les personnes rémunérées au SMIC, par le versement d'une prestation sociale, inscrite au budget présenté aujourd'hui par M. Véran – et par Mme Buzyn hier. En outre, le chômage a diminué plus que prévu, ce qui a tiré à la hausse le nombre d'allocataires de la prime. Personne – en particulier dans l'opposition – n'avait anticipé que la politique gouvernementale serait aussi efficace et ferait baisser le chômage aussi rapidement ; autrement dit, personne n'avait anticipé une telle hausse, dont il faut se réjouir, des crédits alloués à la prime d'activité.

Mme Emmanuelle Ménard a évoqué la mission « Immigration, asile et intégration ». Pour des raisons qui lui sont propres, elle affirme que la politique du Gouvernement ne serait pas aussi efficace que cela, puisque le flux des demandeurs d'asile serait plus important. En réalité, nous avons été plus rapides qu'auparavant dans l'exécution ; l'augmentation des crédits de cette mission votée par le Parlement n'est pas seulement le fait d'une augmentation du nombre de demandeurs d'asile ; elle est la conséquence de la plus grande rapidité avec laquelle nous traitons leur demande. Il s'agit là, me semble-t-il, de la première grande politique publique qui incombe à un État : accepter qui il souhaite accueillir sur son sol, conformément à son grand devoir d'asile, et ne pas accepter ceux que l'on pourrait nommer, de ce point de vue, des « passagers clandestins ». Ainsi, les augmentations de crédits et les sur-exécutions visées ne sont pas simplement liées à des flux ; peut-être Mme Ménard aurait-elle pu le préciser.

À propos des consommations de crédits des outre-mer, M. le président Woerth a évoqué les sous-exécutions. Il a souligné le rôle des exonérations de cotisations patronales, du moindre dynamisme économique, et la consommation inférieure aux prévisions des crédits d'investissement du fameux programme 123, « Conditions de vie outre-mer ». Il est vrai que nous pouvons toujours améliorer les choses en cette matière ; j'y travaille avec Mme la ministre des outre-mer. Vous le savez, le budget des outre-mer est certes petit « budgétairement », mais il connaît beaucoup d'exonérations ; la ministre n'a pas la maîtrise totale des dépenses budgétaires, on ne peut donc pas lui reprocher cet état de fait. M. le président de la commission des finances s'en souvient, nous avons plusieurs fois proposé, dans cet hémicycle, d'améliorer cette situation en transformant des dépenses fiscales, c'est-à-dire des exonérations, en dépenses budgétaires. Cela nous a souvent été reproché, y compris par les parlementaires ultramarins eux-mêmes. Pourtant, une telle politique est selon moi de nature à améliorer la maîtrise des crédits, donc à améliorer les aides consenties aux territoires ultramarins.

Le président Woerth et le rapporteur général ont tous deux évoqué la question des restes à payer, poursuivant en cela des discussions que nous avons eues avec Mme Rabault et M. le rapporteur général Giraud. Les restes à payer, qui correspondent aux différences entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement, ont en effet augmenté de 8 milliards d'euros en 2019. Cela tient évidemment à la programmation pluriannuelle de certaines dépenses, notamment celles relatives à la gendarmerie, qui relèvent de la mission « Défense ». Nous avons souvent évoqué, lors de l'examen des projets de loi de finances, le programme « Patrimoines » de la mission « Culture ». La restauration des monuments historiques est un sujet cher à M. Gilles Carrez…

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