Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Séance en hémicycle du jeudi 11 juin 2020 à 21h45
Exonération de tva sur les masques gels hydroalcooliques et solutions désinfectantes — Présentation

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances :

Ce taux très réduit s'appliquera jusqu'au 31 décembre 2021 pour les produits nécessaires à la lutte contre le covid-19, et a été appliqué de manière rétroactive à compter du mois de mars. Monsieur Le Fur, votre remarque ne tient donc pas.

Ce deuxième volet témoigne de l'engagement du Gouvernement en faveur de la recherche d'un équilibre permettant de réduire la TVA sur ces produits tout en préservant une certaine sécurité juridique.

Il me paraît également nécessaire de mentionner un troisième volet : le Gouvernement a encouragé les entreprises à effectuer des dons de matériel sanitaire en franchise de TVA, en accordant une dispense temporaire de régularisation de la TVA déduite.

Ces mesures, qui résultent d'une instruction fiscale publiée au Bulletin officiel, concernent les dons de masques, gels hydroalcooliques, tenues de protection et respirateurs lorsqu'ils sont effectués au profit des établissements de santé, des EHPAD ou des établissements sociaux et médico-sociaux qui accueillent des personnes handicapées ou atteintes de pathologies chroniques. Elles concernent également les dons effectués au profit des professionnels de la santé, des services de l'État et des collectivités territoriales.

L'ensemble de ces mesures montre toute la mobilisation et tous les efforts fournis par l'État dans le cadre de l'urgence sanitaire afin de réduire voire de supprimer la charge de la TVA sur les produits sanitaires.

Ces mesures ont permis d'assurer un prix accessible des masques pour nos concitoyens, comme le montrent les contrôles effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – DGCCRF – sur une base hebdomadaire. Les premiers relevés de prix ont permis de s'assurer que l'encadrement des prix des masques chirurgicaux est globalement respecté : alors que le prix plafond est fixé à 95 centimes, le prix le plus couramment pratiqué est de 60 centimes. Il s'applique pour la majorité des masques.

Ces prix sont comparables voire inférieurs à ceux des autres pays européens, dont ceux qui ont adopté un taux de TVA à 0 %, comme par exemple l'Autriche, où la chambre économique fédérale, la WKÖ, propose des masques chirurgicaux dont les prix à l'unité se situent entre 69 et 79 centimes, selon la quantité commandée. Pour rappel, l'Autriche a instauré une TVA à taux zéro, mais sans encadrer ses prix. Cela confirme bien le caractère aléatoire de la répercussion du taux de la TVA sur le prix final.

En ce qui concerne les masques textiles, en particulier les masques grand public à filtration garantie, pour la plupart lavables et réutilisables plusieurs fois, dont l'impact écologique est bien moindre que celui des masques chirurgicaux et dont la production est beaucoup plus largement assurée en France, le prix à l'usage s'avère en moyenne inférieur au masque chirurgical. Environ un tiers des masques sont ainsi commercialisés à des prix allant de 10 à 30 centimes par utilisation – 10 centimes, c'était le prix du masque chirurgical avant la crise.

Nous partageons les motivations qui inspirent la présente proposition de loi – rendre plus accessibles les équipements de protection permettant de lutter contre le covid-19 – mais la jugeons inadaptée pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, hormis certains cas particuliers, l'exonération de TVA n'est pas autorisée par la directive européenne sur la TVA. Adopter une telle mesure conduirait la France à se doter d'une législation susceptible d'être sanctionnée par les instances communautaires. Rappelons à cet égard que la législation autrichienne à laquelle vous faites référence expirera dans les prochaines semaines : elle est loin d'avoir la même portée que la mesure que vous proposez, qui s'éteindra à la fin 2021.

Je rappelle d'autre part qu'une exonération de TVA peut entraîner des effets contreproductifs pour les entreprises, car elle a forcément pour corollaire l'impossibilité de déduire la TVA en amont, sur les matières premières utilisées pour fabriquer le produit concerné. Les entreprises commercialisant sur le marché français des masques, du gel et des solutions hydroalcooliques exonérés de TVA perdraient donc toute possibilité de déduire la TVA grevant leurs achats. Cette perte du droit à déduction se répercuterait immanquablement sur les prix à la vente de ces produits, à rebours de l'effet recherché. En revanche, l'application d'un taux réduit de 5,5 % ne remet pas en cause le droit à déduction.

Enfin, nous avons annoncé des mesures supplémentaires de soutien à l'achat de masques.

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