Intervention de Christelle Dubos

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 15h00
Revenu étudiant — Discussion générale

Christelle Dubos, secrétaire d'état auprès du ministre des solidarités et de la santé :

Je remercie le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d'avoir inscrit à l'ordre du jour cette proposition de résolution qui nous donne l'occasion d'évoquer ensemble la nécessité impérieuse de lutter contre la précarité étudiante. Vous avez collectivement formulé ce voeu dans l'exposé des motifs de votre proposition de résolution : « L'Assemblée nationale doit de nouveau être le moteur de la lutte contre la précarité étudiante. » Permettez-moi de me joindre à vous et de vous assurer de la détermination intacte du Gouvernement à prendre toute sa part dans cette lutte.

Nous l'avons souvent dit dans l'hémicycle ces dernières semaines, et vous l'avez rappelé, madame Buffet : la crise du covid-19 a placé certains étudiants dans des situations de grande précarité. Je pense en particulier aux étudiants ultramarins isolés, à ceux qui n'ont plus accès aux restaurants universitaires ou à ceux qui ont perdu un emploi ou un stage. Ces difficultés exacerbées nous ont conduits, avec le soutien précieux des collectivités territoriales et des associations, à nous mobiliser dès les tout premiers jours de cette crise, en tout point de notre territoire, pour que ces jeunes puissent satisfaire leurs besoins essentiels. Ces difficultés nous ont également conduits à verser une prestation spécifique à 800 000 jeunes, qu'ils soient étudiants ou non, à hauteur de 200 euros.

Cependant ces difficultés ne datent malheureusement ni de la crise du covid-19, ni de ce quinquennat. C'est la raison pour laquelle nous avons engagé un combat contre la précarité étudiante dès notre arrivée au pouvoir.

Le ministère de l'enseignement supérieur a d'abord mobilisé 46 millions d'euros supplémentaires pour financer les bourses étudiantes. Au total 5,7 milliards d'euros sont consacrés aux aides étudiantes dans le budget de l'État. Le ministère s'est aussi fortement mobilisé pour que les étudiants en situation de précarité aient bien accès aux aides au logement et aux aides d'urgence qui leur sont spécifiquement destinées. Ma collègue Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, l'a rappelé : plus de 15 millions d'euros dédiés à ces aides d'urgences ne sont pas consommés chaque année. C'est la raison pour laquelle le ministère a mis en place, au mois de janvier dernier, un numéro national d'appel pour tous les étudiants en situation d'urgence sociale. Il a aussi fait appel à toute la communauté étudiante, aux syndicats et aux présidents d'université, pour qu'aucun étudiant en difficulté ne reste sans réponse.

La lutte contre la précarité étudiante ne se limite pas à la question des bourses. Elle passe aussi par une action déterminée en faveur de l'accès au logement et de l'accès aux soins pour tous les étudiants.

Pour ce qui relève de l'accès au logement, le Gouvernement a lancé, dès 2018, un plan de 60 000 nouveaux logements étudiants, qui s'ajoutent aux 40 000 construits lors des cinq années précédentes. Simultanément, la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique a permis d'acter de nombreuses avancées dans l'accès des étudiants au logement, en particulier grâce à la garantie Visale. Elle apporte une aide au cautionnement locatif sans conditions de ressources à tous les jeunes de moins de 30 ans.

Pour ce qui relève de l'accès aux soins, je rappelle que le ministère des solidarités et de la santé a engagé une lutte sans merci contre toutes les formes de non-recours car, comme vous l'avez rappelé, les étudiants sont encore trop nombreux à renoncer à certains soins ou à certains examens. Comme Céline Calvez l'a évoqué, nous avons aussi supprimé le régime de sécurité sociale des étudiants, intégré au régime général, ce qui constitue une simplification majeure et un gain de pouvoir d'achat immédiat. La cotisation annuelle de 217 euros qui pesait sur les finances des étudiants a ainsi disparu. De plus, lorsque nous avons créé la complémentaire santé solidaire, nous avons exclu les bourses des ressources prises en compte pour son attribution, de sorte que cette couverture maladie bénéficie désormais à de très nombreux étudiants boursiers. Cette complémentaire santé permet d'accéder sans reste à charge et sans aucune avance de frais à une série de consultations chez le médecin, chez le dentiste, à l'hôpital, mais aussi de bénéficier d'une large gamme de lunettes de vue, de prothèses dentaires, de médicaments et de dispositifs médicaux. Il s'agit d'un outil majeur de lutte contre le renoncement aux soins, que nous continuons à déployer au bénéfice des étudiants.

Les facteurs de précarité évoqués exigent une mobilisation exemplaire et concertée de l'ensemble des acteurs, et nous devons inlassablement lutter pour que chacun ait accès dans les mêmes conditions à la réussite académique. Si je vous rejoins sur les constats, je souhaite que nous envisagions ensemble des pistes qui nous permettront de lutter contre la précarité non seulement des étudiants, mais des jeunes dans leur ensemble. Je suis en effet convaincue que nous gagnerons à adopter une vision plus exhaustive de ces enjeux et à considérer la situation de tous les jeunes de 18 à 25 ans. Nous gagnerons à raisonner par classe d'âge et à nous confronter sans détour aux enjeux pressants que rencontrent nos concitoyens âgés de 18 à 25 ans.

Cette classe d'âge est la plus touchée par la pauvreté : un jeune de 18 à 24 ans sur quatre se trouve en situation de pauvreté et 775 000 d'entre eux ne sont ni en emploi ni en formation. Nous compterons, au semestre prochain, un nombre plus élevé de jeunes à la recherche d'un emploi, particulièrement touchés par la crise. Nous ne pouvons pas laisser s'installer ce que certains appellent déjà la « génération covid ». Nous devons collectivement nous donner les moyens de refuser l'idée qu'une génération puisse être ainsi durablement fragilisée. Il faut accompagner tout autant les étudiants que les décrocheurs, les apprentis, les jeunes chômeurs et tous ceux qui en auront besoin. Quel que soit leur statut, les jeunes doivent tous être en capacité de satisfaire leurs besoins essentiels, avoir accès aux soins et au logement, et être accompagnés vers l'activité et l'emploi. Aucun jeune ne doit être laissé sur le bord de la route.

Pour les étudiants comme pour l'ensemble des jeunes, la lutte contre la précarité est un combat que j'avais engagé bien avant la crise actuelle. Les jeunes précaires sont la cible prioritaire de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, qui prévoit notamment une obligation de formation pour tous les jeunes jusqu'à 18 ans à compter de la rentrée 2020, la mobilisation de plus de 100 000 places en garantie jeunes, et un accompagnement renforcé des jeunes sortis du dispositif de l'aide sociale à l'enfance. Nous devons toutefois aller plus loin : non seulement accélérer le déploiement des mesures qui leur sont destinées dans le cadre de cette stratégie, mais également engager de nouveaux moyens pour que, dans les circonstances exceptionnelles actuelles, tous les jeunes aient accès à l'accompagnement qui leur est dû.

La proposition de résolution défend la profonde modernité du projet de création d'un revenu étudiant. Je crois, pour ma part, que la profonde modernité est à rechercher du côté d'une approche globale de la place des jeunes dans notre modèle de protection sociale, …

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