Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 15h00
Contribution des hauts revenus à l'effort de solidarité nationale — Présentation

Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances :

Nous n'avons pas touché à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, parce que nous pensons qu'il est légitime que les contribuables les plus aisés contribuent à l'effort fiscal de façon plus importante. Nous avons transformé l'ISF en un autre impôt, l'IFI, auquel il est devenu beaucoup plus difficile d'échapper. Paradoxalement, l'ISF, du fait de son plafonnement en fonction du revenu, taxait moins fortement les très hauts patrimoines que les patrimoines moins élevés.

Le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital, un comité indépendant, a été chargé de se prononcer ex ante sur les effets induits de la réforme et a rendu ses premières conclusions peu après qu'elle ait été mise en oeuvre – d'autres rapports devraient bien évidemment suivre – , alors que seuls les premiers signaux avaient été envoyés aux investisseurs – lesquels n'ont d'ailleurs pas manqué d'y répondre. Les experts de ce comité s'accordent à dire que le nouveau régime fiscal qui s'applique à l'épargne des ménages est bien plus simple et lisible que le précédent.

Ce nouveau régime dissuade les comportements d'optimisation fiscale, qui constituaient un effet induit du plafonnement et nuisaient non seulement aux recettes publiques, mais aussi à la vie des entreprises, notamment lors des transmissions. Je rappelle qu'en Allemagne, une entreprise sur deux est transmise, contre 17 % en France. J'ajoute que la réforme a contribué à réorienter l'épargne des ménages vers l'investissement productif et le financement des entreprises, qui seront la clé de voûte de notre redémarrage et de notre sortie de crise.

À l'heure où, sur ces bancs, on nous interroge sur le nécessaire renforcement des capitaux propres des entreprises, dans le même mouvement, on veut le taxer. Cela est totalement incohérent.

Je veux souligner, ensuite, que notre politique fiscale s'est concentrée sur les classes populaires et moyennes, largement oubliées sous les deux dernières législatures. Les faits sont têtus ; permettez-moi de les rappeler. Les baisses d'impôts engagées pendant le quinquennat devraient atteindre 27 milliards d'euros pour les ménages et 13 milliards pour les entreprises, ce qui nous place encore assez haut en matière de compétitivité fiscale. Là encore, nous sommes loin de la course au moins-disant fiscal !

S'agissant de l'impôt sur le revenu, une baisse de 5 milliards d'euros a été votée fin 2019 : elle allégera substantiellement l'effort fiscal des classes moyennes et populaires et effacera l'effet que vous avez évoqué d'un taux d'imposition d'entrée dans le prélèvement marginalement au même niveau que celui des classes les plus riches. Nous avons pris les mesures qui s'imposaient, car nous ne faisons pas d'idéologie.

Ce sont ainsi 17 millions de foyers fiscaux qui connaîtront une diminution de leur impôt sur le revenu, pour un gain moyen d'environ 300 euros. Le gain sera encore supérieur pour les 13 millions de foyers imposés à la première tranche de l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire les contribuables modestes et les classes moyennes et populaires. Nous ne renoncerons pas à ces mesures fortes pour nos concitoyens les plus en difficulté, car elles sont encore plus nécessaires après la crise.

Nous avons aussi décidé de reconduire, en 2020, la prime exceptionnelle exonérée de l'ensemble des cotisations et contributions sociales et de l'impôt sur le revenu dans la limite de 1 000 euros. Entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019, elle a été versée dans plus de 400 000 établissements, à environ 5 millions de salariés, ce qui représente 2 milliards d'euros. Elle a atteint en moyenne près de 400 euros.

Tous ces dispositifs permettent de rééquilibrer la redistribution. Et ce ne sont que quelques exemples de tous ceux que nous avons créés pour aider, avant même que la crise ne les frappe, nos concitoyens des classes populaires et moyennes qui travaillent.

Enfin, pour faire face à la crise, nous avons mené une action puissante et sans équivalent dans notre histoire récente. Pour les seuls plans de soutien, nous avons mobilisé 110 milliards d'euros, dont l'essentiel est destiné aux salariés, grâce au chômage partiel, mais aussi aux indépendants, aux commerçants et aux artisans qui ont été les plus exposés, grâce au fonds de solidarité.

Nous devons collectivement être à la hauteur des enjeux pour recréer la confiance et la croissance nécessaires pour accompagner notre relance et les évolutions qu'elle favorisera : la transition écologique, l'accessibilité numérique et l'inclusion territoriale. Tel est le projet défendu par le Président de la République – un projet d'avenir, qui permettra, en France, la création de richesses, y compris fiscales.

S'il est des combats à mener sur le sujet de la fiscalité, ils sont européens : la taxation des plateformes numériques, la taxation minimale des entreprises, dans le droit fil des travaux de l'OCDE – Organisation de coopération et de développement économiques – , ou encore la lutte contre la fraude fiscale, notamment en matière de TVA – taxe sur la valeur ajoutée – , auxquelles j'ajoute, même s'il ne s'agit pas d'un impôt à proprement parler, le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières de l'Union européenne. Ce sont là des réformes efficaces que nous avons engagées et que nous défendons sur la scène internationale.

Mesdames et messieurs les députés, ce qui nous est proposé dans ce texte, c'est de retomber dans les mêmes voies sans issue. Au contraire, ce que nous proposons, c'est de dessiner un nouveau chemin commun.

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