Intervention de Cyrille Isaac-Sibille

Séance en hémicycle du lundi 15 juin 2020 à 16h00
Dette sociale et autonomie — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCyrille Isaac-Sibille :

Je salue M. le ministre des solidarités et de la santé qui nous a rejoints.

À crise exceptionnelle, mesures exceptionnelles, moyens financiers exceptionnels et mise en place d'une nouvelle branche de la sécurité sociale pour l'autonomie ! Les montants colossaux dont nous débattons montrent à quel point la crise sanitaire a mis à mal les comptes de la nation, plus particulièrement ses comptes sociaux. Ils ont cependant permis de maintenir à flot notre système de santé et notre système social, sollicités de manière inédite dans l'histoire de notre pays. Le groupe MODEM est pleinement conscient de la nécessité d'identifier la dette covid, liée à ces dépenses exceptionnelles, de la transférer à la CADES et, en conséquence, d'entériner la prolongation de cette caisse jusqu'en 2033.

Il appartient à notre génération de rembourser cette dette en dix ans afin que nous ne laissions pas nos enfants payer les intérêts et nos petits-enfants régler le principal. Si les deux textes que nous examinons présentent un aspect particulièrement technique et financier, ils comportent également des mesures d'une grande humanité laissant présager une réforme attendue de l'accompagnement du grand âge.

La crise a révélé les faiblesses et les fragilités de notre société. Nous avons tous constaté que les plus touchés ont été les personnes âgées et l'ensemble des personnels et des structures à leur service. Cet épisode doit permettre à la représentation nationale de compléter notre système de protection sociale. Nos prédécesseurs, en 1945, à une époque où l'espérance de vie était de 67 ans, ne pouvaient pas traiter ce sujet alors que la question de la prise en charge du grand âge ne se posait pas.

Le groupe MODEM se félicite de la création, lundi dernier, en commission spéciale, par voie d'amendements parlementaires, de la cinquième branche de la sécurité sociale. Bien entendu, il ne s'agit que d'un premier pas et beaucoup reste à faire. Parce que cette réforme ne saurait être uniquement financière, les semaines à venir seront déterminantes pour réfléchir ensemble, avec les parties prenantes, afin de repenser intégralement organisation et gouvernance. Faut-il le faire autour de la CNSA afin de mettre en avant la prévention et l'autonomie, car l'objectif est de bien vieillir en bonne santé ? Dans ce cadre, il faut valoriser et rendre plus attractifs les métiers du secteur, et rapprocher les logiques d'autonomie pour les personnes âgées de celles concernant les personnes en situation de handicap. Oui, mes chers collègues, le travail qui nous reste à accomplir est immense !

Lors de l'examen du texte en commission spéciale, certaines oppositions ont dénoncé un simple effet d'annonce, une pure coquetterie, voire une coquille vide pour évoquer la création de cette cinquième branche – nous avons encore entendu ces propos cet après-midi. Si nos prédécesseurs de 1945 avaient imaginé que les dépenses de la sécurité sociale atteindraient un jour 470 milliards d'euros, et s'ils avaient conditionné sa création à la présence d'espèces sonnantes et trébuchantes, êtes-vous certains qu'elle aurait vu le jour ? Rappelons-nous qu'à l'été 1945, lorsque les consultations pour la mise en oeuvre de cet immense ouvrage ont été amorcées, l'adhésion collective était loin d'être acquise ! Rappelons-nous qu'il a fallu attendre l'année 1946 pour que soit décidé le principe de sa généralisation, qui prendra beaucoup de temps ! Rappelons-nous enfin qu'il a fallu attendre vingt ans et la réforme dite Jeanneney de 1967 pour que la séparation financière des risques au sein des trois branches autonomes soit effective. Cela se traduira par la création des trois caisses : la CNAM, la Caisse nationale d'assurance maladie, la CNAV, la Caisse nationale d'assurance vieillesse, et la CNAF, la Caisse nationale d'allocations familiales.

Vous l'avez compris, comme Rome, notre système de protection sociale ne s'est pas construit en un jour. Les ordonnances de 1945 constituent une référence commune de notre histoire nationale : gageons que juin 2020 trouvera le même écho dans quelques années ! Pour qu'il en soit ainsi, afin de parachever cette première étape, le groupe MODEM soutiendra un amendement visant à ce que soit explicitement inscrit à l'article fondateur de la sécurité sociale que la nation affirme son attachement au caractère universel et solidaire de la prise en charge du soutien à l'autonomie.

Vous l'aurez compris, le groupe MODEM votera les textes avec un esprit de responsabilité mêlé à un sentiment de fierté. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, soyez assurés que notre groupe se tiendra à vos côtés pour mener cette réforme à bon port.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.