Intervention de Michel Zumkeller

Séance en hémicycle du jeudi 18 juin 2020 à 15h00
Contribution des hauts revenus à l'effort de solidarité nationale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Zumkeller :

Je prends la parole au nom de mon collègue Christophe Naegelen, qui a dû regagner sa très belle circonscription. Beaucoup de choses ont été dites, beaucoup d'avis ont été donnés. Voici donc que revient l'éternel débat qui clive tant et dont nous nous saisissons à chaque crise. Celle qui s'abat aujourd'hui sur notre pays nous impose de réfléchir à nouveau à des mesures de justice sociale et fiscale.

La première question que nous devons nous poser à propos de la fiscalité est celle de son utilité : à quoi sert l'impôt ? Sa première finalité est, en effet, le financement des dépenses publiques et il est opportun de rappeler aux Français que leurs impôts servent à quelque chose. C'est, ensuite, le développement économique : en réduisant les impôts, nous favorisons notre économie. L'impôt a aussi une visée sociale et solidaire, dans l'axe d'une politique de redistribution pour aider ceux qui en ont besoin. Enfin, il a une fonction d'incitation, notamment pour favoriser les investissements.

Cette proposition de loi est intéressante, car elle soulève une question primordiale pour notre pays, à laquelle nous devons trouver une réponse immédiate : comment faire face aux enjeux de financement que la crise nous impose ? Faut-il reconsidérer notre politique budgétaire, construite depuis le début du quinquennat, en revenant sur la suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune et sur la création d'une flat tax, et en augmentant le taux de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, comme le propose ce texte ? En effet, l'impôt de solidarité sur la fortune a été transformé en décembre 2017 en impôt sur la fortune immobilière, axé sur les seuls patrimoines immobiliers nets taxables de plus de 1,3 million d'euros. Le Gouvernement avait décidé d'en exclure les placements bancaires et financiers et les liquidités – ce que, personnellement, je regrette car, comme nous le savons, la stabilité financière est un instrument essentiel pour reconstituer la confiance et relancer l'économie, et les entreprises comme les particuliers y sont très sensibles. Pourtant, en ces temps exceptionnels et compte tenu des répercussions importantes du covid-19 sur l'économie française, nous pouvons certes légitimement nous poser la question de la solidarité, mais nous devons aussi nous attacher à la forme qu'elle doit prendre, au risque de créer une fiscalité confiscatoire, et conjuguer les différents intérêts – notre attractivité et le redressement de nos finances – , sans oublier que la France n'est pas seule au monde et qu'il nous est indispensable de nous coordonner avec les autres pays de l'Union européenne.

La temporalité du débat est parfaite, car la mission de suivi de la réforme devait évaluer cette année, en 2020, les effets, en termes d'investissements dans les entreprises et de répartition des richesses, de la suppression de l'ISF et de la création de l'IFI et de la flat tax. Les chiffres sont déjà parlants : l'IFI a rapporté 2,1 milliards d'euros en 2019, alors que l'ISF en rapportait 5 milliards. Pour ma part, je suis persuadé qu'afin de participer au redressement de nos finances publiques, nous devrions plutôt faire contribuer le secteur financier, en augmentant les recettes de la taxe sur les transactions financières. Un meilleur rendement de cette taxe permettrait en effet de contribuer au contrecoup économique qu'annonce la crise du covid-19 et de répondre à la nécessité d'améliorer la gestion et le contrôle de la taxe en repensant son assiette, comme le souligne la Cour des comptes.

Parler de fiscalité avec sérénité et objectivité n'est pas chose facile, mais il me semble que ce texte ne résout pas ce problème. On ne peut pas se contenter de bricoler un impôt par-ci et un impôt par-là. La fiscalité du patrimoine exige d'être revue dans son ensemble pour retrouver une logique politique et économique. Pour toutes ces raisons, le groupe UDI et indépendants s'abstiendra sur cette proposition de loi.

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